Vu la procédure suivante :
La société Multi Transports Express a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2016 et 2017. Par un jugement
n° 2017811 du 28 septembre 2022, ce tribunal a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'un dégrèvement intervenu en cours d'instance et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Par un arrêt n° 22PA04953 du 28 juin 2023, la cour administrative d'appel de Paris, saisie de l'appel formé par la société Multi Transports Express contre ce jugement, a prononcé une décharge partielle de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés en litige au titre de l'exercice clos en 2016 et rejeté le surplus des conclusions de sa requête.
Par un pourvoi, enregistré le 23 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er à 4 de cet arrêt ;
2°) réglant l'affaire au fond dans cette mesure, de réduire la base d'imposition de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés en litige au titre de l'exercice clos en 2016 de la somme de 1 075,36 euros et de rejeter le surplus des conclusions de la requête de celle-ci.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité, la société Multi Transports Express a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2016 et 2017. Par un jugement du 28 septembre 2022, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 28 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Paris en tant qu'il a prononcé une décharge partielle de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés en litige au titre de l'exercice clos en 2016.
2. Aux termes de l'article 38 du code général des impôts, rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés. (...) 4 bis. Pour l'application des dispositions du 2, pour le calcul de la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de l'exercice, l'actif net d'ouverture du premier exercice non prescrit déterminé, sauf dispositions particulières, conformément aux premiers et deuxièmes alinéas de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales ne peut être corrigé des omissions ou erreurs entraînant une sous-estimation ou surestimation de celui-ci. / Les dispositions du premier alinéa ne s'appliquent pas lorsque l'entreprise apporte la preuve que ces omissions ou erreurs sont intervenues plus de sept ans avant l'ouverture du premier exercice non prescrit. (...)".
3. En vertu des dispositions du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts citées au point 2, une erreur ou omission affectant l'évaluation d'un élément quelconque de l'actif ou du passif du bilan d'un des exercices non prescrits peut, si elle a été commise au cours d'un exercice clos plus de sept ans avant l'ouverture du premier des exercices non prescrits, être corrigée de manière symétrique dans les bilans de clôture et d'ouverture des exercices non prescrits, y compris dans le bilan d'ouverture du premier d'entre eux.
4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a jugé que l'administration fiscale avait à tort réintégré dans les résultats de la société Multi Transports Express, au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2016, le montant de 25 687,95 euros, regardé comme un passif injustifié, au motif que la société avait établi que cette somme figurait déjà au crédit du compte 467000 à la clôture de l'exercice 2009 de sorte qu'elle était en droit de bénéficier du droit de correction prévu au deuxième alinéa du 4 bis de l'article 38 du code général des impôts cité au point 2.
5. En statuant ainsi, alors que l'exercice clos le
31 décembre 2009 n'avait pas été clos plus de sept ans avant l'ouverture, le
1er janvier 2016, du premier exercice non prescrit, la cour a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, le ministre est fondé à demander l'annulation des articles 1er à 4 de l'arrêt qu'il attaque.
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er à 4 de l'arrêt du 28 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Paris sont annulés.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de la cassation prononcée à l'article 1er, à la cour administrative d'appel de Paris.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la ministre chargée des comptes publics et à la société Multi Transports Express.
Délibéré à l'issue de la séance du 16 janvier 2025 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Vincent Daumas, conseiller d'Etat et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 19 février 2025.
La présidente :
Signé : Mme Anne Egerszegi
Le rapporteur :
Signé : M. Cyril Martin de Lagarde
Le secrétaire :
Signé : M. Gilles Ho
La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :