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26/11/2024 | FRANCE | N°470863

France | France, Conseil d'État, 9ème chambre, 26 novembre 2024, 470863


Vu la procédure suivante :



Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 janvier et 27 avril 2023 et le 18 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Electricité de France (EDF) demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler le point 2.6 de la délibération n° 2022-226 de la Commission de régulation de l'énergie du 28 juillet 2022 portant approbation des " règles services système fréquence " proposées par la société Réseau de transport d'

électricité (RTE), en tant qu'il approuve, d'une part, la suspension de la contractualisation d...

Vu la procédure suivante :

Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 27 janvier et 27 avril 2023 et le 18 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Electricité de France (EDF) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler le point 2.6 de la délibération n° 2022-226 de la Commission de régulation de l'énergie du 28 juillet 2022 portant approbation des " règles services système fréquence " proposées par la société Réseau de transport d'électricité (RTE), en tant qu'il approuve, d'une part, la suspension de la contractualisation de la réserve secondaire par appel d'offres " dans l'hypothèse d'un problème SI rendant temporairement impossible la contractualisation de la Réserve Secondaire par appel d'offres ou d'une défaillance de marché signalée par la CRE " et, d'autre part, un prix forfaitaire de capacité insuffisant par rapport aux coûts réels de constitution des capacités de réserve secondaire d'EDF ;

2°) de mettre à la charge de la Commission de régulation de l'énergie la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société EDF soutient que la délibération attaquée :

- est insuffisamment motivée s'agissant de l'énoncé des cas de suspension de la contractualisation de la réserve secondaire par appel d'offres et de la fixation du prix forfaitaire de capacité ;

- méconnaît les dispositions du paragraphe 8 de l'article 6 du règlement (UE) 2019/943 du 5 juin 2019 en approuvant la possibilité de recourir à la procédure de relai de fonctionnement en cas de problème informatique ou de défaillance de marché ;

- méconnaît le principe de l'adéquation du prix forfaitaire de capacité avec les coûts réels de constitution des capacités de réserve secondaire ;

- est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation s'agissant du niveau du prix forfaitaire de capacité retenu ;

- méconnaît les principes d'équité, d'objectivité et de transparence de l'acquisition de la réserve secondaire, entrave la concurrence et méconnaît l'office du régulateur compte tenu du niveau insuffisant du prix forfaitaire de capacité retenu.

Par un mémoire en défense, enregistré le 29 janvier 2024, la Commission de régulation de l'énergie conclut au rejet de la requête. Elle soutient que celle-ci est irrecevable et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à la société Réseau de transport d'électricité (RTE), qui n'ont pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le règlement (UE) 2017/2195 de la Commission du 23 novembre 2017 ;

- le règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 ;

- le code de l'énergie ;

- la délibération n° 2021-165 de la Commission de régulation de l'énergie du 10 juin 2021 portant approbation des Règles Services Système fréquence proposées par RTE ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Olivier Saby, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier que par sa délibération n° 2022-226 du

28 juillet 2022, la Commission de régulation de l'énergie (CRE), en application des articles 4 à 6 du règlement (UE) 2017/2195 de la Commission européenne du 23 novembre 2017 concernant une ligne directrice sur l'équilibrage du système électrique (" Electricity Balancing ") et de l'article L. 321-11 du code de l'énergie, a révisé et approuvé les " règles services système fréquence " (dites règles SSyF), dans leur version 7.1, proposées par la société Réseau de transport d'électricité (RTE). La société Electricité de France (EDF) demande l'annulation du point 2.6 de cette délibération, en tant qu'il approuve, d'une part, la suspension de la contractualisation de la réserve secondaire par appel d'offres " dans l'hypothèse d'un problème SI rendant temporairement impossible la contractualisation de la Réserve Secondaire par appel d'offres ou d'une défaillance de marché signalée par la CRE " et, d'autre part, un prix forfaitaire de capacité insuffisant par rapport à ses coûts réels de constitution des capacités de réserve secondaire.

Sur les fins de non-recevoir opposées par la Commission de régulation de l'énergie :

2. Le point 2.6 de la délibération attaquée, relatif aux évolutions liées à la contractualisation par appel d'offres pour les capacités de réserve secondaire, expose, à son point 2.6.1, la proposition de RTE, et à son point 2.6.2, la position des autres acteurs. Aux termes du troisième alinéa de son point 2.6.3, qui expose l'analyse de la Commission de régulation de l'énergie : " Après consultation de RTE, la CRE révise ainsi l'article 6.4.6.3 de la proposition de RTE concernant la procédure de relai de fonctionnement, afin de réintroduire une durée limite d'un an à compter de son activation (voir les règles, annexées à la présente délibération, avec l'ensemble des modifications) ".

