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25/02/2025 | FRANCE | N°495992

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 25 février 2025, 495992


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 15 juillet et 12 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales - Force Ouvrière demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions nées le 3 juillet 2024 par lesquelles le Premier ministre a implicitement rejeté ses demandes du 3 mai 2024 tendant, au bénéfice des professeurs d'enseignement général et technique des instituts na

tionaux de jeunes sourds (INJS) et de l'Institut national des jeunes aveugles (INJA), d...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 15 juillet et 12 décembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales - Force Ouvrière demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions nées le 3 juillet 2024 par lesquelles le Premier ministre a implicitement rejeté ses demandes du 3 mai 2024 tendant, au bénéfice des professeurs d'enseignement général et technique des instituts nationaux de jeunes sourds (INJS) et de l'Institut national des jeunes aveugles (INJA), d'une part, à la revalorisation du montant de la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves à hauteur de 2 500 euros par an et de celui de la part modulable de cette indemnité en adéquation avec les montants accordés par le ministère de l'éducation nationale, d'autre part, à l'octroi d'une indemnité équivalente à celle de l'indemnité pour les personnels enseignants exerçant dans certaines structures de l'enseignement spécialisé et adapté à hauteur de 1 765 euros par an et, enfin, à l'octroi d'une indemnité équivalente à celle perçue par les enseignants du premier et du second degrés exerçant certaines missions particulières liées à la scolarisation des élèves en situation de handicap et à la pratique de l'éducation inclusive à hauteur de 1 250 euros par an ;

2°) d'enjoindre à l'Etat, d'une part, de revaloriser le montant de la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves à hauteur de 2 500 euros par an pour les professeurs des INJS et de INJA et celui et de la part modulable, prévue par le même décret, en adéquation avec les montants prévus pour les professeurs de l'éducation nationale, d'autre part, d'octroyer aux professeurs des INJS et de INJA une indemnité équivalente à celle de l'indemnité perçue par les personnels enseignants exerçant dans certaines structures de l'enseignement spécialisé et adapté à hauteur de 1 765 euros par an, et, enfin, d'octroyer aux professeurs des INJS et de INJA une indemnité équivalente à celle octroyée aux enseignants du premier et du second degrés exerçant certaines missions particulières liées à la scolarisation des élèves en situation de handicap à hauteur de 1 250 euros par an ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le décret n° 74-355 du 26 avril 1974 ;

- le décret n° 93-55 du 15 janvier 1993 ;

- le décret n° 93-292 du 8 mars 1993 ;

- le décret n° 93-293 du 8 mars 1993 ;

- le décret n° 93-294 du 8 mars 1993 ;

- le décret n° 95-1095 du 10 octobre 1995 ;

- le décret n° 2013-790 du 30 août 2013 ;

- le décret n° 2017-964 du 10 mai 2017 ;

- le décret n° 2017-965 du 10 mai 2017 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Hervé Cassara, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que, par un courrier reçu le 3 mai 2024, le Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales - Force Ouvrière a demandé au Premier ministre, au bénéfice des professeurs d'enseignement général et technique des instituts nationaux de jeunes sourds et de l'Institut national des jeunes aveugles, d'une part, la revalorisation du montant de la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves versée à hauteur de 2 500 euros par an et de celui de la part modulable de cette indemnité en adéquation avec les montants accordés par le ministère de l'éducation nationale aux enseignants du premier et du second degrés, d'autre part, l'octroi d'une indemnité équivalente à celle de l'indemnité pour les personnels enseignants exerçant dans certaines structures de l'enseignement spécialisé et adapté à hauteur de 1 765 euros par an et, enfin, l'octroi d'une indemnité équivalente à celle perçue par les enseignants du premier et du second degrés exerçant certaines missions particulières liées à la scolarisation des élèves en situation de handicap et à la pratique de l'éducation inclusive à hauteur de 1 250 euros par an. Ce syndicat demande au Conseil d'Etat, statuant au contentieux, d'annuler pour excès de pouvoir les décisions par lesquelles ses demandes ont été implicitement rejetées par le Premier ministre.

