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11/02/2025 | FRANCE | N°491009

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 11 février 2025, 491009


Vu la procédure suivante :



La société Edelweiss Paradise LDA a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2022 par lequel la préfète du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un permis de construire sur le territoire de la commune de Saint-Maur-des-Fossés et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer le permis sollicité dans le délai d'un mois. Par un jugement n° 2300765 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif a fait droit à sa demande.



Par un pourvoi, enregistré le 19 janvier 202

4 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la transition écologique e...

Vu la procédure suivante :

La société Edelweiss Paradise LDA a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2022 par lequel la préfète du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un permis de construire sur le territoire de la commune de Saint-Maur-des-Fossés et d'enjoindre à la préfète de lui délivrer le permis sollicité dans le délai d'un mois. Par un jugement n° 2300765 du 3 octobre 2023, le tribunal administratif a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 19 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de la société Edelweiss Paradise LDA.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyrille Beaufils, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à Maître Haas, avocat de la société Edelweiss Paradise LDA et la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de la commune de Saint-Maur-des-Fossés ;

Considérant ce qui suit :

Sur le cadre juridique du litige :

1. L'article L. 302-9-1 du code de la construction et de l'habitation prévoit que, dans les communes ayant fait l'objet d'un arrêté constatant leur carence dans la réalisation des objectifs de production de logements sociaux qui leur incombent, " cet arrêté peut aussi prévoir les secteurs dans lesquels le représentant de l'Etat dans le département est compétent pour délivrer les autorisations d'utilisation et d'occupation du sol pour des catégories de constructions ou d'aménagements à usage de logements listées dans l'arrêté ".

2. Par un arrêté du 30 décembre 2020, le préfet du Val-de-Marne a constaté la carence de la commune de Saint-Maur-des-Fossés dans la réalisation des objectifs de production de logements sociaux et décidé, sur le fondement des dispositions citées au point 1, que, pour l'ensemble du territoire de la commune, la délivrance des permis de construire, pour les opérations de construction ou de changement de destination à destination d'habitation, relèveraient de sa compétence, à l'exception des opérations créant 3 logements ou moins.

3. Statuant au titre de ces pouvoirs, le préfet du Val-de-Marne a refusé, par arrêté du 14 décembre 2022, de délivrer à la société Edelweiss Paradise LDA un permis de construire, sur le territoire de la commune de Saint-Maur-des-Fossés, un immeuble comportant dix logements, trois commerces et des parkings, conduisant à la construction d'une surface de 759 mètres carrés de logement sur une surface de plancher totale de 934 mètres carrés.

Sur le pourvoi :

4. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires se pourvoit en cassation contre le jugement du 3 octobre 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé le refus opposé par le préfet à la demande de permis de construire de la société Edelweiss Paradise LDA.

5. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 111-24 du code de l'urbanisme : " Conformément à l'article L. 302-9-1-2 du code de la construction et de l'habitation, dans les communes faisant l'objet d'un arrêté au titre de l'article L. 302-9-1 du même code, dans toute opération de construction d'immeubles collectifs de plus de douze logements ou de plus de 800 mètres carrés de surface de plancher, au moins 30 % des logements familiaux sont des logements locatifs sociaux définis à l'article L. 302-5 dudit code, hors logements financés avec un prêt locatif social. L'autorité administrative compétente de l'Etat, sur demande motivée de la commune, peut déroger à cette obligation pour tenir compte de la typologie des logements situés à proximité de l'opération. "

6. Il résulte de ces dispositions, d'une part, qu'un immeuble collectif est soumis à l'obligation qu'elles prévoient de compter une part de logements locatifs sociaux soit lorsqu'il comporte plus de douze logements, soit lorsqu'il consacre plus de 800 mètres carrés de surface de plancher à un usage d'habitation. D'autre part, lorsqu'un immeuble répond à l'un de ces critères, la proportion de 30 % de logements locatifs sociaux, prévue par ces dispositions, s'applique au nombre de logements familiaux figurant dans le projet, sans considération de la part que représente leur surface au sein de la surface totale dédiée à l'habitation dans l'immeuble.

7. Il résulte de ce qui précède qu'en jugeant que le seuil de 800 mètres carrés mentionné à l'article L. 111-24 du code de l'urbanisme s'appréciait, quelle que soit la destination principale de l'immeuble, au regard de la seule surface de plancher du projet dédiée aux logements, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit. Le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires n'est, par suite, pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque.

