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27/12/2024 | FRANCE | N°490327

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 27 décembre 2024, 490327


Vu les procédures suivantes :



1° Sous le n° 490327, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2023 et 18 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 octobre 2023 par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens, statuant sur le recours de Mme B... A... contre sa décision du 24 juillet 2023 lui refusant son in

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Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 490327, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 20 décembre 2023 et 18 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 2 octobre 2023 par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens, statuant sur le recours de Mme B... A... contre sa décision du 24 juillet 2023 lui refusant son inscription au tableau de la section D de l'ordre national des pharmaciens, a considéré que l'intéressée remplissait la condition de moralité requise et ordonné une mesure d'expertise afin de déterminer si elle remplissait les conditions de compétence professionnelle ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des pharmaciens la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 492842, par une requête sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 22 mars et 24 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 janvier 2024 par laquelle le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a inscrit Mme A... au tableau de la section D de l'ordre des pharmaciens pour exercer en qualité de pharmacienne adjointe d'officine ;

2°) de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des pharmaciens et de Mme A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Carole Hentzgen, auditrice,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Richard, avocat du conseil central de la section D de l'ordre national des Pharmaciens et à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat du Conseil national de l'ordre des pharmaciens ;

Considérant ce qui suit :

1. En vertu de l'article L. 4232-1 du code de la santé publique, la section D de l'ordre national des pharmaciens regroupe notamment les pharmaciens adjoints exerçant en officine. Aux termes des dispositions de l'article L. 4221-1 du même code : " Nul ne peut exercer la profession de pharmacien s'il n'offre toutes garanties de moralité professionnelle et s'il ne réunit les conditions suivantes : (...) / 3° Être inscrit à l'ordre des pharmaciens. " Aux termes de l'article L. 4222-4 du même code : " Après avoir examiné les titres et qualités du demandeur, le conseil régional de la section A ou le conseil central de la section B, C, D, E, G ou H de l'ordre soit accorde l'inscription au tableau, soit, si les garanties de compétence, de moralité et d'indépendance professionnelle ou les conditions prévues par la loi ne sont pas remplies, la refuse par décision motivée écrite (...) ". Aux termes du II de l'article R. 4222-4-1 du code de la santé publique : " En cas de doute sérieux sur la compétence professionnelle du demandeur, le conseil régional ou central compétent ordonne une expertise par une décision non susceptible de recours. "

2. Il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 24 juillet 2023, le conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens a refusé l'inscription de Mme A..., titulaire d'un diplôme d'Etat de docteur en pharmacie depuis 1988, au tableau de cette section, au motif qu'elle ne remplissait pas la condition de moralité requise pour l'exercice de la profession à raison d'un exercice illégal de la pharmacie pendant trente-cinq ans. Par une décision du 2 octobre 2023, le Conseil national de l'ordre des pharmaciens, saisi d'un recours administratif formé par Mme A... à l'encontre de cette décision, a estimé que l'intéressée remplissait la condition de moralité, et ordonné une expertise afin de s'assurer de sa compétence professionnelle. Puis, par une décision du 22 janvier 2024, le Conseil national a inscrit l'intéressée au tableau de l'ordre de la section D. Le conseil central de la section D demande l'annulation pour excès de pouvoir de ces deux décisions par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre pour statuer par une même décision.

3. La décision du 2 octobre 2023, qui ne se borne pas à ordonner une expertise mais infirme la position du conseil central de la section D sur la condition de moralité professionnelle de l'intéressée, constitue une mesure préparatoire de la décision du 22 janvier 2024 prononçant son inscription au tableau qui peut être contestée à l'occasion d'un recours pour excès de pouvoir formé contre cette dernière décision. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par le Conseil national de l'ordre des pharmaciens aux conclusions tendant à l'annulation de cette décision, tirée de ce qu'elle ne ferait pas grief au conseil requérant, doit être écartée.

4. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que Mme A... a exercé pendant trente-cinq années en tant que pharmacienne adjointe sans jamais être inscrite au tableau de l'ordre, alors qu'elle ne pouvait raisonnablement penser, comme elle le soutient, que son employeur s'était chargé d'effectuer les démarches nécessaires, et ne s'est jamais étonnée de ne pas payer sa cotisation ordinale. En retenant que, malgré cette très longue durée d'exercice irrégulier de la profession de pharmacien, l'intéressée pouvait être regardée comme remplissant la condition de moralité professionnelle, le Conseil national de l'ordre des pharmaciens a fait une application erronée des dispositions de l'article L. 4221-1 rappelées au point 1. Il suit de là que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de ses requêtes, le conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens est fondé à demander l'annulation des décisions qu'il attaque.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du Conseil national de l'ordre des pharmaciens la somme de 3 000 euros à verser au conseil central de la section D au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les décisions du 2 octobre 2023 et du 22 janvier 2024 du Conseil national de l'ordre des pharmaciens sont annulées.

Article 2 : Le Conseil national de l'ordre des pharmaciens versera au conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au conseil central de la section D de l'ordre national des pharmaciens, au Conseil national de l'ordre des pharmaciens et à Mme B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 17 décembre 2024 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat et Mme Carole Hentzgen, auditrice-rapporteure.

Rendu le 27 décembre 2024.

Le président :

Signé : M. Alain Seban

La rapporteure :

Signé : Mme Carole Hentzgen

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Pilet


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 490327
Date de la décision : 27/12/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 27 déc. 2024, n° 490327
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Carole Hentzgen
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron
Avocat(s) : SCP RICHARD ; SCP CELICE, TEXIDOR, PERIER

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:490327.20241227
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