Vu la procédure suivante :
Par une requête enregistrée le 8 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 3 juin 2024 rapportant le décret du 16 octobre 2017 lui accordant la nationalité française ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Julien Eche, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 27-2 du code civil : " Les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai de deux ans à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ; si la décision a été obtenue par mensonge ou fraude, ces décrets peuvent être rapportés dans le délai de deux ans à partir de la découverte de la fraude ".
2. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant malien, a déposé une demande de naturalisation auprès de la préfecture de Police de Paris le 22 février 2016, par laquelle il a indiqué être célibataire et sans enfant. Il a été naturalisé par décret du 16 octobre 2017. Par courriels reçu le 14 et 22 juin 2022, le consulat général de France à Bamako a informé le ministre en charge des naturalisations que M. A... avait quatre enfants nés au Mali avant sa naturalisation, respectivement en 2000, 2002, 2012 et 2014, tous les quatre résidant habituellement à l'étranger. Par décret du 3 juin 2024, le ministère de l'intérieur a rapporté le décret du 16 octobre 2017 prononçant la naturalisation de M. A... au motif qu'il avait été pris au vu d'informations mensongères délivrées par l'intéressé quant à sa situation familiale. M. A... demande l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret.
3. L'article 21-16 du code civil dispose que : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation ". Il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France de manière durable le centre de ses intérêts. Pour apprécier si cette condition est remplie, l'autorité administrative prend notamment en compte, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la situation personnelle et familiale en France de l'intéressée à la date du décret lui accordant la nationalité française.
4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... n'a mentionné, ni lors du dépôt de sa demande, ni à l'occasion de l'entretien d'assimilation, l'existence de ses quatre enfants. S'il soutient qu'il n'était pas le père de ces enfants avant leur reconnaissance par mariage avec leur mère le 8 septembre 2020, il ressort des actes de naissance de trois des enfants que leur filiation à l'égard de l'intéressé était établie dès la déclaration de leur naissance en 2000, 2002 et 2012. L'intéressé, dont la maîtrise de la langue française est attestée par le compte-rendu de l'entretien d'assimilation du 11 mai 2017 et par son attestation de compétences linguistiques en français du 19 février 2016, ne pouvait se méprendre ni sur la teneur des indications devant être portées à la connaissance de l'administration chargée d'instruire sa demande, ni sur la portée de la déclaration sur l'honneur qu'il a signée. Dans ces conditions, M. A... doit être regardé comme ayant volontairement dissimulé sa situation familiale. Par suite, en rapportant sa naturalisation, dans le délai de deux ans à compter de la découverte de la fraude, le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'a pas fait une inexacte application des dispositions de l'article 27-2 du code civil.
5. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 3 juin 2024 par lequel le Premier ministre a rapporté le décret du 16 octobre 2017. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.