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16/07/2024 | FRANCE | N°487703

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 16 juillet 2024, 487703


Vu la procédure suivante :



La société civile immobilière (SCI) Fortunio a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2017 dans les rôles de la commune de Nîmes (Gard), à raison d'un immeuble à usage commercial dont elle est propriétaire au 866 avenue du Maréchal Juin. Par un jugement n° 1800632 du 8 juillet 2020, la magistrate désignée par le président de ce tribunal a prononcé la décha

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Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière (SCI) Fortunio a demandé au tribunal administratif de Nîmes de prononcer la décharge des cotisations primitives de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2012 à 2017 dans les rôles de la commune de Nîmes (Gard), à raison d'un immeuble à usage commercial dont elle est propriétaire au 866 avenue du Maréchal Juin. Par un jugement n° 1800632 du 8 juillet 2020, la magistrate désignée par le président de ce tribunal a prononcé la décharge demandée au titre des années 2016 et 2017 et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par une décision n° 443586 du 23 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a annulé l'article 1er de ce jugement, relatif aux années 2016 et 2017, et renvoyé l'affaire dans cette mesure au tribunal administratif de Nîmes.

Par un jugement n° 2102348 du 27 juin 2023, le tribunal administratif de Nîmes, statuant sur renvoi du Conseil d'Etat, a rejeté les demandes de la société Fortunio.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 28 août et 29 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Fortunio demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses demandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Jean-Marc Vié, conseiller d'Etat,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Buk Lament-Robillot, avocat de la société Fortunio ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'en mai 2016, à la suite de la contestation par la société civile immobilière (SCI) Fortunio des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2014 et 2015, l'administration fiscale a procédé à la réévaluation de la valeur locative d'ensemble des lots nos 43, 48 et 49 appartenant à cette société au sein d'un immeuble situé au 866 avenue du Maréchal Juin, à Nîmes (Gard), dont les deux derniers étaient issus de la division, en 2011, d'un ancien lot, en procédant par comparaison avec le local-type n° C 197 de cette commune, le lot n° 46 restant évalué par comparaison avec le local-type n° C 107 initialement utilisé pour tous les lots. La société Fortunio se pourvoit en cassation contre le jugement du 27 juin 2023 par lequel le tribunal administratif de Nîmes, statuant sur renvoi dans la mesure de la cassation prononcée par une décision du 23 juillet 2021 du Conseil d'Etat contre un premier jugement du 8 juillet 2020 du même tribunal, a rejeté sa demande de décharge des cotisations de taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2016 et 2017 sur la base de cette nouvelle valeur locative.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties (...) est déterminée conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 1505 du même code dans sa rédaction applicable aux années en litige : " Le représentant de l'administration et la commission communale des impôts directs procèdent à l'évaluation des propriétés bâties. / Après harmonisation avec les autres communes du département, les évaluations sont arrêtées par le service des impôts. Il en est de même en cas de désaccord entre le représentant de l'administration et la commission ou lorsque celle-ci refuse de prêter son concours. (...) ". S'il résulte des dispositions de l'article 1505 du code général des impôts que la commission communale des impôts directs doit être saisie lors de chaque modification, par l'administration, de l'évaluation des propriétés bâties relevant de l'article 1498 de ce code, en dehors du cas où cette modification résulte exclusivement de l'actualisation de la valeur locative par application des coefficients annuels de majoration prévus à l'article 1518 bis de ce code, ces dispositions ne sont pas applicables lorsque l'administration modifie l'évaluation d'un bien à la suite d'une contestation du contribuable, que ce soit dans le cadre de l'instruction de la réclamation contentieuse ou postérieurement à la saisine du juge de l'impôt.

