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25/02/2025 | FRANCE | N°496080

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 25 février 2025, 496080


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 juillet et 12 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation (FHP - SMR) demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 mai 2024 fixant pour l'année 2023 les dotations régionales mentionnées à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, les dotations régionales de financement des missions d'intérêt

général et d'aide à la contractualisation, les dotations urgences, les dotations relatives à la ...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 17 juillet et 12 août 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation (FHP - SMR) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 6 mai 2024 fixant pour l'année 2023 les dotations régionales mentionnées à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, les dotations régionales de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, les dotations urgences, les dotations relatives à la psychiatrie mentionnées aux 1°, 3°, 5°, 6°, 8° de l'article R. 162-31-1 du même code, ainsi que le montant des transferts prévus à l'article L. 174-1-2 du même code ;

2°) de mettre à la charge de l'État la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le décret n° 2022-597 du 21 avril 2022 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 janvier 2025, présentée par la fédération de l'hospitalisation privée - soins médicaux et de réadaptation (FHP - SMR) ;

Considérant ce qui suit :

1. D'une part, en vertu de l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, chaque année est défini un objectif de dépenses d'assurance maladie, constitué du montant total des charges supportées par les régimes obligatoires d'assurance maladie, afférent aux différentes activités des établissements qu'il énumère. Le I de cet article prévoit que le montant de cet objectif " est constitué en dotations régionales. (...) Le montant des dotations régionales est fixé par l'Etat en tenant compte de l'activité des établissements, des orientations du projet régional ou Interrégional de santé et des priorités nationales ou locales en matière de politique sanitaire. " Le premier alinéa de l'article L. 174-1-2 du même code prévoit par ailleurs que : " Une part du montant de la dotation régionale mentionnée à l'article L. 174-1 peut être transférée, par arrêté du directeur général de l'agence régionale de santé, au fonds d'intervention régional mentionné à l'article L. 1435-8 du code de la santé publique. De la même manière, une part du montant du fonds d'intervention régional dont la gestion est déléguée à l'agence régionale de santé peut être transférée vers la dotation régionale mentionnée à l'article L. 174-1. (...) ". La Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 6 mai 2024 fixant pour l'année 2023 les dotations régionales mentionnées à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale, les dotations régionales de financement des missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation, les dotations urgences, les dotations relatives à la psychiatrie mentionnées aux 1°, 3°, 5°, 6°, 8° de l'article R. 162-31-1 du même code, ainsi que le montant des transferts prévus à l'article L. 174-1-2 du même code.

2. D'autre part, en vertu du I de l'article L. 162-23 du code de la sécurité sociale, chaque année est défini un objectif de dépenses d'assurance maladie afférentes aux activités de soins de suite et de réadaptation, devenus soins médicaux et de réadaptation, qui sont exercées par les différents établissements de santé mentionnés à l'article L. 162-22-6 de ce code. Cet objectif est constitué du montant annuel de charges supportées par les régimes obligatoires d'assurance maladie afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés au cours de l'année dans le cadre de ces activités. L'article L. 162-23-3 de ce code précise que, pour ces activités, les établissements de santé mentionnés à l'article L. 162-22-6 de ce code " bénéficient d'un financement mixte sous la forme de recettes issues directement de l'activité, dans les conditions prévues au I de l'article L. 162-23-4, et d'une dotation forfaitaire visant à sécuriser de manière pluriannuelle le financement de leurs activités, selon des modalités définies par décret en Conseil d'Etat ". Le I de l'article L. 162-23-4 de ce code dispose que : " Chaque année, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, selon les modalités prévues au II de l'article L. 162-23 : / 1° Les tarifs nationaux des prestations mentionnées au 1° de l'article L. 162-23-1, qui peuvent être différenciés par catégories d'établissements, notamment en fonction des conditions d'emploi du personnel médical. Ces tarifs sont calculés en fonction de l'objectif défini à l'article L. 162-23 ; / 2° Le cas échéant, les coefficients géographiques s'appliquant aux tarifs nationaux mentionnés au 1° du présent article et au forfait prévu à l'article L. 162-23-7 des établissements implantés dans certaines zones, afin de tenir compte d'éventuels facteurs spécifiques qui modifient de manière manifeste, permanente et substantielle le prix de revient de certaines prestations dans la zone considérée ; / 3° Le coefficient mentionné au I de l'article L. 162-23-5 ; / 4° Les modalités de calcul de la dotation forfaitaire mentionnée à l'article L. 162-23-3 ; / 6° Le montant des forfaits annuels mentionnés à l'article L. 162-23-7. / Sont applicables au 1er mars de l'année en cours les éléments mentionnés aux 1° à 3°. / Sont applicables au 1er janvier de l'année en cours les éléments mentionnés aux 4° à 6° ".

