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05/07/2024 | FRANCE | N°476279

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 05 juillet 2024, 476279


Vu la procédure suivante :



La société Cellnex France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 17 novembre 2022 par lequel la maire de la commune d'Orly (Val-de-Marne) s'est opposée à sa déclaration préalable en vue de la modification d'une installation d'infrastructures et d'équipements de radiotéléphonie sur le territoire de la commune, et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

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Par une ordonnance n° 2306181 du 10 juillet 2023, le juge des référés...

Vu la procédure suivante :

La société Cellnex France a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun de suspendre, sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de la décision du 17 novembre 2022 par lequel la maire de la commune d'Orly (Val-de-Marne) s'est opposée à sa déclaration préalable en vue de la modification d'une installation d'infrastructures et d'équipements de radiotéléphonie sur le territoire de la commune, et de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 2306181 du 10 juillet 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 25 juillet et 12 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Cellnex France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande de suspension ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Orly la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Charte de l'environnement ;

- le code des postes et des communications électroniques ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Trémolière, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Cellnex France et à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de la commune d'Orly ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Melun que, par une décision du 17 novembre 2022, la maire de la commune d'Orly (Val-de-Marne) s'est opposée à la déclaration préalable déposée par la société Cellnex France en vue de la modification d'une installation d'infrastructures et d'équipements de radiotéléphonie sur un terrain situé dans cette commune. Cette société se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 10 juillet 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Melun, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande de suspension de l'exécution de cette décision ainsi que du rejet implicite de son recours gracieux du 27 décembre 2022.

2. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".

Sur le pourvoi :

3. Pour estimer que la société Cellnex France ne justifiait pas de sa qualité pour agir et que sa requête devait être rejetée comme irrecevable, le juge des référés du tribunal administratif de Melun s'est fondé sur la circonstance que la société requérante, opérateur d'infrastructures de téléphonie mobile, ne justifiait pas agir pour le compte de la société Bouygues Télécom, opérateur en téléphonie mobile, faute notamment de produire l'accord-cadre qui l'unit à cette société et de démontrer la relation contractuelle qui existe entre les deux sociétés. En se fondant sur cette circonstance, alors qu'il ressort des pièces soumises au juge des référés, notamment du dossier de déclaration préalable de travaux, que celle-ci a été déposée par la société Cellnex, le juge des référés a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, la société Cellnex est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

4. Il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.

Sur la demande de suspension :

5. D'une part, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile, aux intérêts propres de la société Cellnex France, et à la circonstance que le territoire de la commune d'Orly n'est que partiellement couvert par le réseau de téléphonie mobile 5G de la société Bouygues Telecom, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.

6. D'autre part, sont de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée les moyens tirés de ce que cette décision ne pouvait se fonder sur la méconnaissance du principe de précaution énoncé à l'article 5 de la Charte de l'environnement, sur le caractère incomplet du dossier déposé en mairie et sur la méconnaissance par l'installation projetée des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, notamment ses articles UR 4-1-1-1 et UR 4-1-3-4.

7. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner la suspension de la décision attaquée.

8. Il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à demander la suspension de l'exécution de l'arrêté contesté du 17 novembre 2022.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

9. Il y a lieu d'enjoindre à la maire d'Orly de délivrer, à titre provisoire, un certificat de non-opposition à déclaration préalable à la société Cellnex France dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Orly le versement à la société Cellnex France de la somme de 4 500 euros au titre des frais exposés devant le Conseil d'Etat et devant le tribunal administratif de Melun et non compris dans les dépens. En revanche, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société Cellnex France qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 10 juillet 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Melun est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 17 novembre 2022 par laquelle la maire d'Orly a refusé de délivrer un certificat de non-opposition à la déclaration préalable de la société Cellnex France est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint à la commune d'Orly de délivrer, à titre provisoire, un certificat de non-opposition à déclaration préalable à la société Cellnex France dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : La commune d'Orly versera la somme de 4 500 euros à la société Cellnex France au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune d'Orly au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la société Cellnex France et à la commune d'Orly.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 476279
Date de la décision : 05/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 05 jui. 2024, n° 476279
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alexandre Trémolière
Rapporteur public ?: M. Clément Malverti
Avocat(s) : SCP PIWNICA & MOLINIE ; SCP OHL, VEXLIARD

Origine de la décision
Date de l'import : 07/07/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:476279.20240705
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