Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les décisions référencées " 48 " par lesquelles le ministre de l'intérieur a retiré des points sur son permis de conduire à la suite des infractions qu'il a commises les 27 septembre, 13 octobre et 14 décembre 2018, 13 avril 2019, 30 janvier et 8 juin 2021. Par un jugement n° 2208580 du 27 février 2024, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a annulé ces décisions.
Par un pourvoi enregistré le 18 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il annule la décision référencée " 48 " de retrait de trois points consécutive à l'infraction commise par M. A... le 30 janvier 2021 ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A... tendant à l'annulation de cette décision.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de procédure pénale ;
- le code de la route ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il résulte des dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route que l'administration ne peut légalement prendre une décision retirant des points affectés à un permis de conduire à la suite d'une infraction dont la réalité a été établie que si l'auteur de l'infraction s'est vu préalablement délivrer par elle un document contenant les informations prévues à ces articles, lesquelles constituent une garantie essentielle en ce qu'elles mettent l'intéressé en mesure de contester la réalité de l'infraction et d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis. Aux termes de l'article 529-2 du code de procédure pénale, dans sa rédaction alors en vigueur : " Dans le délai prévu par l'article précédent, le contrevenant doit s'acquitter du montant de l'amende forfaitaire, à moins qu'il ne formule dans le même délai une requête tendant à son exonération auprès du service indiqué dans l'avis de contravention. Dans les cas prévus par l'article 529-10, cette requête doit être accompagnée de l'un des documents exigés par cet article. Cette requête est transmise au ministère public. / A défaut de paiement ou d'une requête présentée dans le délai de trente jours, l'amende forfaitaire est majorée de plein droit et recouvrée au profit du Trésor public en vertu d'un titre rendu exécutoire par le ministère public. "
2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond qu'à la suite d'une infraction au code de la route relevée le 30 janvier 2021 par procès-verbal électronique, le ministre de l'intérieur a retiré trois points du capital de points affecté au permis de conduire de M. A.... Par le jugement du 27 février 2024 contre lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation, la magistrate désignée du tribunal administratif de Paris a annulé cette décision au motif que, faute de signature du conducteur sur le procès-verbal électronique et de mention d'un refus de signer apposée par l'agent verbalisateur, ainsi que de paiement de l'amende forfaitaire majorée, le ministre n'apportait pas la preuve qui lui incombe de la délivrance à l'intéressé, préalablement à ce retrait de points, de l'information prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route.
3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, dans le cadre de sa défense devant le tribunal administratif, le ministre de l'intérieur a fait valoir que l'infraction du 30 janvier 2021 a été constatée par procès-verbal électronique, qu'un avis de contravention a été adressé au titulaire du certificat d'immatriculation du véhicule et que ce dernier a formulé, sur papier libre, la requête en exonération prévue par l'article 529-2 du code de procédure pénale, ce qui suffit à établir qu'il avait préalablement reçu l'avis de contravention. Pour justifier de ces circonstances, le ministre de l'intérieur a produit la transcription du procès-verbal d'infraction et un document intitulé " dossier transmis à Monsieur l'officier du ministère public " près le tribunal de police de Paris, faisant apparaître que la requête en exonération de M. A... a été reçue le 16 juin 2021 par le service indiqué sur l'avis de contravention et précisant que cette requête a été envoyée par lettre recommandée avec avis de réception. Le ministre a soutenu que ces circonstances étaient de nature à établir que M. A... avait nécessairement reçu l'avis de contravention et devait dès lors être regardé comme ayant bénéficié de l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route dont ce document est assorti, à défaut pour l'intéressé de soutenir qu'il aurait reçu un avis incorrect ou incomplet. En réplique, M. A... s'est borné à soutenir que le document intitulé " dossier transmis à Monsieur l'officier du ministère public " ne lui a pas été transmis et n'a aucune force probante, qu'il n'a reçu aucun courrier de l'administration et qu'il n'a formulé aucune requête. Dans ces conditions, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à soutenir qu'en jugeant qu'il n'apportait pas la preuve que M. A... avait reçu l'avis de contravention en litige et pris connaissance des informations que ce document comporte, la magistrate désignée du tribunal administratif de Paris a dénaturé les pièces du dossier.
4. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris en tant qu'il annule la décision de retrait de trois points consécutive à l'infraction commise par M. A... le 30 janvier 2021.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler, dans cette mesure, l'affaire au fond, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.
6. Il résulte de ce qui est dit au point 3 que l'infraction du 30 janvier 2021 a été constatée par procès-verbal électronique et que le ministre de l'intérieur a produit devant le tribunal administratif de Paris des éléments suffisants pour établir que l'intéressé a bénéficié de l'information prévue par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route préalablement à la décision retirant trois points du capital de points de son permis de conduire.
7. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de la demande de M. A... tendant à l'annulation de la décision référencée " 48 " de retrait de trois points du capital de points de son permis de conduire à la suite de l'infraction au code de la route qu'il a commise le 30 janvier 2021 doivent être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 27 février 2024 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il annule la décision référencée " 48 " de retrait de trois points consécutive à l'infraction commise par M. A... le 30 janvier 2021.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation de la décision référencée " 48 " de retrait de trois points consécutive à l'infraction commise le 30 janvier 2021 sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et à M. B... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 21 novembre 2024 où siégeaient : M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre, présidant ; Mme Laurence Helmlinger, conseillère d'Etat et M. Christophe Barthélemy, conseiller d'Etat en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 20 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Jean-Philippe Mochon
Le rapporteur :
Signé : M. Christophe Barthélemy
La secrétaire :
Signé : Mme Nathalie Pilet