3. Le décret du 21 avril 2022 relatif à la réforme du financement des activités de soins de suite et de réadaptation, tel que modifié par le décret du 29 juillet 2023 relatif à la réforme du financement des activités de soins médicaux et de réadaptation, détermine les modalités de calcul des recettes issues de l'activité et de la dotation qui composent le financement mixte des établissements exerçant des activités de soins médicaux et de réadaptation, fixe les conditions du versement à ces établissements des dotations et des forfaits composant ce financement et organise l'entrée en vigueur de ces nouvelles modalités de financement, dont la possibilité d'un versement complémentaire aux établissements concernés, qualifié de " régularisation ex-post ", correspondant au différentiel positif entre les recettes qu'ils auraient dû percevoir en 2023 au titre du nouveau mode de financement et les recettes qu'ils ont effectivement perçues cette année. Il ressort des pièces du dossier, notamment des écritures en défense de la ministre de la santé et de l'accès aux soins, que les dotations régionales finançant les missions d'intérêt général et d'aide à la contractualisation dont le versement est prévu par l'arrêté du 6 mai 2024 en litige incluent les crédits permettant le versement aux établissements de santé des dotations prévues par le décret du 21 avril 2022 précité.

Sur les moyens de légalité externe :

4. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : / 1° les (...) directeurs d'administration centrale (...) /2° Les chefs de service (...) ".

5. Il résulte de ces dispositions, d'une part, que Mme C... D..., nommée cheffe de service, adjointe au directeur de la sécurité sociale, à l'administration centrale des ministères sociaux pour une période de trois ans, à compter du 1er juillet 2022, par un arrêté du 27 juin 2022 publié au Journal officiel de la République française du 28 juin 2022, était habilitée à signer l'arrêté attaqué au nom des ministres chargés de la sécurité sociale et, d'autre part, que Mme B... A..., nommée directrice générale de l'offre de soins à compter du 1er novembre 2022, par un décret du 5 octobre 2022 publié au Journal officiel de la République française du 6 octobre 2022, était habilitée à signer l'arrêté attaquée au nom du ministre chargé de la santé. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de Mme D... et de Mme A..., signataires de l'arrêté attaqué, doit être écarté.

6. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article 4 du décret du 21 avril 2022 : " Pour les prestations de soins réalisées entre le 1er juillet 2023 et le 31 décembre 2023 au titre des activités de soins médicaux et de réadaptation, les recettes des établissements mentionnés à l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale leur sont versées selon les modalités suivantes : / (...) 2° Au plus tard le 30 mars 2024, le directeur général de l'agence régionale de santé arrête, pour chaque établissement, les montants de son financement mixte, mentionné à l'article L. 162-23-3 du même code, au titre de la période mentionnée au premier alinéa du présent I, ainsi que, le cas échéant, le différentiel entre ce montant et les recettes perçues en application du 1° ". L'échéance du 30 mars 2024 fixée par le 2° du I de l'article 4 du décret du 21 avril 2022 n'étant pas relative à l'arrêté en litige, le moyen tiré de ce que ce dernier aurait été publié tardivement ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

7. En dernier lieu, l'obligation de motivation prévue à l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ne s'applique, selon les termes mêmes de cet article, qu'aux " décisions administratives individuelles défavorables ". L'arrêté attaqué, qui est un acte réglementaire, n'avait donc pas à être motivé en application de cet article, non plus que d'aucune autre disposition ni d'aucun principe.

Sur les moyens de légalité interne :

8. En premier lieu, d'une part, les montants des dotations régionales, fixés par l'arrêté attaqué, ne sont ni imprécis ni équivoques. D'autre part, l'arrêté en litige n'a pas pour objet de déterminer les modalités de la répartition des différentes dotations qu'il prévoit entre régions, mais uniquement d'opérer cette répartition elle-même. Par suite, et alors que la fédération requérante ne peut utilement se prévaloir, ni de la circonstance, à la supposer même établie, que les modalités de répartition du montant de la " régularisation ex-post " lui auraient été présentées de manière différente en novembre et décembre 2023 puis le 3 mai 2024, ni de l'absence de publication des arrêtés prévus par le 2° du I de l'article 4 du décret du 21 avril 2022 mentionnées au point 4, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige méconnaîtrait l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la norme ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué se borne à fixer le montant des dotations régionales prévues à l'article L. 174-1 du code de la sécurité sociale ainsi que d'autres dotations de financement des établissements, réparties par région, et n'opère, par lui-même, aucune répartition de cette dotation entre établissements, ni aucune différence de traitement entre les différentes catégories d'établissements de santé. Par suite, la fédération requérante ne peut utilement soutenir, ni qu'il méconnaîtrait pour ce motif le principe d'égalité entre établissements de santé, ni que le montant alloué à certains établissements serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation, ni, enfin, qu'il aurait été porté atteinte à l'espérance légitime de certains établissements de bénéficier d'une " régularisation ex-post ".

10. En dernier lieu, l'arrêté attaqué ne fixe pas davantage les modalités de détermination de la dotation forfaitaire mentionnée au 2° de l'article R. 162-34-2 du code de la sécurité sociale et prévue par le II de l'article 4 du décret du 21 avril 2022 précité. Par suite, la fédération requérante ne peut pas plus utilement soutenir qu'il serait, pour ce motif, entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté qu'elle attaque.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation (FHP - SMR) est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux et de réadaptation (FHP - SMR) et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 23 janvier 2025 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Édouard Geffray, conseiller d'Etat et M. Jean-Luc Matt, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 25 février 2025.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

Le rapporteur :

Signé : M. Jean-Luc Matt

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 496080
Date de la décision : 25/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 fév. 2025, n° 496080
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Luc Matt
Rapporteur public ?: M. Thomas Janicot
Avocat(s) : SCP PIWNICA & MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:496080.20250225
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