Vu la procédure suivante :
M. D... B... et Mme A... C... épouse B..., agissant en leur nom personnel et au nom de leur enfant mineur, E... B..., ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a refusé de leur communiquer l'entier dossier médical et administratif de leur enfant et d'enjoindre à l'OFII de lui communiquer les pièces sollicitées. Par un jugement n° 2000577 du 8 décembre 2022, le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique enregistrés les 19 juin et 19 septembre 2023 et le 18 octobre 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme B... demandent au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Jean de L'Hermite, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de M.et Mme B... et à la SCP Poupet et Kacenelenbogen, avocat de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, par un courrier en date du 5 juillet 2019, M. et Mme B..., parents d'un enfant mineur dont l'état de santé nécessitait une prise en charge médicale, ont demandé au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) la communication de l'ensemble des documents relatifs à la procédure d'instruction de leur demande de titre de séjour, notamment des extraits de l'application Thémis utilisée par l'OFII. L'OFII leur a communiqué l'avis du collège médical et le rapport médical. M. et Mme B... se pourvoient en cassation contre le jugement du 8 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté leur demande d'annulation du refus de communication des données de connexion des membres du collège appelés à émettre un avis sur la santé de leur enfant.
2. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 300-2 du code des relations entre le public et l'administration, " Sont considérés comme documents administratifs, au sens des titres I, III et IV du présent livre, quels que soient leur date, leur lieu de conservation, leur forme et leur support, les documents produits ou reçus, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle mission. Constituent de tels documents notamment les dossiers, rapport études, comptes rendus, procès-verbaux, statistiques, instructions, circulaires, notes et réponses ministérielles, correspondances, avis, prévisions, " code sources " et décisions ".
3. Ces dispositions n'ont pas pour effet d'imposer à l'administration d'élaborer un document dont elle ne disposerait pas pour faire droit à une demande de communication. En revanche, constituent des documents administratifs au sens de ces dispositions les documents qui peuvent être établis par extraction des bases de données dont l'administration dispose, si cela ne fait pas peser sur elle une charge de travail déraisonnable, notamment en l'obligeant soit à modifier l'organisation d'une base de données, soit à développer des outils de recherche, ou à modifier ceux actuellement à sa disposition, pour l'extraction des informations demandées.
4. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que le tribunal administratif de Limoges a estimé que la demande de communication des informations relatives au déroulement et à la chronologie de la connexion des membres du collège de médecins de l'OFII à l'application Thémis ne pouvait pas être regardée comme portant sur un document administratif. En statuant ainsi, sans rechercher si le document demandé pouvait être établi par simple extraction des bases de données dont disposait l'administration sans avoir à modifier l'organisation de celles-ci, le tribunal administratif a entaché son jugement d'erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leur pourvoi, que M. et Mme B... sont fondés à demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 8 décembre 2022 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Limoges.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. D... B... et Mme A... C... épouse B... et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.
Délibéré à l'issue de la séance du 24 octobre 2024 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; M. Renaud Vedel, conseiller d'Etat et M. Jean de L'Hermite, conseiller d'Etat-rapporteur
Rendu le 13 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Bertrand Dacosta
Le rapporteur :
Signé : M. Jean de L'Hermite
La secrétaire :
Signé : Mme Marie-Léandre Monnerville