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24/07/2024 | FRANCE | N°488735

France | France, Conseil d'État, 1ère chambre, 24 juillet 2024, 488735


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 octobre 2023 et 21 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux de réadaptation (FHP - SMR) demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 avril 2023 fixant pour l'année 2023 les éléments tarifaires associés aux prestations mentionnées à l'article L. 162-23-1 et le tarif de responsabilité mentionné à l'article R. 162-25 du

code de la sécurité sociale des établissements de santé mentionnés au d et e de l'article L. 16...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 octobre 2023 et 21 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux de réadaptation (FHP - SMR) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 11 avril 2023 fixant pour l'année 2023 les éléments tarifaires associés aux prestations mentionnées à l'article L. 162-23-1 et le tarif de responsabilité mentionné à l'article R. 162-25 du code de la sécurité sociale des établissements de santé mentionnés au d et e de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale en tant que son article 4 n'applique pas le même taux d'évolution aux tarifs des suppléments transports facturables par les établissements exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation que celui appliqué aux tarifs des suppléments transports facturables par les établissements exerçant les activités de médecine, chirurgie, gynécologie-obstétrique et odontologie, ainsi que le rejet de son recours gracieux ;

2°) d'enjoindre au ministre de la santé et de la prévention et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de modifier l'article 4 de l'arrêté du 11 avril 2023 en appliquant le même taux d'évolution que celui utilisé pour la fixation en 2023 des tarifs des suppléments transports facturables par les établissements exerçant les activités de médecine, chirurgie, gynécologie-obstétrique et odontologie, soit + 5,37 % par rapport aux tarifs 2022 ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 1er mars 2022 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations d'hospitalisation, des médicaments, des produits, des prestations et au forfait journalier pour les activités de soins de suite ou de réadaptation et les activités de psychiatrie exercées par les établissements mentionnés aux d et e de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale ;

- l'arrêté du 28 mars 2023 fixant pour l'année 2023 l'objectif de dépenses d'assurance maladie afférent aux activités de soins de suite et de réadaptation ;

- l'arrêté du 30 mars 2023 fixant pour l'année 2023 les éléments tarifaires mentionnés aux I et IV de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Noël, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. En premier lieu, aux termes de l'article L. 162-21-2 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué : " Les transports réalisés au sein d'un même établissement de santé ou entre deux établissements de santé sont pris en charge par l'établissement à l'origine de la prescription de transport et sont inclus dans les tarifs des prestations mentionnés au 1° des articles (...) L. 162-23-1 (...). Un décret précise les conditions d'application du présent article ". Le I de l'article D. 162-17 du même code précise à ce titre les cas dans lesquels les dépenses de transports de patients hospitalisés sont prises en charge par l'établissement de santé à l'origine de la prescription médicale de transport et l'article D. 162-17-1 du même code prévoit que ces dépenses : " sont prises en charge dans les tarifs des prestations mentionnées (...) à l'article L. 162-23-1 (...) ".

2. En second lieu, d'une part, en vertu du I de l'article L. 162-23 du code de la sécurité sociale, chaque année, est défini un objectif de dépenses d'assurance maladie afférent aux activités de soins de suite et de réadaptation qui sont exercées par les différents établissements de santé mentionnés à l'article L. 162-22-6 de ce code. Cet objectif, dont le montant est arrêté par l'Etat en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, est constitué du montant annuel de charges supportées par les régimes obligatoires d'assurance maladie afférentes aux frais d'hospitalisation au titre des soins dispensés au cours de l'année dans le cadre de ces activités. Le II du même article dispose qu'"un décret en Conseil d'Etat précise les éléments pris en compte pour la détermination de cet objectif ainsi que les modalités selon lesquelles, chaque année, sont déterminés les éléments mentionnés aux 1° à 6° de l'article L. 162-23-4 compatibles avec le respect de l'objectif, en prenant en compte à cet effet, notamment, les prévisions d'évolution de l'activité des établissements pour l'année en cours (...). Les tarifs nationaux des prestations mentionnées au 2° de l'article L. 162-23-4 du présent code peuvent être déterminés, en tout ou partie, à partir des données afférentes au coût relatif des prestations, issues notamment de l'étude nationale de coûts définie à l'article L. 6113-11 du code de la santé publique. " Le I de l'article L. 162-23-4 du même code prévoit que : " chaque année, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, selon les modalités prévues au II de l'article L. 162-23 : / 1° Les tarifs nationaux des prestations mentionnées au 1° de l'article L. 162-23-1, (...) calculés en fonction de l'objectif défini à l'article L. 162-23 ; / 2° Le cas échéant, les coefficients géographiques s'appliquant aux tarifs nationaux mentionnés au 1° du présent article (...) des établissements implantés dans certaines zones, afin de tenir compte d'éventuels facteurs spécifiques qui modifient de manière manifeste, permanente et substantielle le prix de revient de certaines prestations dans la zone considérée (...) ".

