Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 13 février et 25 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... D... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 18 octobre 2023 par laquelle le président de l'université Claude Bernard Lyon-I a proposé la nomination de Mme C... B... en qualité de professeure des universités au titre de la 87ème section du Conseil national des universités pour l'année 2023, ensemble le refus implicite opposé par la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche à son recours contre cette décision.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code général de la fonction publique ;
- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;
- le décret n° 2021-1722 du 20 décembre 2021 ;
- le décret n° 2023-172 du 9 mars 2023 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que l'université Claude Bernard Lyon-I a bénéficié, au titre de l'année 2023, en application d'un arrêté du 8 novembre 2022 de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, de l'ouverture de neuf postes de professeurs des universités pour promouvoir en interne neuf maîtres de conférences titulaires de l'habilitation à diriger des recherches, conformément aux dispositions du décret du 20 décembre 2021 créant une voie temporaire d'accès au corps des professeurs des universités et aux corps assimilés au titre des années 2021 à 2025. Par délibération du 23 mars 2023, son conseil d'administration a décidé d'ouvrir l'un de ces postes au sein des 86ème et 87ème sections du Conseil national des universités (CNU), qui relèvent du groupe des disciplines pharmaceutiques. M. D..., maître de conférences au sein de cette université et relevant de la 86ème section " Sciences du médicament et des autres produits de santé ", a postulé à cette promotion interne. Il demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 18 octobre 2023 par laquelle le président de l'université Claude Bernard Lyon-I n'a pas retenu sa candidature et a proposé la promotion de Mme C... B... en qualité de professeure des universités ainsi que du rejet implicite par la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche de son recours, formé par un courrier du 13 décembre 2023, contre cette décision.
2. Aux termes de l'article L. 523-1 du code général de la fonction publique : " Afin de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent, outre l'accès par concours interne, une proportion de postes qui peuvent être proposés aux fonctionnaires ou aux agents des organisations internationales intergouvernementales pour une nomination suivant l'une des modalités ci-après : / 1° Examen professionnel, donnant lieu à l'établissement d'une liste d'aptitude dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière ; / 2° Liste d'aptitude établie par appréciation de la valeur professionnelle et des acquis de l'expérience professionnelle des candidats. Sans renoncer à son pouvoir d'appréciation, l'autorité chargée d'établir la liste d'aptitude tient compte des lignes directrices de gestion prévues au chapitre III du titre Ier du livre IV. / Les statuts particuliers peuvent prévoir l'application de ces deux modalités, sous réserve qu'elles bénéficient à des candidats placés dans des situations différentes. "
3. Aux termes du I de l'article 4 du décret du 20 décembre 2021 créant une voie temporaire d'accès au corps des professeurs des universités et aux corps assimilés, dans sa rédaction issue du décret n° 2023-172 du 9 mars 2023 : " I. - Chaque année, le conseil d'administration de chaque établissement répartit, soit par section soit au niveau de deux sections d'un même groupe de disciplines, les possibilités de promotions arrêtées conformément aux dispositions de l'article 3 sur proposition du chef d'établissement et dans le respect des priorités nationales. / (...) ". S'agissant de la composition du comité de promotion chargé d'émettre des avis sur les candidatures, les deux premiers alinéas du II du même article disposent que " Chaque comité de promotion relatif à un ou plusieurs postes ouverts dans une ou deux sections d'un même groupe de disciplines est présidé par un professeur des universités ou un membre d'un corps assimilé. Il doit comprendre en sus à minima quatre membres du corps des professeurs des universités (...) dont au moins deux membres de chaque discipline pour laquelle une ou plusieurs candidatures ont été déclarées recevables. Le président et les membres du comité de promotion, qui peuvent être extérieurs à l'établissement, sont désignés par le conseil académique (...), en formation restreinte aux professeurs d'université (...). / La composition du comité de promotion est rendue publique avant le début de ses travaux ". L'avant-dernier alinéa de ce II énonce ensuite que " Chaque comité de promotion rend deux avis sur le dossier de chaque candidat. L'un des avis porte sur l'aptitude professionnelle et l'autre sur les acquis de leur expérience professionnelle en prenant en compte, dans chaque cas, à la fois leur investissement pédagogique, la qualité de leur activité scientifique et leur investissement dans des tâches d'intérêt collectif. Chacun des deux avis est soit très favorable, soit favorable, soit réservé ". Il est ensuite prévu, par les dispositions du III et du IV de cet article, que " Dans la limite de quatre candidats par emploi ouvert à cette voie d'accès par promotion interne, les candidats ayant reçu les avis les plus favorables par les instances consultatives mentionnées au troisième alinéa du I et au II du présent article sont entendus par le comité de promotion. / (...) A l'issue des auditions, le comité de promotion établit, pour chaque possibilité de promotion, les comptes rendus de chacune des auditions et les adresse au chef d'établissement, accompagnés de la liste classée par ordre alphabétique des candidats auditionnés. / L'audition a pour objet d'éclairer la décision du chef de l'établissement sur la motivation du candidat et sur son aptitude à exercer les missions et responsabilités dévolues aux membres du corps des professeurs des universités ou des corps assimilés. / Le chef de l'établissement établit la liste des candidats dont la nomination est proposée dans l'un des corps mentionnés à l'article 1er. / La nomination, prononcée par décret du Président de la République, prend effet au 1er septembre de l'année au titre de laquelle elle est prononcée ".