2. Aux termes de l'article 1er du décret du 26 avril 1974 relatif à l'organisation et au régime administratif et financier des instituts nationaux de jeunes sourds et de jeunes aveugles : " Les instituts nationaux de jeunes sourds et de jeunes aveugles constituent des établissements publics nationaux à caractère administratif. Ils sont administrés, chacun sous l'autorité du ministre chargé de la santé publique, par un directeur et un conseil d'administration dans les conditions fixées par les décrets susvisés des 10 décembre 1953, 12 mai 1961, 29 décembre 1962 et 6 décembre 1965. / La liste des instituts est fixée par décret sur le rapport du ministre chargé de la santé publique et du ministre de l'économie et des finances ". Aux termes de l'article 1er du décret du 8 mars 1993 portant statut particulier du corps des professeurs d'enseignement général de l'Institut national des jeunes aveugles : " Les professeurs d'enseignement général de l'Institut national des jeunes aveugles forment un corps classé dans la catégorie A prévue à l'article 29 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée susvisée. / Ses membres sont nommés et titularisés par arrêté du ministre chargé des affaires sociales ". Aux termes de l'article 1er du décret du 8 mars 1993 portant statut particulier du corps des professeurs d'enseignement général des instituts nationaux de jeunes sourds : " Les professeurs d'enseignement général des instituts nationaux de jeunes sourds forment un corps classé dans la catégorie A prévue à l'article 29 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée susvisée. / Ses membres sont nommés et titularisés par arrêté du ministre chargé des affaires sociales ". Aux termes de l'article 1er du décret du 8 mars 1993 portant statut particulier du corps des professeurs d'enseignement technique des instituts nationaux de jeunes sourds et de l'Institut national des jeunes aveugles : " Les professeurs d'enseignement technique des instituts nationaux de jeunes sourds et de l'Institut national des jeunes aveugles forment un corps classé dans la catégorie A prévue à l'article 29 de la loi du 11 janvier 1984 modifiée susvisée. / Ses membres sont nommés et titularisés par arrêté du ministre chargé des affaires sociales ".

3. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier. S'agissant des règles régissant les fonctionnaires, le principe d'égalité n'est en principe susceptible de s'appliquer qu'entre les agents appartenant à un même corps, sauf à ce que la norme en cause ne soit, en raison de son contenu, pas limitée à un même corps ou à un même cadre d'emplois de fonctionnaires.

4. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 1er du décret du 10 octobre 1995 instituant une indemnité de suivi et d'orientation des élèves en faveur des professeurs de l'Institut national des jeunes aveugles et des instituts nationaux de jeunes sourds : " Une indemnité de suivi et d'orientation des élèves, non soumise à retenue pour pension civile de retraite, est allouée aux personnels enseignants des instituts nationaux de jeunes sourds et de l'Institut national des jeunes aveugles. / Cette indemnité comprend une part fixe, à laquelle peut s'ajouter une part modulable ". D'autre part, aux termes de l'article 1er du décret du 15 janvier 1993 instituant une indemnité de suivi et d'orientation des élèves en faveur des personnels enseignants du second degré : " Une indemnité de suivi et d'orientation des élèves non soumise à retenues pour pensions est allouée aux personnels enseignants du second degré exerçant dans les établissements scolaires du second degré ou affectés au Centre national d'enseignement à distance. / Bénéficient dans les mêmes conditions de l'indemnité prévue par le présent décret, les enseignants du second degré exerçant dans les établissements ou services de santé ou médico-sociaux, mentionnés aux articles L. 351-1 et D. 351-17 du code de l'éducation, dans les établissements régionaux d'enseignement adapté, dans les sections d'enseignement général et professionnel adapté des collèges et dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire des collèges et des lycées. / Cette indemnité comprend une part fixe à laquelle peuvent s'ajouter : / - une ou, à titre exceptionnel, plusieurs parts modulables ; / - une ou plusieurs parts fonctionnelles. ". Aux termes de l'article 1er du décret du 30 août 2013 instituant une indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves au bénéfice des personnels enseignants du premier degré : " Une indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves est allouée aux personnels enseignants du premier degré exerçant dans les écoles maternelles et élémentaires. / Bénéficient dans les mêmes conditions de l'indemnité prévue par le présent décret, les enseignants du premier degré exerçant dans les établissements ou services de santé ou médico-sociaux, mentionnés aux articles L. 351-1 et D. 351-17 du code de l'éducation, dans les établissements régionaux d'enseignement adapté, dans les sections d'enseignement général et professionnel adapté des collèges et dans les unités localisées pour l'inclusion scolaire des collèges et des lycées. / Cette indemnité comprend une part fixe à laquelle peuvent s'ajouter une ou plusieurs parts fonctionnelles ".

