Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 29 mars et 17 mai 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 24 janvier 2024 lui refusant l'acquisition de la nationalité française.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes du premier alinéa de l'article 21-2 du code civil : " L'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité ". Aux termes de l'article 21-4 du même code : " Le Gouvernement peut s'opposer par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai de deux ans à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26 ou, si l'enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée. / La situation effective de polygamie du conjoint étranger ou la condamnation prononcée à son encontre au titre de l'infraction définie à l'article 222-9 du code pénal, lorsque celle-ci a été commise sur un mineur de quinze ans, sont constitutives du défaut d'assimilation (...) ".
2. Mme A..., ressortissante algérienne, a souscrit, le 15 septembre 2021, une déclaration d'acquisition de la nationalité française en application de l'article 21-2 du code civil. Par le décret attaqué, le Premier ministre s'est opposé à l'acquisition de la nationalité française au motif que l'intéressée ne pouvait être regardée comme assimilée à la communauté française.
3. Si Mme A... conteste ce défaut d'assimilation, en particulier les conditions de l'enquête prévue à l'article 15 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française, il ressort toutefois de l'ensemble des pièces du dossier que Mme A... a organisé sa vie dans le cadre exclusif de sa communauté, en dehors de toute volonté de mixité sociale en choisissant d'adopter un mode de vie incompatible avec les valeurs essentielles de la société française et notamment avec le principe d'égalité des sexes. En estimant Mme A... n'était pas suffisamment assimilée à la communauté française, le Premier ministre n'a pas fait une application inexacte des dispositions de l'article 21-4 du code civil.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 24 janvier 2024 lui refusant l'acquisition de la nationalité française.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur.
Délibéré à l'issue de la séance du 7 novembre 2024 où siégeaient : M. Jean-Yves Ollier, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Anne Courrèges, conseillère d'Etat et Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 26 novembre 2024.
Le président :
Signé : M. Jean-Yves Ollier
La rapporteure :
Signé : Mme Sophie-Caroline de Margerie
La secrétaire :
Signé : Mme Sandrine Mendy