4. Il résulte des dispositions citées aux points 2 et 3 que dans le cadre de la procédure de promotion interne de maîtres de conférences dans le corps des professeurs des universités résultant du décret du 20 décembre 2021, tel que modifié par le décret du 9 mars 2023, d'une part, le Conseil national des universités, après avoir entendu deux rapporteurs, puis le comité de promotion, rendent chacun, successivement, deux avis sur le dossier des candidats, l'un sur leur aptitude professionnelle et l'autre sur les acquis de leur expérience professionnelle, en prenant en compte, pour chacun de ces avis, l'investissement pédagogique, la qualité de l'activité scientifique et l'investissement dans des tâches d'intérêt collectif, d'autre part, le comité de promotion, après avoir entendu les candidats ayant eu les avis les plus favorables - dans la limite de quatre -, afin d'éclairer leur motivation et leur aptitude à exercer les missions et responsabilités dévolues aux membres du corps des professeurs des universités, établit les comptes rendus de chacune des auditions et les adresse au chef d'établissement, accompagnés de la liste classée par ordre alphabétique des candidats auditionnés. Le chef d'établissement dresse ensuite la liste des candidats dont la nomination est proposée dans le corps des professeurs des universités, au vu de l'ensemble de ces éléments et en tenant compte, sans pour autant renoncer à son pouvoir d'appréciation, des principes et critères fixés par les lignes directrices de gestion édictées par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et par les autorités compétentes de l'université, le principe d'indépendance des enseignants-chercheurs s'opposant toutefois à ce qu'il use de ce pouvoir d'appréciation en se fondant sur des motifs étrangers à l'administration de l'université tels, en particulier, la qualification scientifique des candidats telle qu'évaluée par le Conseil national des universités et le comité de promotion. Enfin, la nomination intervient par décret du Président de la République.
Sur les décisions attaquées :
5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que, parmi les dix membres du comité de promotion constitué par le conseil académique de l'université Claude Bernard Lyon-I pour le recrutement par la voie de la promotion interne d'un professeur des universités au titre des 86ème et 87ème sections du CNU, étaient présents quatre professeurs des universités relevant de la 87ème section et trois professeurs des universités relevant de la 86ème section. La circonstance que le comité de promotion comprenait davantage de membres rattachés à la 87ème section n'est, par elle-même, pas de nature à établir un défaut d'impartialité du comité au détriment des candidats relevant de la 86ème section, le comité comprenant, d'ailleurs, également trois enseignants-chercheurs ne relevant d'aucune de ces deux sections. En outre, si M. D... soutient également que la composition du comité de promotion méconnaît les dispositions du II de l'article 4 du décret du 20 décembre 2021 citées au point 3 au motif qu'il ne comprenait aucun expert de la discipline " biochimie-biologie moléculaire " que pratique Mme B..., cette irrégularité, à la supposer avérée alors même que le comité comportait quatre spécialistes de disciplines relevant de la 87ème section à laquelle était rattachée l'intéressée, dont la parasitologie, la mycologie médicale et la microbiologie, ne pouvait, en tout état de cause, préjudicier qu'à Mme B... et est demeurée sans incidence sur la décision du président de l'université qui a proposé sa promotion. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que la composition de ce comité était irrégulière.
6. En deuxième lieu, l'université Claude Bernard Lyon-I indique, sans être contredite, que Mme B..., bien qu'enseignante au sein de la faculté d'odontologie de l'université, est rattachée à la 87ème section du CNU. Le moyen tiré de ce que sa candidature était irrecevable en ce qu'elle ne relevait pas de cette section manque donc en fait, peu important à cet égard la composante de l'établissement au sein de laquelle enseignait la candidate.
7. En troisième lieu, Mme B... ayant été promue professeure des universités au titre du groupe des disciplines pharmaceutiques, M. D... ne peut davantage utilement soutenir que la proposition de la nommer irait à l'encontre de l'objectif d'un ratio de 60 % de maîtres de conférences pour 40 % de professeurs des universités en ce que ce ratio serait déjà atteint pour les professeurs d'odontologie relevant des 56ème, 57ème et 58ème sections du CNU mais ne le serait pas pour les professeurs des disciplines pharmaceutiques.
8. En quatrième et dernier lieu, il résulte des dispositions du IV de l'article 4 du décret du 20 décembre 2021 citées au point 2 qu'à l'issue des auditions, si le président de l'université, pour établir la liste des candidats dont la nomination est proposée, tient notamment compte des avis consultatifs émis par le comité de promotion, il n'est pas lié par ces avis. Dès lors, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le président de l'université Claude Bernard Lyon-I aurait entaché d'illégalité sa décision de proposer la nomination de Mme B... au motif que le comité de promotion avait émis un avis très favorable sur son aptitude professionnelle à exercer les fonctions de professeur des universités et un avis favorable sur l'acquis de son expérience professionnelle.
9. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du président de l'université Claude Bernard Lyon-I qu'il attaque. Pour les mêmes motifs, il n'est pas davantage fondé à demander l'annulation de la décision implicite de la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche rejetant son recours.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... D... et à l'université Claude Bernard Lyon-I.
Copie en sera adressée à la ministre d'Etat, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.