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12/03/2025 | FRANCE | N°489030

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 12 mars 2025, 489030


Vu la procédure suivante :



Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale de l'apiculture française, l'Abeille Landaise, le Syndicat des apiculteurs du Lot-et-Garonne " l'Abeille Gasconne " et le Syndicat apicole de la Gironde demandent au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2023 du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire et du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relatif à

l'homologation du cahier des charges concernant la dénomination " Miel des Landes " e...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 24 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Union nationale de l'apiculture française, l'Abeille Landaise, le Syndicat des apiculteurs du Lot-et-Garonne " l'Abeille Gasconne " et le Syndicat apicole de la Gironde demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 août 2023 du ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire et du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique relatif à l'homologation du cahier des charges concernant la dénomination " Miel des Landes " en vue de la transmission à la commission européenne d'une demande d'enregistrement en tant qu'indication géographique protégée (IGP) ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 ;

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Cécile Isidoro, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. L'Union nationale de l'apiculture française, l'Abeille Landaise, le Syndicat des apiculteurs du Lot-et-Garonne " l'Abeille Gasconne " et le Syndicat apicole de la Gironde demandent l'annulation de l'arrêté du 17 août 2023 par lequel le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire ont homologué le cahier des charges relatif à la dénomination " Miel des Landes " en vue de la transmission de sa demande d'enregistrement en tant qu'indication géographique protégée (IGP) par la Commission européenne et ont accordé une protection nationale transitoire aux produits répondant à ce cahier des charges jusqu'à la publication au Journal officiel de l'Union européenne de l'acte d'enregistrement ou de la décision de rejet de la Commission européenne.

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la demande d'enregistrement de la dénomination " Miel des Landes " en tant qu'IGP a été déposée auprès de l'Institut national de l'origine et de la qualité (INAO) par le Syndicat des miels des Landes. Par suite, les requérants ne sauraient utilement invoquer, à l'encontre de l'acte attaqué, la circonstance que l'Association de développement de l'apiculture en Aquitaine (ADAAQ) ne remplirait pas les conditions fixées, pour présenter une telle demande, à l'article 49 du règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil du 21 novembre 2012 relatif aux systèmes de qualité applicables aux produits agricoles et aux denrées alimentaires.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 641-11 du code rural et de la pêche maritime : " Doivent solliciter le bénéfice d'une indication géographique protégée les produits agricoles ou alimentaires qui satisfont aux conditions posées par le règlement (UE) n° 1151/2012 du Parlement européen et du Conseil (...) et qui font l'objet, pour l'application de ces règlements, d'un cahier des charges proposé par l'Institut national de l'origine et de la qualité, homologué par arrêté du ou des ministres intéressés. / Si le produit ne satisfait pas aux conditions posées par les règlements mentionnés au précédent alinéa et se voit refuser ou annuler le bénéfice de l'indication géographique protégée, il perd le bénéfice de l'homologation de son cahier des charges. / (...). ". Par ailleurs, aux termes de l'article 5, paragraphe 2, du règlement du 21 novembre 2012 : " Aux fins du présent règlement, on entend par 'indication géographique protégée' une dénomination qui identifie un produit : a) comme étant originaire d'un lieu déterminé, d'une région ou d'un pays ; / b) dont une qualité déterminée, la réputation ou une autre propriété peut être attribuée essentiellement à son origine géographique ; / c) dont au moins une des étapes de production a lieu dans l'aire géographique délimitée ". Aux termes de l'article 7, paragraphe 1, du même règlement : " Une appellation d'origine protégée ou une indication géographique respecte un cahier des charges qui comporte au moins les éléments suivants : / (...) f) les éléments établissant : / (...) / ii) le cas échéant, le lien entre une qualité déterminée, la réputation ou une autre caractéristique du produit et l'origine géographique visée à l'article 5, paragraphe 2 ; / (...) ".

