Vu la procédure suivante :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 7 avril 2023 et 5 avril 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A..., M. C... E... et M. F... D... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'article 7.9. du cahier des charges annexé à la convention conclue entre l'Etat et la société des Autoroutes du Sud de la France (ASF) pour la concession de la construction, de l'entretien et de l'exploitation d'autoroutes dans sa version modifiée par son dix-neuvième avenant, d'une part, en tant qu'il prévoit d'assurer le financement de l'opération d'élargissement de la bretelle autoroutière A680 de liaison entre les autoroutes A68 et A69 par l'utilisation de reliquats d'avantages financiers indus aux concessionnaires et, d'autre part, en tant qu'il prévoit la restitution à l'Etat d'un montant de 83,5 millions d'euros à la stricte condition que le trafic sur la bretelle de liaison soit supérieur à 13 500 véhicules par jour ;
2°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2022-1303 du 10 octobre 2022 approuvant le dix-neuvième avenant à la convention passée entre l'Etat et la société ASF pour la concession de la construction, de l'entretien et de l'exploitation d'autoroutes en tant qu'il approuve cette même clause ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la voirie routière ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexandre Adam, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. MM. A..., E... et D..., qui se prévalent de leur qualité d'usagers d'autoroutes, demandent l'annulation pour excès de pouvoir de l'article 7.9. du cahier des charges annexé à la convention conclue entre l'Etat et la société des Autoroutes du Sud de la France (ASF) pour la concession de la construction, de l'entretien et de l'exploitation d'autoroutes, dans sa version modifiée par son dix-neuvième avenant, d'une part, en tant qu'il prévoit d'assurer le financement de l'opération d'élargissement de la bretelle autoroutière A680 de liaison entre les autoroutes A68 et A69 par l'utilisation de reliquats d'avantages financiers indus aux concessionnaires et, d'autre part, en tant qu'il prévoit la restitution à l'Etat d'un montant de 83,5 millions d'euros à la stricte condition que le trafic sur la bretelle de liaison soit supérieur à 13 500 véhicules par jour. Les requérants demandent également l'annulation pour excès de pouvoir du décret n° 2022-1303 du 10 octobre 2022 approuvant ce dix-neuvième avenant en tant qu'il approuve cette même clause.
Sur les conclusions dirigées contre l'article 7.9. du cahier des charges de la convention :
2. Le dix-neuvième avenant à la convention conclue entre l'Etat et la société ASF pour la concession de la construction, de l'entretien et de l'exploitation d'autoroutes a été publié au Journal officiel de la République française le 11 octobre 2022. Si les requérants ont formé un recours gracieux, le 30 novembre 2022, à l'encontre du décret n° 2022-1303 du 10 octobre 2022 approuvant ce dix-neuvième avenant, ce recours n'a pas interrompu le délai de recours contentieux à l'encontre de cet avenant. Par suite, la société ASF est fondée à soutenir que les conclusions dirigées contre les stipulations de l'article 7.9. du cahier des charges de la convention modifiées par l'avenant en cause, alors que la requête n'a été déposée au secrétariat de la section du contentieux que le 7 avril 2023, sont tardives et par suite irrecevables. Par voie de conséquence, l'intervention de l'Autorité de régulation des transports à l'appui de ces conclusions est irrecevable dans cette mesure.
Sur les conclusions dirigées contre le décret du 10 octobre 2022 :
3. L'autorité de régulation des transports justifie d'un intérêt suffisant à l'annulation du décret attaqué. Ainsi, son intervention est recevable dans cette mesure.
4. Indépendamment du recours de pleine juridiction dont disposent les tiers à un contrat administratif pour en contester la validité, dans les conditions définies par la décision n° 358994 du 4 avril 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, ou du recours pour excès de pouvoir susceptible d'être formé contre les clauses réglementaires d'un tel contrat, les tiers qui se prévalent d'intérêts auxquels l'exécution du contrat est de nature à porter une atteinte directe et certaine sont recevables à contester devant le juge de l'excès de pouvoir la légalité de l'acte administratif portant approbation du contrat, sauf à ce qu'un tel acte intervienne, en réalité, dans le cadre de la conclusion même du contrat. Dans le cadre d'un tel recours, les tiers ne sauraient utilement faire valoir des moyens relatifs au contrat lui-même, mais ne peuvent soulever que des moyens tirés de vices propres entachant l'acte d'approbation, voire demander l'annulation de cet acte par voie de conséquence de ce qui est jugé sur les recours formés contre le contrat.
5. Si les requérants se prévalent du défaut de consultation de l'Autorité de régulation des transports sur le projet d'avenant et de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 122-4 du code de la voirie routière, ces moyens, qui ne sont pas tirés d'un vice propre du décret attaqué, doivent être écartés comme inopérants.
6. Il suit de là, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées par le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et par la société ASF, que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation du décret qu'ils attaquent.
Sur les frais de justice :
7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'intervention de l'Autorité de régulation de régulation des transports est admise en tant qu'elle est présentée au soutien des conclusions dirigées contre le décret du 10 octobre 2022.
Article 2 : La requête de M. A... et autres est rejetée.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. B... A..., premier dénommé, pour l'ensemble des requérants, à la société Autoroutes du Sud de la France, au Premier ministre, au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires et à l'Autorité de régulation des transports.