3. En jugeant que le moyen tiré du défaut de saisine de la commission communale des impôts directs préalablement à la modification de l'évaluation du local commercial en cause manquait en fait dès lors que l'administration avait produit l'avis du 4 septembre 2000 rendu par cette commission, le tribunal administratif a implicitement mais nécessairement fait référence à l'évaluation effectuée en 1999 par comparaison avec le local-type n° C 107, sans dénaturer les écritures particulièrement imprécises de la société requérante ni davantage commettre d'erreur de droit dès lors, ainsi qu'il résulte de ce qui a été dit au point 2, que la réévaluation effectuée en 2016 dans le cadre de l'instruction d'une réclamation de la société n'avait pas à être précédée de l'intervention de la commission communale des impôts directs.

4. En second lieu, aux termes de l'article 1498 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'évaluation en litige : " La valeur locative de tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 est déterminée au moyen de l'une des méthodes indiquées ci-après : (...) / 2° a. Pour les biens loués à des conditions de prix anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un autre titre que la location, vacants ou concédés à titre gratuit, la valeur locative est déterminée par comparaison. / Les termes de comparaison sont choisis dans la commune. Ils peuvent être choisis hors de la commune pour procéder à l'évaluation des immeubles d'un caractère particulier ou exceptionnel ; / b. La valeur locative des termes de comparaison est arrêtée : / Soit en partant du bail en cours à la date de référence de la révision lorsque l'immeuble type était loué normalement à cette date, / Soit, dans le cas contraire, par comparaison avec des immeubles similaires situés dans la commune ou dans une localité présentant, du point de vue économique, une situation analogue à celle de la commune en cause et qui faisaient l'objet à cette date de locations consenties à des conditions de prix normales ; (...) ". Aux termes de l'article 324 Z de l'annexe III au même code, dans sa rédaction applicable à l'évaluation en litige : " I. L'évaluation par comparaison consiste à attribuer à un immeuble ou à un local donné une valeur locative proportionnelle à celle qui a été adoptée pour d'autres biens de même nature pris comme types. II. Les types dont il s'agit doivent correspondre aux catégories dans lesquelles peuvent être rangés les biens de la commune visés aux articles 234 Y à 324 AC, au regard de l'affectation, de la situation, de la nature de la construction, de son importance, de son état d'entretien et de son aménagement. / Ils sont inscrits au procès-verbal des opérations de la révision ". Aux termes de l'article 324 AA de cette même annexe, applicable jusqu'au 30 juin 2018 : " La valeur locative cadastrale des biens loués à des conditions anormales ou occupés par leur propriétaire, occupés par un tiers à un titre autre que celui de locataire, vacants ou concédés à titre gratuit est obtenue en appliquant aux données relatives à leur consistance - telles que superficie réelle, nombre d'éléments - les valeurs unitaires arrêtées pour le type de la catégorie correspondante. Cette valeur est ensuite ajustée pour tenir compte des différences qui peuvent exister entre le type considéré et l'immeuble à évaluer, notamment du point de vue de la situation, de la nature de la construction, de son état d'entretien, de son aménagement, ainsi que de l'importance plus ou moins grande de ses dépendances bâties et non bâties si ces éléments n'ont pas été pris en considération lors de l'appréciation de la consistance ".

5. Pour écarter le moyen tiré de ce que le local-type n° C 107 ne constituait pas un terme de comparaison pertinent pour la détermination initiale de la valeur locative de l'immeuble correspondant au lot n° 46, le tribunal administratif s'est fondé sur ce que, au vu des pièces produites par les parties, les différences de localisation géographique et de surface entre les deux locaux, dont découlaient les différences de commercialité par ailleurs alléguées, n'étaient pas telles que, moyennant l'application par l'administration d'une décote de 10 % de la valeur locative au mètre carré, les deux locaux ne puissent être comparés. En statuant ainsi par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Fortunio n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la société Fortunio est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la société civile immobilière Fortunio et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 487703
Date de la décision : 16/07/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 16 jui. 2024, n° 487703
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Marc Vié
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP BUK LAMENT - ROBILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:487703.20240716
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