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30/07/2024 | FRANCE | N°471055

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 30 juillet 2024, 471055


Vu la procédure suivante :



La société La Porte de Montmartre a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014 ainsi que des intérêts de retard correspondants. Par un jugement n° 1901980 du 8 décembre 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.



Par un arrêt n° 21PA06553 du 7 décembre 2022, la cour administrative d

'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société La Porte de Montmartre contre ce jugeme...

Vu la procédure suivante :

La société La Porte de Montmartre a demandé au tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2013 et 2014 ainsi que des intérêts de retard correspondants. Par un jugement n° 1901980 du 8 décembre 2021, ce tribunal a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 21PA06553 du 7 décembre 2022, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel formé par la société La Porte de Montmartre contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 3 février et 28 avril 2023 et le 3 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société La Porte de Montmartre demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société La Porte de Montmartre ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue d'une vérification de comptabilité de la société La Porte de Montmartre, l'administration fiscale a remis en cause, d'une part, l'application du taux réduit d'impôt sur les sociétés prévu au b du I de l'article 219 du code général des impôts dont cette société avait entendu bénéficier au titre de l'imposition des résultats de ses exercices clos les 31 octobre 2013 et 31 octobre 2014 et, d'autre part, l'exonération de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZC du même code dont cette société avait entendu bénéficier au titre de l'imposition des résultats de son exercice clos le 31 octobre 2014. Par un jugement du 8 décembre 2021, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie en conséquence au titre de ces exercices ainsi que des intérêts de retard correspondants. La société La Porte de Montmartre se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 décembre 2022 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel qu'elle avait formé contre ce jugement.

2. Aux termes, d'une part, de l'article 219 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés en litige : " I. (...) / Le taux normal de l'impôt est fixé à 33,1/3 %. / Toutefois : / (...) b. Par exception au deuxième alinéa du présent I (...), pour les redevables ayant réalisé un chiffre d'affaires de moins de 7 630 000 € au cours de l'exercice ou de la période d'imposition, ramené s'il y a lieu à douze mois, le taux de l'impôt applicable au bénéfice imposable est fixé, dans la limite de 38 120 € de bénéfice imposable par période de douze mois, (...) à 15 % pour les exercices ouverts à compter du 1er janvier 2002. / Pour la société mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A, le chiffre d'affaires est apprécié en faisant la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe. Le capital des sociétés mentionnées au premier alinéa du présent b doit être entièrement libéré et détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des fonds professionnels spécialisés (...), des fonds professionnels de capital investissement, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds. (...) ".

3. Aux termes, d'autre part, de l'article 235 ter ZC du même code, dans sa rédaction applicable à la cotisation supplémentaire de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés en litige : " I. Les redevables de l'impôt sur les sociétés sont assujettis à une contribution sociale égale à une fraction de cet impôt calculé sur leurs résultats imposables aux taux mentionnés aux I et IV de l'article 219 et diminué d'un abattement qui ne peut excéder 763 000 € par période de douze mois. (...) / (...) / Sont exonérés les redevables ayant réalisé un chiffre d'affaires de moins de 7 630 000 €. Le chiffre d'affaires à prendre en compte s'entend du chiffre d'affaires réalisé par le redevable au cours de l'exercice ou période d'imposition, ramené à douze mois le cas échéant et, pour la société mère d'un groupe mentionné à l'article 223 A, de la somme des chiffres d'affaires de chacune des sociétés membres de ce groupe. Le capital des sociétés, entièrement libéré, doit être détenu de manière continue, pour 75 % au moins, par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques. Pour la détermination de ce pourcentage, les participations des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques, des fonds professionnels spécialisés (...), des fonds professionnels de capital investissement, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation ne sont pas prises en compte à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 entre la société en cause et ces dernières sociétés ou ces fonds ".

4. En réservant le bénéfice du taux réduit d'impôt sur les sociétés prévu au b du I de l'article 219 du code général des impôts et celui de l'exonération de contribution sociale sur l'impôt sur les sociétés prévue à l'article 235 ter ZC du même code aux sociétés qui sont détenues de manière continue, à 75 % au moins, par des personnes physiques ou par des sociétés elles-mêmes directement détenues, dans la même proportion, par des personnes physiques, le législateur a entendu restreindre le champ de ces dispositifs favorables à des petites et moyennes entreprises détenues de manière prépondérante et suffisamment directe par des personnes physiques, afin de garantir leur indépendance à l'égard de sociétés tierces. Eu égard à l'objet de cette condition, il y a lieu, pour apprécier le respect du seuil de détention du capital prévu par ces dispositions, de faire abstraction de la part de son capital que la société détient, le cas échéant, en propre.