5. Il résulte des dispositions citées au point 4 que les membres des corps des professeurs d'enseignement général et technique des instituts nationaux de jeunes sourds et de l'Institut national des jeunes aveugles mentionnés au point 2 bénéficient d'une indemnité de suivi et d'orientation des élèves, qui est distincte de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves et de l'indemnité de suivi et d'accompagnement des élèves allouées respectivement aux personnels enseignants du premier et du second degrés qui appartiennent à des corps distincts. Par suite, le syndicat requérant ne peut utilement soutenir que le principe d'égalité de traitement, qui s'applique, s'agissant de ce régime indemnitaire, uniquement aux fonctionnaires appartenant à un même corps, aurait été méconnu au motif que l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves dont ils bénéficient n'aurait pas été revalorisée dans les mêmes proportions que les indemnités allouées respectivement aux personnels enseignants des corps du premier degré et du second degré de l'éducation nationale et que ceux-ci bénéficieraient en conséquence d'un régime indemnitaire moins favorable.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 10 mai 2017 instituant une indemnité pour les personnels enseignants exerçant dans certaines structures de l'enseignement spécialisé et adapté : " Une indemnité est allouée aux personnels enseignants des premier et second degrés exerçant dans une ou plusieurs des structures ci-après : / 1° Section d'enseignement général et professionnel adapté, / 2° Établissement régional d'enseignement adapté, / 3° Unité localisée pour l'inclusion scolaire des collèges et des lycées, / 4° Etablissements ou services de santé ou médico-sociaux, mentionnés aux articles L. 351-1 et D. 351-17 du code de l'éducation. / L'indemnité prévue au 1er alinéa est allouée dans les mêmes conditions aux directeurs adjoints des sections d'enseignement général et professionnel adapté ". Dès lors que les membres des corps des professeurs de l'Institut national des jeunes aveugles et des instituts nationaux de jeunes sourds mentionnés au point 2 appartiennent à des corps distincts de ceux des personnels enseignants des premier et second degrés de l'éducation nationale exerçant dans les structures mentionnées par les dispositions de l'article 1er du décret du 10 mai 2017, le syndicat requérant ne peut utilement soutenir que le principe d'égalité de traitement aurait été méconnu au motif que les premiers ne bénéficieraient pas de l'indemnité allouée aux seconds.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 10 mai 2017 instituant une indemnité pour mission particulière allouée à certains personnels enseignants du premier degré : " Une indemnité peut être allouée aux personnels enseignants du premier degré assurant, avec leur accord, une mission particulière soit à l'échelon académique soit à l'échelon départemental en application de l'article 3-3 du décret du 30 juillet 2008 susvisé, dans les conditions fixées par le présent décret ". Aux termes de l'article 3 du même décret : " Dans le cadre des orientations fixées par le ministre chargé de l'éducation nationale, l'indemnité instituée à l'article premier est allouée aux personnels enseignants du premier degré désignés, avec leur accord, par le recteur d'académie, lorsque les besoins du service le justifient, pour assurer les missions de : / (...) - référent auprès des élèves handicapés dans les conditions et selon les modalités fixées aux articles D. 351-12 à D. 351-15 du code de l'éducation ". Le syndicat requérant ne peut pas davantage soutenir utilement que le principe d'égalité de traitement aurait été méconnu au motif que les membres des corps des professeurs de l'Institut national des jeunes aveugles et des instituts nationaux de jeunes sourds, distincts de ceux des personnels enseignants du premier degré, ne bénéficieraient pas de l'indemnité allouée à ces derniers par les dispositions de l'article 1er du décret du 10 mai 2017 précitées.

8. Il résulte de ce qui précède que le Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales - Force Ouvrière n'est pas fondé à demander l'annulation des décisions qu'il attaque. Il suit de là que sa requête doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales - Force Ouvrière est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au Syndicat national des personnels des affaires sanitaires et sociales - Force Ouvrière, au Premier ministre et à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.

Copie en sera adressée au ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 495992
Date de la décision : 25/02/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 fév. 2025, n° 495992
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Hervé Cassara
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune

Origine de la décision
Date de l'import : 02/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:495992.20250225
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