Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir la délibération du 18 novembre 2019 par laquelle le conseil municipal de Blauvac (Vaucluse) a approuvé le plan local d'urbanisme de cette commune et en particulier les articles A.T1.1 et A.T1.2 du règlement applicable au secteur agricole " At ". Par un jugement n° 2000504 du 9 mars 2021, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.
Par un arrêt n° 21TL01822 du 15 juin 2023, la cour administrative d'appel de Toulouse a, sur appel de M. A..., annulé la délibération du conseil municipal de Blauvac du 18 novembre 2019 en tant, d'une part, que le secteur de taille et de capacité d'accueil limitées " At " n'inclut pas la partie est du camping existant et, d'autre part, que les articles A.T1.1 et A.T1.2 du règlement du plan local d'urbanisme interdisent l'installation des résidences mobiles de loisirs et habitations légères de loisirs au sein de ce secteur et réformé le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 9 mars 2021 en ce qu'il avait de contraire.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 18 août et 8 novembre 2023 et le 10 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Blauvac demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de M. B... A... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de l'urbanisme.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Pierre Boussaroque, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet François Pinet, avocat de la commune de Blauvac et à la SCP Gury, Maître, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 151-8 du code de l'urbanisme, le règlement du plan local d'urbanisme " fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durables, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés aux articles L. 101-1 à L. 101-3. ". Et, aux termes de l'article L. 151-13 du même code : " Le règlement peut, à titre exceptionnel, délimiter dans les zones naturelles, agricoles ou forestières des secteurs de taille et de capacité d'accueil limitées dans lesquels peuvent être autorisés : / 1° Des constructions ; (...) 3° Des résidences démontables constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs. / Il précise les conditions de hauteur, d'implantation et de densité des constructions, permettant d'assurer leur insertion dans l'environnement et leur compatibilité avec le maintien du caractère naturel, agricole ou forestier de la zone. / Il fixe les conditions relatives aux raccordements aux réseaux publics, ainsi que les conditions relatives à l'hygiène et à la sécurité auxquelles les constructions, les résidences démontables ou les résidences mobiles doivent satisfaire. / Ces secteurs sont délimités après avis de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers prévue à l'article L. 112-1-1 du code rural et de la pêche maritime. (...) ".
2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de Blauvac a institué, au sein de la zone agricole bordant le hameau de Saint-Estève, un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées " At ", d'une superficie de 1,26 hectare, incluant la partie ouest du terrain sur lequel se trouvent les quinze emplacements de l'aire naturelle de camping que M. A... exploite, et que les articles A.T1.1 et A.T1.2 du règlement du plan local d'urbanisme adopté le 18 novembre 2019, qui définissent les règles applicables à ce secteur de taille et de capacité d'accueil limitées, y autorisent les terrains de camping comportant des emplacements de tentes, de caravanes et de camping-cars, tels que ceux exploités par M. A..., mais y interdisent les résidences mobiles et les habitations légères de loisirs.
3. Pour juger que la commune de Blauvac avait commis une erreur d'appréciation présentant un caractère manifeste en n'intégrant pas dans le secteur de taille et de capacité d'accueil limitées " At " qu'elle a créé l'intégralité du terrain sur lequel s'implante le camping exploité par M. A... et en soumettant la partie de ce terrain incluse dans ce secteur à des règles s'opposant à l'installation de résidence mobiles et d'habitations légères de loisirs, la cour s'est fondée, d'une part, sur le fait que le plan d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme comportait un objectif de développement du tourisme vert, supposant de conforter les deux campings existants, avec lequel ce découpage et ces règles n'étaient pas cohérents et, d'autre part, sur le fait que le secteur de taille et de capacité d'accueil limitées ainsi créé jouxtait le hameau de Saint-Estève, seul classé en zone urbaine par le plan local d'urbanisme en dehors du centre village et dont le nord est identifié comme zone à urbaniser. En se déterminant ainsi alors que la création d'un secteur de taille et de capacité d'accueil limitées au sein d'un espace naturel ou agricole présente, selon les termes de l'article L. 151-13 du code de l'urbanisme rappelés au point 1, un caractère exceptionnel, la cour a commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis et les faits de l'espèce.
4. Il suit de là, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que la commune de Blauvac est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de M. A... à verser à la commune de Blauvac au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article s'opposent à ce que la somme réclamée par M. A... soit mise à la charge de la commune de Blauvac, qui n'est par la partie pendante dans la présente instance.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 15 juin 2023 de la cour administrative d'appel de Toulouse est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Toulouse.
Article 3 : M. A... versera à la commune de Blauvac une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les conclusions de M. A... tendant à l'application des dispositions de cet article sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de Blauvac et à M. B... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 21 novembre 2024 où siégeaient : M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat, présidant ; M. Edouard Geffray, conseiller d'Etat et M. Pierre Boussaroque, conseiller d'Etat-rapporteur.
Rendu le 12 décembre 2024.
Le président :
Signé : M. Jean-Luc Nevache
Le rapporteur :
Signé : M. Pierre Boussaroque
La secrétaire :
Signé : Mme Paule Troly