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23/01/2025 | FRANCE | N°476688

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 23 janvier 2025, 476688


Vu la procédure suivante :



Par une requête sommaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 31 juillet et 30 octobre 2023 et le 21 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 mai 2023 du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion portant extension de l'avenant n° 1 du 24 mars 2023 à l'accord du 4 mai 2022 relatif à la mise en œuvre du dispositif " prévention et santé au travail " conclu dans le cadre d

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Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 31 juillet et 30 octobre 2023 et le 21 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A... B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 22 mai 2023 du ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion portant extension de l'avenant n° 1 du 24 mars 2023 à l'accord du 4 mai 2022 relatif à la mise en œuvre du dispositif " prévention et santé au travail " conclu dans le cadre de la convention collective nationale du 15 mars 2021 de la branche du secteur des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du travail ;

- la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, Rebeyrol, avocat de M. B... et à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la Fédération des particuliers employeurs de France (FEPEM) et autres ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 4625-3 du code du travail, créé par la loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail : " Les particuliers employeurs adhèrent, moyennant une contribution dont le montant est fixé par accord collectif de branche étendu, à un service de prévention et de santé au travail. / L'association paritaire mentionnée au second alinéa de l'article L. 133-7 du code de la sécurité sociale est chargée, au nom et pour le compte des particuliers employeurs, d'organiser la mise en œuvre de la prévention des risques professionnels et de la surveillance médicale des salariés et de désigner le ou les services de prévention et de santé au travail chargés, dans le cadre de conventions conclues avec l'association paritaire, du suivi des salariés sur les territoires. / Elle délègue par voie de convention aux organismes de recouvrement mentionnés au même second alinéa la collecte de la contribution mentionnée au premier alinéa du présent article et le recueil des données, auprès des employeurs et de leurs salariés, nécessaires à la mise en œuvre du deuxième alinéa. " En application de cet article, les organisations syndicales représentatives d'employeurs et de salariés de la branche des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile ont conclu, le 4 mai 2022, dans le cadre de la convention collective nationale du 15 mars 2021 de la branche du secteur des particuliers employeurs et de l'emploi à domicile, un accord relatif à la mise en œuvre du dispositif " prévention et santé au travail " étendu par un arrêté du 18 juillet 2022 du ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion. Par un avenant n° 1 du 24 mars 2023 à l'accord du 4 mai 2022, étendu par un arrêté du 22 mai 2023 du même ministre, dont M. B... demande l'annulation pour excès de pouvoir, ont été modifiées les caractéristiques et modalités de calcul de la contribution " santé au travail " due, à compter du 1er janvier 2024, par le particulier employeur pour couvrir les frais liés à la mise en œuvre du suivi individuel de l'état de santé des salariés de particuliers employeurs et de la prévention de leurs risques professionnels.

2. En premier lieu, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué n'aurait pas été signé par le directeur général du travail manque en fait.

3. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que l'avis de la Commission nationale de la négociation collective, de l'emploi et de la formation professionnelle sur la demande d'extension de l'avenant litigieux aurait été rendu en violation des règles édictées à l'article R. 2272-8 du code du travail, qui n'est pas assorti des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé, ne peut qu'être écarté.

4. En troisième lieu, le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un comme l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des motifs susceptibles de la justifier.

5. Il ressort des pièces du dossier qu'en application de l'article 3.2 de l'accord du 4 mai 2022 relatif à la mise en œuvre du dispositif " prévention et santé au travail ", la contribution " santé au travail ", exigible à compter du 1er janvier 2024, était " mise à la charge de chaque particulier employeur pour les mois au titre desquels une rémunération est versée à un ou plusieurs salariés de particuliers employeurs " et " due une seule fois quels que soient le nombre de salariés employés par le particulier employeur et le volume d'heures travaillés dans le mois ". Son montant était fixé forfaitairement à 3,20 euros par mois. Aux termes de cet article 3.2 tel que modifié par l'avenant litigieux du 24 mars 2023, la contribution, dont le montant et la date d'entrée en vigueur étaient alors demeurés inchangés avant d'être par la suite modifiés par l'avenant n° 2 du 29 février 2024 à l'accord du 4 mai 2022, étendu par un arrêté du 24 septembre 2024 de la ministre du travail et de l'emploi, était " à la charge du particulier employeur au titre de l'emploi de chaque salarié (...) [et] due une seule fois par salarié, pour chaque mois travaillé quel que soit le nombre de contrats de travail qui le lient au particulier employeur et le volume d'heures travaillées dans le mois ".

6. M. B... soutient que cette modification des modalités de calcul de la contribution " santé au travail " instaure une rupture d'égalité, d'une part, entre particuliers employeurs selon qu'ils emploient un salarié pour un faible volume d'heures travaillées ou pour une quotité de travail beaucoup plus importante, et, d'autre part, entre salariés selon qu'ils sont employés par un ou plusieurs employeurs, en ce qu'elle a pour effet de renchérir, pour l'employeur, le coût horaire de l'emploi de salariés à temps partiel assurant un faible nombre d'heures travaillées de façon plus significative que celui de l'emploi de salariés astreints à une quotité de travail bien supérieure. Toutefois, cette contribution, qui est la même pour tous les particuliers employeurs au titre de l'emploi de chaque salarié, sans distinction selon la quotité de travail réalisée par les salariés employés, n'instaure, par elle-même, aucune différence de traitement ni entre les particuliers employeurs ni entre leurs salariés. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe d'égalité ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêté qu'il attaque.

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la Fédération des particuliers employeurs de France et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... une somme de 500 euros à verser à chacun des syndicats et organismes professionnels défendeurs au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : M. B... versera à la Fédération des particuliers employeurs de France (FEPEM), à la Fédération des services CFDT (FS-CFDT), à la Fédération CGT du commerce, des services et de la distribution (CGT-CSD), à la Confédération des salariés du particulier employeur, assistants familiaux et assistants maternels (CSAFAM), la Fédération générale des travailleurs de l'agriculture, de l'alimentation, des tabacs et des activités annexes FO (FGTA-FO), au Syndicat professionnel des assistants maternels et assistants familiaux (SPAMAF) et à l'Union nationale des syndicats autonomes Fédération des syndicats de services, activités diverses, tertiaires et connexe (UNSA-FESSAD) une somme de 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et à la Fédération des particuliers employeurs de France, première dénommée pour l'ensemble des défendeurs.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 476688
Date de la décision : 23/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 jan. 2025, n° 476688
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Julien Fradel
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon
Avocat(s) : SCP GATINEAU, FATTACCINI, REBEYROL ; SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 26/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:476688.20250123
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