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25/06/2024 | FRANCE | N°475459

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 25 juin 2024, 475459


Vu la procédure suivante :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 22 novembre 2021 par laquelle le service des retraites de l'Etat a refusé de prendre en compte, pour la liquidation de sa pension de retraite, au titre de son troisième enfant, la bonification d'ancienneté prévue au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite et de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi. Par un jugement n° 2200242 du 9

mai 2023, la magistrate désignée par la présidente de ce tribunal a an...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 22 novembre 2021 par laquelle le service des retraites de l'Etat a refusé de prendre en compte, pour la liquidation de sa pension de retraite, au titre de son troisième enfant, la bonification d'ancienneté prévue au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite et de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral qu'il estime avoir subi. Par un jugement n° 2200242 du 9 mai 2023, la magistrate désignée par la présidente de ce tribunal a annulé le titre de pension de M. A... du 10 octobre 2022 en tant qu'il ne tient pas compte de cette bonification, a enjoint au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de la prendre en compte pour le calcul de sa pension de retraite et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Par un pourvoi, enregistré le 27 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique demande au Conseil d'Etat d'annuler les articles 1er à 3 de ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code de l'éducation ;

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-624 du 20 juillet 1982 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. A..., alors professeur certifié, a été admis à faire valoir ses droits à la retraite à compter du 1er décembre 2022. Le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique se pourvoit en cassation contre les articles 1er à 3 du jugement par lequel la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif de Bordeaux a annulé le titre de pension notifié à M. A... le 20 décembre 2022 en tant que ce titre ne tient pas compte de la bonification d'un an, qui s'ajoute à la durée des services effectifs, prévue au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à laquelle M. A... estimait avoir droit en raison de la réduction d'activité qui lui a été octroyée au titre de l'année scolaire 1999-2000 à la suite de la naissance de son troisième enfant le 22 mai 1998.

2. Aux termes de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Aux services effectifs s'ajoutent, dans les conditions déterminées par un décret en Conseil d'Etat, les bonifications ci-après : (...) b) Pour chacun de leurs enfants légitimes et de leurs enfants naturels nés antérieurement au 1er janvier 2004, pour chacun de leurs enfants dont l'adoption est antérieure au 1er janvier 2004 et, sous réserve qu'ils aient été élevés pendant neuf ans au moins avant leur vingt et unième anniversaire, pour chacun des autres enfants énumérés au II de l'article L. 18 dont la prise en charge a débuté antérieurement au 1er janvier 2004, les fonctionnaires et militaires bénéficient d'une bonification fixée à un an, qui s'ajoute aux services effectifs, à condition qu'ils aient (...) réduit leur activité dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat (...) ". Aux termes du 2° de l'article R. 13 du même code, pris pour l'application de ces dispositions, " la réduction d'activité est constituée d'une période de service à temps partiel d'une durée continue d'au moins quatre mois pour une quotité de temps de travail de 50 % de la durée du service que les agents à temps plein exerçant les mêmes fonctions doivent effectuer, d'au moins cinq mois pour une quotité de 60 % et d'au moins sept mois pour une quotité de 70 %. Sont prises en compte les périodes correspondant à un service à temps partiel pris en application des dispositions du premier alinéa de l'article 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat (...) ". Aux termes du premier alinéa de l'article 37 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, désormais codifié à l'article L. 612-3 du code général de la fonction publique : " L'autorisation d'accomplir un travail à temps partiel, selon les quotités de 50 %, 60 %, 70 % et 80 %, est accordée de plein droit aux fonctionnaires à l'occasion de chaque naissance jusqu'au troisième anniversaire de l'enfant ou de chaque adoption jusqu'à l'expiration d'un délai de trois ans à compter de l'arrivée au foyer de l'enfant adopté ". Enfin, l'article R. 911-9 du code de l'éducation, reprenant les dispositions de l'article 1-5 du décret du 20 juillet 1982 fixant les modalités d'application pour les fonctionnaires de l'ordonnance n° 82-696 du 31 mars 1982 relative à l'exercice des fonctions à temps partiel, précise les conditions dans lesquelles l'exercice d'un service à temps partiel accordé de droit est aménagé pour les personnels relevant d'un régime d'obligations de service. Aux termes du 1° de cet article : " Pour les personnels des établissements d'enseignement du second degré relevant d'un régime d'obligations de service défini en heures hebdomadaires, bénéficiant d'un temps partiel de droit, la durée du service est aménagée de façon à obtenir un nombre entier d'heures correspondant à la quotité de temps de travail choisie (...) ".

