Vu la procédure suivante :
M. H... G..., M. B... D..., M. J... I... et Mme L... épouse I..., M. O... E... et Mme N... F... épouse E..., M. M... A... et M. K... C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 10 mai 2022 par lequel le maire de Villennes-sur-Seine a délivré à la société anonyme HLM immobilière 3F un permis de construire portant sur un changement de destination ainsi que des travaux de modification d'un bâtiment existant en vue de créer douze logements, l'arrêté du 17 février 2023 par lequel le maire de Villennes-sur-Seine a délivré à la société HLM immobilière 3F un permis de construire modificatif, ainsi que les décisions implicites rejetant leurs recours gracieux. Par un jugement n° 2208222 du 9 novembre 2023, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 janvier, 8 avril et 14 novembre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. G..., M. D..., M. et Mme I..., M. et Mme E..., M. A... et M. C... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de la commune de Villennes-sur-Seine et de la société HLM immobilière 3F la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Anne Redondo, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Thomas Janicot, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Guérin, Gougeon, avocat de M. G... et autres et à la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société HLM immobilière 3F ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 10 mai 2022, le maire de Villennes-sur-Seine a délivré à la société HLM immobilière 3F un permis de construire portant sur un changement de destination ainsi que des travaux de modification d'un bâtiment existant en vue de créer douze logements. Après que M. G... et autres ont demandé au tribunal administratif de Versailles l'annulation de cet arrêté, le maire de Villennes-sur-Seine, par un arrêté du 17 février 2023, a délivré à la société HLM immobilière 3F un permis de construire modificatif. M. G... et autres se pourvoient en cassation contre le jugement du 9 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de ces deux arrêtés ainsi que du rejet de leurs recours gracieux.
2. Lorsqu'un permis de construire initial a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises. Les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial. Toutefois, lorsqu'un permis de construire a été obtenu par fraude, l'illégalité qui en résulte n'est pas de nature à être régularisée par la délivrance d'un permis de construire modificatif. Il s'ensuit qu'une telle illégalité peut être utilement invoquée à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial alors même qu'un permis modificatif aurait été délivré.
3. Il résulte de ce qui précède qu'en se fondant, pour écarter comme inopérant le moyen tiré de ce que la société HLM immobilière 3F avait présenté de manière intentionnelle des informations erronées sur le terrain d'assiette du projet dans son dossier de demande de permis de construire, de nature selon les requérants à tromper l'administration sur la réalité du projet, et de ce que le permis de construire litigieux aurait ainsi été obtenu par fraude, sur la circonstance que le dossier de permis de construire modificatif avait modifié la demande sur ce point, le tribunal administratif de Versailles a commis une erreur de droit.
4. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. G... et autres sont fondés à demander pour ce motif l'annulation du jugement qu'ils attaquent.
5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Villennes-sur-Seine, d'une part, et de la société HLM immobilière 3F, d'autre part, le versement chacune d'une somme globale de 1 500 euros à M. G... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. G... et autres, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante, une somme au titre des mêmes dispositions.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du 9 novembre 2023 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Versailles.
Article 3 : La commune de Villennes-sur-Seine versera une somme globale de 1 500 euros à M. G... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : La société HLM Immobilière 3F versera une somme globale de 1 500 euros à M. G... et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions de la société HLM immobilière 3F présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 6 : La présente décision sera notifiée à M. H... G..., représentant unique désigné, pour l'ensemble des requérants, à la commune de Villennes-sur-Seine et à la société anonyme HLM immobilière 3F.
Délibéré à l'issue de la séance du 29 novembre 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Edouard Geffray, Mme Marie-Astrid Nicolazo de Barmon et M. Jean-Dominique Langlais conseillers d'Etat ; Mme Catherine Brouard Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et Mme Anne Redondo, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 18 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
La rapporteure :
Signé : Mme Anne Redondo
La secrétaire :
Signé : Mme Paule Troly