4. Il résulte de ces dispositions que l'homologation d'un cahier des charges d'une indication géographique protégée, qui n'est pas une simple indication de provenance géographique, ne peut légalement intervenir que si ce cahier précise les éléments qui permettent d'attribuer à une origine géographique déterminée une qualité, une réputation ou d'autres caractéristiques particulières du produit qui fait l'objet de l'indication et met en lumière de manière circonstanciée le lien géographique et l'interaction causale entre la zone géographique et la qualité, la réputation ou d'autres caractéristiques du produit.

5. Le cahier des charges homologué par l'arrêté attaqué a fixé les limites de l'aire géographique du " Miel des Landes ", qui couvre le plateau sédimentaire longeant la côte Atlantique du sud du département des Landes jusqu'à la pointe de Grave et dont l'extrémité orientale se situe à Nérac. Si les requérants soutiennent qu'il n'existe aucune spécificité du miel produit dans cette aire par rapport à d'autres miels produits dans d'autres aires géographiques, il ressort toutefois des pièces du dossier, notamment de l'expertise réalisée par l'INAO, que les qualités organoleptiques singulières aux miels répondant au cahier des charges sont l'expression d'un territoire marqué par un sol sableux, par une multiplicité des espèces florales qui permet l'étalement de la récolte du miel, ainsi par que des facteurs humains qui établissent le lien entre l'aire géographique délimitée et la production existante. Sont à cet égard sans incidence la circonstance que des miels présentant certaines de ces caractéristiques soient également fabriqués dans d'autres aires géographiques, où existent des espèces florales certes identiques mais poussant sur des sols et sous des climats différents, celle que des facteurs humains similaires se retrouvent dans la fabrication de miels d'autres aires géographiques et celle que certaines étapes de la production du miel, plus particulièrement son extraction, son stockage et son conditionnement, puissent être réalisées en dehors de l'aire géographique. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaîtrait les exigences du règlement du 21 novembre 2012 et celles de l'article L. 641-11 du code rural et de la pêche maritime et qu'il serait entaché d'une erreur d'appréciation. Enfin, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le système de contrôle mis en place par le cahier des charges est suffisant pour garantir au consommateur, conformément aux objectifs poursuivis par le règlement précité, que le produit " Miel des Landes " possède les caractéristiques spécifiques de son indication géographique.

6. En dernier lieu, l'arrêté attaqué n'a ni pour objet ni pour effet de procéder à la reconnaissance d'un organisme de défense et de gestion, laquelle est prononcée, en vertu de l'article R. 642-34 du code rural et de la pêche maritime, par décision du directeur de l'INAO. Par suite, le moyen tiré de ce que le Syndicat des miels des Landes ne remplirait pas les conditions nécessaires pour être reconnu comme un organisme de défense et de gestion ne peut qu'être écarté comme inopérant.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de l'Union nationale de l'apiculture française doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de chacune des quatre associations requérantes une somme de 750 euros, à verser au même titre à l'INAO.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de l'Union nationale de l'apiculture française et autres est rejetée.

Article 2 : L'Union nationale de l'apiculture française, l'Abeille Landaise, le Syndicat des apiculteurs du Lot-et-Garonne " l'Abeille Gasconne " et le Syndicat apicole de la Gironde verseront chacun la somme de 750 euros à l'INAO au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Union nationale de l'apiculture française, à l'Abeille Landaise, au Syndicat des apiculteurs du Lot-et-Garonne " l'Abeille Gasconne ", au Syndicat apicole de la Gironde, à la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à l'Institut national de l'origine et de la qualité.

Délibéré à l'issue de la séance du 13 février 2025 où siégeaient : M. Philippe Ranquet, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat et Mme Cécile Isidoro, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 12 mars 2025.

Le président :

Signé : M. Philippe Ranquet

La rapporteure :

Signé : Mme Cécile Isidoro

La secrétaire :

Signé : Mme Elisabeth Ravanne


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 489030
Date de la décision : 12/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 mar. 2025, n° 489030
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Cécile Isidoro
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : CABINET FRANÇOIS PINET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:489030.20250312
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