3. La Commission de régulation de l'énergie soutient, d'une part, que le point 2.6 de la délibération attaquée n'est pas décisoire et ne fait par conséquent pas grief à la société EDF et, d'autre part, que les dispositions critiquées sont purement confirmatives des dispositions précédemment en vigueur.

4. En premier lieu, le point 2.6 de la délibération attaquée n'a ni pour objet ni pour effet d'approuver le prix forfaitaire de capacité, fixé par les dispositions, divisibles du reste des règles SSyF 7.1, de l'article 10.1 de ces dernières. Par suite, les conclusions à fin d'annulation de ce point 2.6 en tant qu'il approuve le prix forfaitaire de capacité ne sont pas recevables.

5. En revanche, le point 2.6.3 de la délibération attaquée cités au point 2 expose la décision de la Commission de régulation de l'énergie de réviser l'article 6.4.6.3 des règles SSyF 7.1, relatif à la procédure de relai de fonctionnement, tel que proposé par RTE, et renvoie à l'annexe de la délibération pour l'énoncé des nouvelles règles. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la Commission de régulation de l'énergie, tirée de ce que le point 2.6 ne ferait pas grief, doit être écartée s'agissant de l'approbation des cas de suspension de la contractualisation de la réserve secondaire par appel d'offres dans le cadre de la procédure de relai de fonctionnement.

6. En second lieu, il ressort des pièces du dossier que les règles SSyF prévoyaient déjà, dans leur version 7 approuvée par la délibération n° 2021-165 de la Commission de régulation de l'énergie du 10 juin 2021, publiée le 25 juin 2021, la possibilité de recourir à la procédure de relai de fonctionnement " dans l'hypothèse d'un problème SI ". Ainsi, les dispositions des règles SSyF 7.1 approuvées par la délibération attaquée, selon lesquelles la société RTE peut recourir à cette même procédure " dans l'hypothèse d'un problème SI rendant temporairement impossible la contractualisation de la Réserve Secondaire par appel d'offres ", sont purement confirmatives des dispositions antérieures. Dès lors, les conclusions tendant à leur annulation sont tardives et par suite irrecevables pour ce motif.

Sur le surplus des conclusions de la requête :

7. En premier lieu, il ne résulte d'aucune disposition ni d'aucun principe que la délibération attaquée, qui revêt le caractère d'un acte réglementaire, doive être motivée. Par suite, la société EDF ne peut utilement soutenir qu'elle serait insuffisamment motivée.

8. En second lieu, aux termes du paragraphe 8 de l'article 6 du règlement (UE) 2019/943 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 sur le marché intérieur de l'électricité : " (...) Les passations de marché qui concernent des capacités d'équilibrage sont fondées sur un marché primaire sauf et dans la mesure où l'autorité de régulation a prévu une dérogation permettant l'utilisation d'autres formes de passation de marché fondées sur le marché au motif d'une absence de concurrence sur le marché des services d'équilibrage. (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'autorité de régulation peut prévoir une dérogation à l'obligation de fonder sur un marché primaire, les passations de marché qui concernent des capacités d'équilibrage dans le cas, non seulement d'une absence totale de concurrence, mais également d'un manque de concurrence.

9. Aux termes de l'article 6.4.6.3 des règles SSyF 7.1 approuvées par la délibération attaquée, relatif à la procédure de relai de fonctionnement : " Dans l'hypothèse (...) d'une défaillance de marché signalée par la CRE, RTE peut revenir à une contractualisation de la Réserve Secondaire par Obligations. (...) "

10. Dès lors qu'en prévoyant un recours à la procédure de relai en fonctionnement dans l'hypothèse d'une défaillance de marché, la délibération attaquée ne saurait avoir pour effet de permettre un tel recours dans d'autres hypothèses que celles d'un manque de concurrence, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du paragraphe 8 de l'article 6 du règlement (UE) 2019/943 citées au point 8 doit être écarté.

11. Il résulte de ce qui précède que la requête doit être rejetée, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la société EDF est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société Electricité de France et à la Commission de régulation de l'énergie.

Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques et à la société Réseau de transport d'électricité.

Délibéré à l'issue de la séance du 17 octobre 2024 où siégeaient : Mme Anne Egerszegi, présidente de chambre, présidant ; M. Nicolas Polge, conseiller d'Etat et M. Olivier Saby, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 26 novembre 2024.

La présidente :

Signé : Mme Anne Egerszegi

Le rapporteur :

Signé : M. Olivier Saby

Le secrétaire :

Signé : M. Brian Bouquet

La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 470863
Date de la décision : 26/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 26 nov. 2024, n° 470863
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Olivier Saby
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:470863.20241126
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