3. Il résulte des dispositions citées au point précédent que les périodes de réduction d'activité pouvant ouvrir droit au bénéfice de la bonification prévue au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite doivent, d'une part, satisfaire à la condition de durée minimale prévue au 2° de l'article R. 13 du même code, et, d'autre part, être accordées, conformément aux dispositions limitativement énumérées à ce même 2°, dans un délai de trois ans, à l'occasion de la naissance ou de l'adoption d'un enfant, selon la quotité de 50 %, 60 %, 70 % ou 80 % aménagée, le cas échéant, dans les conditions et selon les modalités prévues par l'article R. 911-9 du code de l'éducation pour les professeurs relevant d'un régime d'obligation de service.

4. Il ressort des énonciations non contestées du jugement attaqué qu'à la suite de la naissance de son troisième enfant le 22 mai 1998, M. A..., alors professeur certifié, a effectué au cours de l'année scolaire 1999-2000 un service à temps partiel selon la quotité de 66,67 %. S'il n'a été prévu à l'article 37 bis de la loi du 11 janvier 1984 d'accorder de plein droit à un fonctionnaire de l'Etat la possibilité d'accomplir un travail à temps partiel pour une telle quotité, à l'occasion de chaque naissance d'un enfant, qu'à compter de l'intervention de la loi du 21 août 2003 portant réforme des retraites, il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'ayant estimé, au vu des éléments versés à l'instruction et sans méconnaître les règles de dévolution de la charge de la preuve, que M. A... avait été autorisé à une telle réduction d'activité pour élever son enfant, et en en déduisant qu'il avait ainsi satisfait à la condition de réduction d'activité prévue au b de l'article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite, la magistrate désignée par la présidente du tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique doit être rejeté.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique est rejeté.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à M. B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 7 juin 2024 où siégeaient : M. Jacques-Henri Stahl, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,

Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas, conseillers d'Etat, M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Lionel Ferreira, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 25 juin 2024.

Le président :

Signé : M. Jacques-Henri Stahl

Le rapporteur :

Signé : M. Lionel Ferreira

La secrétaire :

Signé : Mme Fehmida Ghulam

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 475459
Date de la décision : 25/06/2024
Type de recours : Contentieux des pensions

Analyses

48-02-02-03-02-01 PENSIONS. - PENSIONS CIVILES ET MILITAIRES DE RETRAITE. - PENSIONS CIVILES. - LIQUIDATION DE LA PENSION. - SERVICES PRIS EN COMPTE. - BONIFICATIONS. - BONIFICATION D’UN AN À RAISON D’UNE RÉDUCTION D’ACTIVITÉ (B DE L’ART. L. 12 DU CPCMR) – CONDITION DE RÉDUCTION D’ACTIVITÉ – PÉRIODE ANTÉRIEURE À LA LOI DU 21 AOÛT 2003 – PORTÉE.

48-02-02-03-02-01 Les périodes de réduction d’activité pouvant ouvrir droit au bénéfice de la bonification prévue au b de l’article L. 12 du code des pensions civiles et militaires de retraite (CPCMR) doivent, d’une part, satisfaire à la condition de durée minimale prévue au 2° de l’article R. 13 du même code, et, d’autre part, être accordées, conformément aux dispositions limitativement énumérées à ce même 2°, dans un délai de trois ans, à l’occasion de la naissance ou de l’adoption d’un enfant, selon la quotité de 50 %, 60 %, 70 % ou 80 % aménagée, le cas échéant, dans les conditions et selon les modalités prévues par l’article R. 911-9 du code de l’éducation pour les professeurs relevant d’un régime d’obligation de service. ...S’il n’a été prévu à l’article 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 d’accorder de plein droit à un fonctionnaire de l’Etat la possibilité d’accomplir un travail à temps partiel à l’occasion de chaque naissance d’un enfant, qu’à compter de l’intervention de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003, un fonctionnaire qui a été autorisé à une réduction d’activité pour élever son enfant avant l’intervention de cette loi est néanmoins susceptible d’être regardé comme ayant satisfait à la condition de réduction d’activité prévue au b de l’article L. 12 du CPCMR.


Publications
Proposition de citation : CE, 25 jui. 2024, n° 475459
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Lionel Ferreira
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé

Origine de la décision
Date de l'import : 28/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:475459.20240625
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