Sur les frais de l'instance :

8. Ainsi qu'il a été dit aux points 1 à 3, le refus de permis de construire attaqué par la société Edelweiss Paradise LDA n'a pas été pris par le maire de Saint-Maur-des-Fossés agissant au nom de la commune, mais par le préfet du Val-de-Marne. Il s'ensuit que la commune de Saint-Maur-des-Fossés n'a pas la qualité de défendeur dans la présente instance. Sa présence en qualité d'observateur ne lui confère pas davantage la qualité de partie, dès lors qu'elle n'aurait pas eu, à défaut d'être présente, qualité pour faire tierce-opposition à la présente décision. Par suite, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme qu'elle demande, sur le fondement de ces dispositions, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

9. Il y a lieu, en revanche, au titre des mêmes dispositions, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société Edelweiss Paradise LDA.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires est rejeté.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Maur-des-Fossés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : L'Etat versera à la société Edelweiss Paradise LDA une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, à la société Edelweiss Paradise LDA et à la commune de Saint-Maur-des-Fossés.

Délibéré à l'issue de la séance du 15 janvier 2025 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre, M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat, Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat ; M. Laurent Cabrera et M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat ; M. Jean-Dominique Langlais, conseiller d'Etat et M. Cyrille Beaufils, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 11 février 2025.


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 491009
Date de la décision : 11/02/2025

Analyses

LOGEMENT - HABITATIONS À LOYER MODÉRÉ - OBLIGATION DE MIXITÉ SOCIALE DES OPÉRATIONS DE CONSTRUCTION D’IMMEUBLES COLLECTIFS DANS LES COMMUNES FAISANT L’OBJET D’UN ARRÊTÉ DE CARENCE EN MATIÈRE DE LOGEMENT SOCIAL (ART - L - 111-24 DU CODE DE L’URBANISME) – 1) CHAMP – IMMEUBLES COMPORTANT PLUS DE DOUZE LOGEMENTS OU PLUS DE 800 M² DE SURFACE DE PLANCHER CONSACRÉS À UN USAGE D’HABITATION – 2) PORTÉE – OBLIGATION DE CONSTRUIRE PLUS DE 30 % DE LOGEMENTS LOCATIFS SOCIAUX – APPRÉCIATION – NOMBRE DE LOGEMENTS – EXISTENCE – PART DE CES LOGEMENTS DANS LA SURFACE DE L’IMMEUBLE – ABSENCE.

38-04 1) D’une part, un immeuble collectif est soumis à l’obligation prévue par le premier alinéa de l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme de compter une part de logements locatifs sociaux soit lorsqu’il comporte plus de douze logements, soit lorsqu’il consacre plus de 800 mètres carrés de surface de plancher à un usage d’habitation. ...2) D’autre part, lorsqu’un immeuble répond à l’un de ces critères, la proportion de 30 % de logements locatifs sociaux, prévue par les dispositions de cet article, s’applique au nombre de logements familiaux figurant dans le projet, sans considération de la part que représente leur surface au sein de la surface totale dédiée à l’habitation dans l’immeuble.

URBANISME ET AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE - RÈGLES GÉNÉRALES D'UTILISATION DU SOL - RÈGLES GÉNÉRALES DE L'URBANISME - RÈGLEMENT NATIONAL D'URBANISME - OBLIGATION DE MIXITÉ SOCIALE DES OPÉRATIONS DE CONSTRUCTION D’IMMEUBLES COLLECTIFS DANS LES COMMUNES FAISANT L’OBJET D’UN ARRÊTÉ DE CARENCE EN MATIÈRE DE LOGEMENT SOCIAL (ART - L - 111-24 DU CODE DE L’URBANISME) – 1) CHAMP – IMMEUBLES COMPORTANT PLUS DE DOUZE LOGEMENTS OU PLUS DE 800 M² DE SURFACE DE PLANCHER CONSACRÉS À UN USAGE D’HABITATION – 2) PORTÉE – OBLIGATION DE CONSTRUIRE PLUS DE 30 % DE LOGEMENTS LOCATIFS SOCIAUX – APPRÉCIATION – NOMBRE DE LOGEMENTS – EXISTENCE – PART DE CES LOGEMENTS DANS LA SURFACE DE L’IMMEUBLE – ABSENCE.

68-001-01-01 1) D’une part, un immeuble collectif est soumis à l’obligation prévue par le premier alinéa de l’article L. 111-24 du code de l’urbanisme de compter une part de logements locatifs sociaux soit lorsqu’il comporte plus de douze logements, soit lorsqu’il consacre plus de 800 mètres carrés de surface de plancher à un usage d’habitation. ...2) D’autre part, lorsqu’un immeuble répond à l’un de ces critères, la proportion de 30 % de logements locatifs sociaux, prévue par les dispositions de cet article, s’applique au nombre de logements familiaux figurant dans le projet, sans considération de la part que représente leur surface au sein de la surface totale dédiée à l’habitation dans l’immeuble.


Publications
Proposition de citation : CE, 11 fév. 2025, n° 491009
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyrille Beaufils
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS ; HAAS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:491009.20250211
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