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17/04/2025 | FRANCE | N°493339

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 17 avril 2025, 493339


Vu la procédure suivante :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre de pension qui lui a été concédé le 19 juillet 2021 en tant qu'il liquide sa pension de retraite sur la base de l'indice majoré 710 et d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de réviser sa pension et d'édicter un nouveau titre de pension prenant en compte l'indice majoré 769.



Par un jugement n° 2105396 du 12 février 2024, la magistrate désignée, en applic

ation de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, par le président du trib...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler le titre de pension qui lui a été concédé le 19 juillet 2021 en tant qu'il liquide sa pension de retraite sur la base de l'indice majoré 710 et d'enjoindre au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de réviser sa pension et d'édicter un nouveau titre de pension prenant en compte l'indice majoré 769.

Par un jugement n° 2105396 du 12 février 2024, la magistrate désignée, en application de l'article R. 222-13 du code de justice administrative, par le président du tribunal administratif de Toulouse, a fait droit à ses demandes.

Par un pourvoi enregistré le 11 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Céline Boniface, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Hannotin Avocats, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droit et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Sur le fondement de ces dispositions, M. A... demande au Conseil d'Etat de renvoyer au Conseil constitutionnel la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution des dispositions de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite, aux termes duquel : " En aucun cas, la pension allouée au titre de la durée des services ne peut être inférieure à celle qu'aurait obtenue le titulaire s'il n'avait pas été promu à un emploi ou à un grade supérieur ou reclassé en vertu des dispositions de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ". Il soutient que cette disposition méconnaît les principes d'égalité devant la loi et d'égalité devant les charges publiques garantis par les articles 6 et 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 : " La loi (...) doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ". Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. Les dispositions citées au point 2 sont applicables au litige et relèvent du domaine de la loi. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel. Le grief tiré de ce qu'elles portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, en ce qu'elle conduisent à ce qu'un agent reclassé dans le cadre d'une réforme statutaire, qui ne peut être regardé comme ayant bénéficié d'une promotion ou d'un reclassement pour inaptitude physique à l'exercice de ses fonctions au sens et pour l'application de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite, ne bénéficie pas de la garantie prévue par cet article pour la liquidation de ses droits à pension, soulève une question présentant un caractère sérieux. Ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité dirigée contre ces dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La question de la conformité à la Constitution de l'article L. 20 du code des pensions civiles et militaires de retraite est renvoyée au Conseil constitutionnel.

Article 2 : Il est sursis à statuer sur le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique jusqu'à ce que le Conseil constitutionnel ait tranché la question de constitutionnalité ainsi soulevée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A....

Copie en sera adressée au Premier ministre.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 493339
Date de la décision : 17/04/2025
Type de recours : Contentieux des pensions

Publications
Proposition de citation : CE, 17 avr. 2025, n° 493339
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Céline Boniface
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune
Avocat(s) : SAS HANNOTIN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:493339.20250417
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