Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision implicite du 11 septembre 2023 par laquelle le ministre de l'intérieur et des outre-mer a rejeté sa demande de reconstitution de quatre points au capital de points de son permis de conduire à la suite d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière qu'il a effectué les 21 et 22 avril 2023, et d'enjoindre à l'administration de reconstituer ces quatre points sur son capital. Par un jugement n° 2303394 du 15 mai 2024, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé cette décision implicite de rejet et, en conséquence, enjoint à l'administration de reconstituer quatre points au capital de points du permis de conduire de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Par un pourvoi enregistré le 18 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... a demandé le 11 juillet 2023 au ministre de l'intérieur et des outre-mer de procéder à la reconstitution de quatre points sur le capital de points affecté à son permis de conduire à la suite d'un stage de sensibilisation à la sécurité routière qu'il a effectué les 21 et 22 avril 2023. M. B... a saisi le tribunal administratif de Nîmes d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle ce ministre a rejeté sa demande et à ce qu'il soit enjoint à l'administration de reconstituer ces quatre points sur le capital de points affectés à son permis. Par un jugement du 15 mai 2024, contre lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif a annulé cette décision implicite de rejet et enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de reconstituer quatre points au capital de points du permis de conduire de l'intéressé dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce jugement.
2. Aux termes du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 du code de la route : " Le titulaire du permis de conduire qui a commis une infraction ayant donné lieu à retrait de points peut obtenir une récupération de points s'il suit un stage de sensibilisation à la sécurité routière qui peut être effectué dans la limite d'une fois par an. (...) " Aux termes de l'article R. 223-8 du même code : " I.- Le titulaire de l'agrément prévu au II de l'article R. 213-2 délivre une attestation de stage à toute personne qui a suivi un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans le respect de conditions d'assiduité et de participation fixées par arrêté du ministre chargé de la sécurité routière. Il transmet un exemplaire de cette attestation au préfet du département du lieu du stage, dans un délai de quinze jours à compter de la fin de celui-ci. II.-L'attestation délivrée à l'issue du stage effectué en application des dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 donne droit à la récupération de quatre points dans la limite du plafond affecté au permis de conduire de son titulaire. III.- Le préfet mentionné au I ci-dessus procède à la reconstitution du nombre de points dans un délai d'un mois à compter de la réception de l'attestation et notifie cette reconstitution à l'intéressé par lettre simple. La reconstitution prend effet le lendemain de la dernière journée de stage. (...) " Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de rejeter toute demande de reconstitution de points acquis à la suite d'un stage de sensibilisation lorsque le conducteur a reçu, avant le dernier jour du stage, régulièrement notification d'une décision du ministre de l'intérieur l'informant que son permis de conduire a perdu sa validité par suite de l'épuisement de son capital de points.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond, et notamment du relevé intégral des informations relatives au permis de conduire de M. B..., que celui-ci a déposé le 11 août 2020 une requête par laquelle il demandait notamment au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision référencée " 48 SI " par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nul, que ce tribunal administratif a rejeté ces conclusions comme tardives par un jugement du 28 juillet 2022 devenu définitif au motif que la décision référencée " 48 SI " lui avait été notifiée le 19 avril 2019, et que l'intéressé avait restitué son titre de conduite au préfet de la Lozère le 2 mai 2023. Il suit de là qu'en jugeant, pour annuler la décision implicite de rejet opposée à la demande de reconstitution de points déposée le 11 juillet 2023 par M. B..., que la décision " 48 SI " constatant l'invalidité du permis de conduire de l'intéressé ne pouvait être regardée comme lui ayant été régulièrement notifiée à la date du 16 avril 2019, que celui-ci était dès lors resté titulaire d'un permis de conduire et qu'il était ainsi en droit, à l'issue du stage de sensibilisation qu'il a suivi les 22 et 23 avril 2023, d'obtenir la récupération de quatre points sur le capital de points affectés à son permis de conduire, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a commis une erreur de droit et dénaturé les faits et pièces du dossier. Par suite, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à demander l'annulation de son jugement.
4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond, en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative
5. Il résulte de ce qui est dit au point 3 que M. B... n'était plus titulaire du permis de conduire lorsqu'il a suivi un stage de sensibilisation à la sécurité routière les 21 et 22 avril 2023. Les dispositions du quatrième alinéa de l'article L. 223-6 du code de la route citées au point 2 faisaient ainsi obstacle à ce qu'il bénéficie d'une reconstitution de points. Il suit de là que les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision implicite du 11 septembre 2023 par laquelle le préfet de la Lozère, auquel le ministre de l'intérieur et des outre-mer doit être regardé comme ayant transmis la demande de reconstitution de points de l'intéressé en application de l'article L. 114-2 du code des relations entre le public et l'administration, a rejeté sa demande de reconstitution de quatre points au capital de points affectés à son permis de conduire ne peuvent qu'être rejetées, ainsi que ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 15 mai 2024 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Nîmes est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. A... B....
Délibéré à l'issue de la séance du 21 novembre 2024 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 20 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
Le rapporteur :
Signé : M. Christophe Barthélemy
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Pilet