Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 31 mai et 26 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société par actions simplifiée (SAS) Eni Energy International demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir les commentaires administratifs publiés le 3 avril 2024 au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - Impôts sous la référence BOI-IS-BASE-20-20-10-20 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Alianore Descours, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Romain Victor, rapporteur public ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 25 novembre 2024, présentée par la société Eni Energy International ;
Considérant ce qui suit :
1. La société Eni Energy International demande l'annulation pour excès de pouvoir des commentaires administratifs publiés le 3 avril 2024 au Bulletin officiel des finances publiques (BOFiP) - Impôts sous la référence BOI-IS-BASE-20-20-10-20 relatifs aux modalités d'assujettissement à l'impôt sur les sociétés des plus-values à long terme sur cession de titres de participation. Eu égard au moyen qu'elle soulève, la requête doit être regardée comme étant dirigée contre le paragraphe 30 de ces commentaires.
2. D'une part, aux termes de l'article 209 du code général des impôts : " I. (...) les bénéfices passibles de l'impôt sur les sociétés sont déterminés d'après les règles fixées par les articles 34 à 45 (...) ". Aux termes du seizième alinéa du 5° du 1 de l'article 39 du même code : " (...) la provision pour dépréciation qui résulte éventuellement de l'estimation du portefeuille est soumise au régime fiscal des moins-values à long terme (...) ; si elle devient ultérieurement sans objet, elle est comprise dans les plus-values à long terme de l'exercice (...) ".
3. D'autre part, aux termes du I de l'article 219 du code général des impôts : " I.- (...) / Le taux normal de l'impôt est fixé à 25 %. / Toutefois : / a. Le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 15 %. (...) " Aux termes du a quinquies du même I : " Pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2006, le montant net des plus-values à long terme afférentes à des titres de participation fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 8 %. Ce taux est fixé à 0 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2007. / Une quote-part de frais et charges égale à 12 % du montant brut des plus-values de cession est prise en compte pour la détermination du résultat imposable (...) ".
4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires qui ont précédé l'adoption du a quinquies du I de l'article 219 du code général des impôts, que la réintégration de la quote-part de frais et charges égale à 12 % du montant brut des plus-values de cession de titres de participation est subordonnée à la réalisation par l'entreprise, au cours de l'exercice de cession, d'une plus-value nette, laquelle s'entend d'un excédent des plus-values à long terme afférentes à de tels titres sur les moins-values de même nature, et que doivent être notamment prises en compte, pour apprécier l'existence d'une plus-value nette, non seulement les plus-values et moins-values réalisées à l'occasion de la cession de titres de participation, mais aussi celles qui résultent respectivement des reprises et dotations de provisions pour dépréciation de tels titres constatées au cours du même exercice.
5. Par suite, le paragraphe n° 30 des commentaires attaqués, qui énonce que : " Les entreprises procèdent à la compensation des plus et moins-values à long terme relevant du taux de 0 % réalisées au cours du même exercice. / Toutes les plus et moins-values à long terme imposables à 0 % doivent faire l'objet de cette compensation, c'est-à-dire les plus ou moins-values à long terme afférentes aux cessions des titres de participation éligibles, y compris les plus ou moins-values à long terme antérieurement en report ou en sursis qui deviennent imposables au titre de l'exercice considéré ou celles provenant de l'annulation d'une cession, d'un complément ou d'une réduction de prix et les plus ou moins-values à long terme constatées à l'occasion des reprises et dotations de provisions pour dépréciation afférentes aux mêmes titres ", n'ajoute pas à la loi. Il en résulte que la société requérante n'est pas fondée à en demander l'annulation.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la société Eni Energy International est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société par actions simplifiée Eni Energy International, au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et au ministre auprès du Premier ministre, chargé du budget et des comptes publics.
Délibéré à l'issue de la séance du 25 novembre 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; M. Jonathan Bosredon, M. Philippe Ranquet, Mme Sylvie Pellissier, Mme Emilie Bokdam-Tognetti, M. Pierre Boussaroque, conseillers d'Etat et Mme Alianore Descours, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 19 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
La rapporteure :
Signé : Mme Alianore Descours
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaulle