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18/10/2024 | FRANCE | N°474907

France | France, Conseil d'État, 6ème chambre, 18 octobre 2024, 474907


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 juin 2023 et 17 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l'analyse et de la numérisation de l'existant (SIDIANE) demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler la décision par laquelle la Première ministre a rejeté implicitement la demande reçue le 16 février 2023 tendant à l'abrogation du dispositif de certification des diagnostiqueurs, institué par le décret

n° 2006-1114 du 5 septembre 2006 et prévu à l'article R. 271-1 du code de la construct...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 8 juin 2023 et 17 janvier 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l'analyse et de la numérisation de l'existant (SIDIANE) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision par laquelle la Première ministre a rejeté implicitement la demande reçue le 16 février 2023 tendant à l'abrogation du dispositif de certification des diagnostiqueurs, institué par le décret n° 2006-1114 du 5 septembre 2006 et prévu à l'article R. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, en tant que les personnes morales en sont exclues ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros à verser au Syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l'analyse et de la numérisation de l'existant, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2006/123/CE du 12 décembre 2006 ;

- la directive 2023/1791 du 13 septembre 2023 ;

- le code de la construction et de l'habitation ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Pour procéder aux diagnostics techniques immobiliers prévus par l'article L. 271-4 du code de la construction et de l'habitation, l'article L. 271-6 du même code prévoit que " Les documents prévus aux 1° à 4°, 6° et 7° du I de l'article L. 271-4 ainsi qu'à l'article L. 126-26 sont établis par une personne présentant des garanties de compétence et disposant d'une organisation et de moyens appropriés ", et renvoie à un décret le soin de définir " les conditions et modalités d'application du présent article ". Tout en renvoyant à des arrêtés des ministres chargés du logement, de la santé et de l'industrie le soin d'en préciser les modalités d'application, l'article R. 271-1 de ce code précise que pour l'application de l'article L. 271-6 précitée, il est recouru, de façon alternative, " soit à une personne physique dont les compétences ont été certifiées par un organisme accrédité dans le domaine de la construction, soit à une personne morale employant des salariés ou constituée de personnes physiques qui disposent des compétences certifiées dans les mêmes conditions ". Le syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l'analyse et de la numérisation de l'existant demande au Conseil d'Etat d'annuler la décision par laquelle la Première ministre a rejeté implicitement la demande reçue le 16 février 2023 tendant à l'abrogation du dispositif de certification des diagnostiqueurs, institué par le décret n° 2006-1114 du 5 septembre 2006 et prévu à l'article R. 271-1 du code de la construction et de l'habitation, en tant que les personnes morales sont exclues de ce dispositif de certification.

2. En premier lieu, il résulte des termes mêmes de l'article L. 271-6 du code de la construction et de l'habitation que le législateur a habilité le pouvoir réglementaire à intervenir pour déterminer le niveau de compétence des opérateurs de diagnostic technique. Le dispositif ainsi prévu par le pouvoir réglementaire permet à des personnes physiques dont les compétences ont été certifiées par un organisme accrédité mais également à des personnes morales employant des salariés certifiés ou composées de personnes physiques certifiées de proposer des activités de diagnostic technique immobilier. La décision d'instaurer une procédure de certification de compétences des opérateurs plutôt qu'un dispositif de certification des personnes morales se justifie au regard des objectifs de protection de l'environnement et de santé publique poursuivis par les dispositions de l'article L. 271-6 du code de la construction et de l'habitation précitées. Cette procédure permet de s'assurer d'un niveau de compétence approprié de chacune des personnes effectuant les diagnostics et donc de garantir la fiabilité des diagnostics immobiliers, tout en n'excédant pas ce qui est nécessaire pour atteindre ces objectifs dès lors que les personnes morales ne sont pas exclues du marché du diagnostic. Par suite, les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article R. 271-1 du code de la construction et de l'habitation méconnaitraient, d'une part, les dispositions de l'article L. 271-6 du même code en excluant les personnes morales de la procédure de certification de compétences et, d'autre part, le principe de la liberté de commerce et de l'industrie, le principe d'égalité et la libre concurrence doivent être écartés.

3. En second lieu, pour les mêmes motifs et alors que les dispositions attaquées n'interdisent pas à une personne morale d'un Etat membre de l'Union européenne, dès lors qu'elle emploie des personnes présentant des garanties de compétences, d'exercer une activité de diagnostic en France, les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article R. 271-1 du code de la construction et de l'habitation instaurerait au détriment des personnes morales d'un autre Etat membre un dispositif de certification discriminatoire, disproportionné, qui porterait atteinte à la liberté d'établissement et à la libre prestation de service et méconnaitrait la directive (UE) 2023/1791 du Parlement européen et du Conseil du 13 septembre 2023 relative à l'efficacité énergétique et modifiant le règlement (UE) 2023/955, doivent être écartés.

4. Il résulte de tout ce qui précède que la requête du syndicat autonome des agents cynophiles doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête du syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l'analyse et de la numérisation de l'existant est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au syndicat interprofessionnel du diagnostic immobilier, de l'analyse et de la numérisation de l'existant (SIDIANE) et à la ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.

Délibéré à l'issue de la séance du 19 septembre 2024 où siégeaient : M. Cyril Roger-Lacan, assesseur, présidant ; M. Stéphane Hoynck, conseiller d'Etat et Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 18 octobre 2024.

Le président :

Signé : M. Cyril Roger-Lacan

La rapporteure :

Signé : Mme Stéphanie Vera

La secrétaire :

Signé : Mme Angélique Rajaonarivelo


Synthèse
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 474907
Date de la décision : 18/10/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 oct. 2024, n° 474907
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Stéphanie Vera
Rapporteur public ?: M. Frédéric Puigserver

Origine de la décision
Date de l'import : 20/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474907.20241018
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