5. Il résulte de ce qui vient d'être dit qu'en jugeant que l'administration fiscale était fondée à prendre en compte, pour apprécier le respect du seuil de détention du capital prévu au b du I de l'article 219 du code général des impôts et à l'article 235 ter ZC du même code, les actions de la société La Porte de Montmartre détenues en propre par cette dernière, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. La société La Porte de Montmartre est fondée pour ce motif, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de son pourvoi, à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la société La Porte de Montmartre, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 7 décembre 2022 de la cour administrative d'appel de Paris est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Paris.

Article 3 : L'Etat versa à la société La Porte de Montmartre la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société La Porte de Montmartre et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 10 juillet 2024 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,

Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou,

M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, conseillers d'Etat ; M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Matias de Sainte Lorette, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 30 juillet 2024.

Le président :

Signé : M. Pierre Collin

Le rapporteur :

Signé : M. Matias de Sainte Lorette

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida Ghulam

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 471055
Date de la décision : 30/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔT SUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS ET AUTRES PERSONNES MORALES - ÉTABLISSEMENT DE L'IMPÔT - TAUX RÉDUIT D’IS EN FAVEUR DES PME (B DU I DE L’ART - 219 DU CGI) – CONDITION TENANT À CE QUE LA SOCIÉTÉ SOIT DÉTENUE À AU MOINS 75 % PAR DES PERSONNES PHYSIQUES OU DES SOCIÉTÉS DÉTENUES DANS LES MÊMES PROPORTIONS PAR DE TELLES PERSONNES – APPRÉCIATION DU SEUIL – PRISE EN COMPTE DU CAPITAL AUTO-DÉTENU – ABSENCE.

19-04-01-04-04 En réservant le bénéfice du taux réduit d’impôt sur les sociétés (IS) prévu au b du I de l’article 219 du code général des impôts (CGI) et celui de l’exonération de contribution sociale sur l’IS prévue à l’article 235 ter ZC du même code aux sociétés qui sont détenues de manière continue, à 75 % au moins, par des personnes physiques ou par des sociétés elles-mêmes directement détenues, dans la même proportion, par des personnes physiques, le législateur a entendu restreindre le champ de ces dispositifs favorables à des petites et moyennes entreprises (PME) détenues de manière prépondérante et suffisamment directe par des personnes physiques, afin de garantir leur indépendance à l’égard de sociétés tierces. Eu égard à l’objet de cette condition, il y a lieu, pour apprécier le respect du seuil de détention du capital prévu par ces dispositions, de faire abstraction de la part de son capital que la société détient, le cas échéant, en propre.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES - RÈGLES GÉNÉRALES - IMPÔTS ET PRÉLÈVEMENTS DIVERS SUR LES BÉNÉFICES - EXONÉRATION DE CONTRIBUTION SOCIALE SUR L’IS EN FAVEUR DES PME (ART - 235 TER ZC DU CGI) – CONDITION TENANT À CE QUE LA SOCIÉTÉ SOIT DÉTENUE À AU MOINS 75 % PAR DES PERSONNES PHYSIQUES OU DES SOCIÉTÉS DÉTENUES DANS LES MÊMES PROPORTIONS PAR DE TELLES PERSONNES – APPRÉCIATION DU SEUIL – PRISE EN COMPTE DU CAPITAL AUTO-DÉTENU – ABSENCE.

19-04-01-05 En réservant le bénéfice du taux réduit d’impôt sur les sociétés (IS) prévu au b du I de l’article 219 du code général des impôts (CGI) et celui de l’exonération de contribution sociale sur l’IS prévue à l’article 235 ter ZC du même code aux sociétés qui sont détenues de manière continue, à 75 % au moins, par des personnes physiques ou par des sociétés elles-mêmes directement détenues, dans la même proportion, par des personnes physiques, le législateur a entendu restreindre le champ de ces dispositifs favorables à des petites et moyennes entreprises (PME) détenues de manière prépondérante et suffisamment directe par des personnes physiques, afin de garantir leur indépendance à l’égard de sociétés tierces. Eu égard à l’objet de cette condition, il y a lieu, pour apprécier le respect du seuil de détention du capital prévu par ces dispositions, de faire abstraction de la part de son capital que la société détient, le cas échéant, en propre.


Publications
Proposition de citation : CE, 30 jui. 2024, n° 471055
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Matias de Sainte Lorette
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SCP PIWNICA & MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:471055.20240730
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