3. D'autre part, l'article L. 162-23-1 du code de la sécurité sociale dispose, dans sa rédaction en vigueur à la date de l'arrêté attaqué, que, pour les activités de soins de suite et de réadaptation : " un décret en Conseil d'Etat (...) détermine : / 1° Les catégories de prestations d'hospitalisation sur la base desquelles les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent la classification des prestations donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale (...) ". Pour son application, l'article R. 162-34-1 de ce code prévoit que : " Constitue une catégorie de prestations d'hospitalisation au sens du 1° de l'article L. 162-23-1, la prise en charge d'une partie des frais occasionnés par les séjours et les soins avec ou sans hébergement, représentatifs de la mise à disposition de l'ensemble des moyens nécessaires à l'hospitalisation. / Cette prise en charge est assurée par des forfaits et, le cas échéant, par des suppléments journaliers. Les forfaits sont facturés sur la base des tarifs nationaux mentionnés au 1° du I de l'article L. 162-23-4, par séance, journée ou séjour.(...) Un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale précise les conditions d'application du présent article ". L'arrêté du 1er mars 2022 relatif à la classification et à la prise en charge des prestations d'hospitalisation, des médicaments, des produits, des prestations et au forfait journalier pour les activités de soins de suite ou de réadaptation et les activités de psychiatrie exercées par les établissements mentionnés aux d et e de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale, applicable à la date de l'arrêté attaqué, prévoit ainsi, en ses articles 2 et 5, que, pour les établissements de santé exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation, la catégorie de prestations d'hospitalisation, respectivement avec hébergement ou sans hébergement, mentionnée à l'article R. 162-34-1, donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, est couverte par les forfaits qu'il définit et qui comportent trois types de supplément transport, selon l'objet et les conditions du transfert ou du déplacement du patient.

4. L'arrêté du 28 mars 2023 fixant pour l'année 2023 l'objectif de dépenses d'assurance maladie afférent aux activités de soins de suite et de réadaptation a fixé cet objectif à 10 761,4 millions d'euros pour 2023. Eu égard à cet objectif, l'article 4 de l'arrêté du 11 avril 2023 fixant pour l'année 2023 les éléments tarifaires associés aux prestations mentionnées à l'article L. 162-23-1 et le tarif de responsabilité mentionné à l'article R. 162-25 du code de la sécurité sociale des établissements de santé mentionnés au d et e de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale a fixé les tarifs des suppléments transports mentionnés aux articles 2 et 5 de l'arrêté du 1er mars 2022 mentionné ci-dessus, applicables en 2023 aux établissements de santé exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation.

5. La Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux de réadaptation demande l'annulation pour excès de pouvoir de cet article 4 en tant qu'il n'applique pas, pour les tarifs des suppléments transports facturables par les établissements exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation, le même taux d'évolution en 2023 que celui prévu pour les tarifs des suppléments transports équivalents facturables par les établissements exerçant les activités de médecine, chirurgie, gynécologie-obstétrique et odontologie en vertu de l'arrêté du 30 mars 2023 fixant pour l'année 2023 les éléments tarifaires mentionnés aux I et IV de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale.

6. D'une part, il résulte des dispositions citées aux points 1 à 3 que la prise en charge, par l'assurance maladie, des prestations de transport sanitaire facturées par les établissements de santé est définie sur la base de tarifs nationaux forfaitaires, prenant la forme de " suppléments transports ", qui sont fixés chaque année en fonction de l'objectif de dépenses d'assurance maladie afférent aux différentes catégories d'activités exercées par les établissements de santé et qui doivent être compatibles avec cet objectif. Dès lors que l'arrêté attaqué a fixé les tarifs des suppléments transports applicables en 2023 aux établissements de santé exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation en fonction de l'objectif de dépenses d'assurance maladie afférent à ces mêmes activités au titre de cette année, la fédération requérante ne saurait utilement invoquer une violation du principe d'égalité par rapport aux tarifs des suppléments transports applicables cette même année aux établissements de santé exerçant les activités de médecine, chirurgie, gynécologie-obstétrique et odontologie, qui ont été déterminés en fonction de l'objectif de dépenses d'assurance maladie afférent à ces dernières activités, alors en outre qu'est contesté le seul taux d'évolution différent de ces tarifs dont il résulte des dispositions citées au point 2 qu'ils sont structurés de façon propre à chaque catégorie d'activité.

7. D'autre part, si, contrairement à ce que soutient la ministre du travail, de la santé et des solidarités, les tarifs des suppléments transport ont vocation, bien qu'ils doivent demeurer compatibles avec le respect de l'objectif de dépenses fixé pour l'année, à couvrir le coût de ces prestations et peuvent d'ailleurs être déterminés, comme le prévoit l'article L. 162-23 du code de la sécurité sociale cité au point 2, à partir des données afférentes au coût relatif des prestations issues notamment de l'étude nationale de coûts définies à l'article L. 6113-11 du code de la santé publique, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'évolution des tarifs des suppléments transports applicables en 2023 aux établissements de santé exerçant les activités de soins de suite et de réadaptation serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de ce qui précède que la requête de la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux de réadaptation ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

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Article 1er : La requête de la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux de réadaptation est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération de l'hospitalisation privée - Soins médicaux de réadaptation (FHP - SMR) et à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 13 juin 2024 où siégeaient : Mme Gaëlle Dumortier, présidente de chambre, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Cyril Noël, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 24 juillet 2024.

La présidente :

Signé : Mme Gaëlle Dumortier

Le rapporteur :

Signé : M. Cyril Noël

Le secrétaire :

Signé : M. Mickaël Lemasson


Synthèse
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 488735
Date de la décision : 24/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 jui. 2024, n° 488735
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyril Noël
Rapporteur public ?: M. Mathieu Le Coq

Origine de la décision
Date de l'import : 26/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:488735.20240724
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