La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2024 | FRANCE | N°490302

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 07 juin 2024, 490302


Vu la procédure suivante :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision référencée " 48SI " du 10 février 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que les décisions portant retrait de points consécutives à sept infractions commises respectivement les 30 juillet 2017, 2 août 2017, 20 avril 2018, 12 juillet 2019, 30 septembre 2020, 25 avril 2021 et 19 mai 2021, et d'enjoindre au ministre de procéder à la restitution de c

es points. Par un jugement n° 2213352 du 19 octobre 2023, la magistrate dés...

Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision référencée " 48SI " du 10 février 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul, ainsi que les décisions portant retrait de points consécutives à sept infractions commises respectivement les 30 juillet 2017, 2 août 2017, 20 avril 2018, 12 juillet 2019, 30 septembre 2020, 25 avril 2021 et 19 mai 2021, et d'enjoindre au ministre de procéder à la restitution de ces points. Par un jugement n° 2213352 du 19 octobre 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil a annulé les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises le 2 août 2017, le 20 avril 2018 et le 30 septembre 2020 ainsi que la décision référencée " 48SI ", enjoint au ministre de restituer à M. B... le bénéfice de dix points sur le capital de points de son permis de conduire dans un délai de deux mois et d'en tirer les conséquences sur son droit à conduire et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Par un pourvoi, enregistré le 19 décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. B....

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Amel Hafid, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler les décisions de retrait de points sur son permis de conduire consécutives aux infractions des 30 juillet 2017, 2 août 2017, 20 avril 2018, 12 juillet 2019, 30 septembre 2020, 25 avril 2021 et 19 mai 2021, et la décision référencée " 48 SI " du 10 février 2022 par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nul. Par un jugement du 19 octobre 2023, contre lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a annulé les décisions de retrait de points consécutives aux infractions commises le 2 août 2017, le 20 avril 2018 et le 30 septembre 2020 ainsi que la décision constatant la perte de validité du permis de conduire.

Sur les retraits de points consécutifs aux infractions du 2 août 2017 et du 20 avril 2018 :

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que, dans son mémoire en défense devant le tribunal administratif de Montreuil, le ministre de l'intérieur a fait valoir, sans être contesté, que les infractions du 2 août 2017 et du 20 avril 2018 avaient été constatées par procès-verbaux électroniques, que des avis de contravention avaient été adressés à M. B... les 6 septembre 2017 et 30 avril 2018, et que celui-ci avait formé des requêtes en exonération, ainsi que le permet l'article L. 529-2 du code de procédure pénale, reçues par l'administration les 2 octobre 2017 et 14 mai 2018. Pour justifier de ces circonstances, il a produit le relevé intégral d'information de l'intéressé, les procès-verbaux d'infraction, ainsi que deux documents datés du 4 avril 2018 et du 21 juillet 2018 intitulés " dossier transmis à Monsieur l'officier du ministère public ", faisant apparaître que les requêtes en exonération avaient été formées au moyen des formulaires attachés aux avis de contravention. Il a soutenu que ces circonstances étaient de nature à établir que le conducteur avait nécessairement reçu cet avis et devait, dès lors, être regardé comme ayant bénéficié de l'information préalable prévue par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route qu'il renferme, l'intéressé ne soutenant pas que cet avis aurait été incorrect ou incomplet. Dans ces conditions, en estimant que le ministre n'apportait pas la preuve que M. B... avait reçu l'avis de contravention et pris connaissance des informations que ce document comportait, le tribunal administratif de Montreuil a dénaturé les faits et pièces du dossier qui lui étaient soumis.

Sur le retrait de points consécutif à l'infraction du 30 septembre 2020 :

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le procès-verbal électronique établi à la suite de l'infraction commise le 30 septembre 2020 ne comporte pas la signature de M. B.... Si le ministre soutient que celui-ci l'avait effectivement signé et que l'absence de facsimile de cette signature sur l'édition du procès-verbal électronique ne résultait que d'une difficulté d'ordre technique, il n'assortit cette allégation d'aucun élément probant. En jugeant que la preuve de la signature du procès-verbal électronique par l'intéressé n'était pas rapportée, de sorte que le ministre de l'intérieur et des outre-mer n'avait pas démontré que l'information préalable requise par les dispositions des articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route avait été délivrée à M. B..., le tribunal administratif a porté sur les faits et pièces du dossier qui lui étaient soumis une appréciation souveraine, exempte de dénaturation, qui ne peut être utilement discutée devant le juge de cassation. Il n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la décision de retrait de point consécutive à l'infraction commise le 30 septembre 2020 est intervenue au terme d'une procédure irrégulière, dès lors qu'il n'a pas été démontré que le contrevenant n'a pas été privé de la garantie d'information prévue par la loi.

Sur la perte de validité du permis de conduire et les conclusions à fin d'injonction :

4. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que le ministre n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant que ce jugement annule le retrait de point effectué à la suite de l'infraction du 30 septembre 2020. Ce motif justifie à lui seul l'annulation de la décision référencée " 48 SI " constatant la perte de validité du permis de conduire de M. B... pour solde de points nuls.

5. Il résulte de ce qui précéde que le ministre de l'intérieur et des outre-mer est seulement fondé à demander l'annulation du jugement qu'il attaque en tant qu'il annule les retraits de points consécutifs aux infractions du 2 août 2017 et du 20 avril 2018 et lui enjoint de rétablir les points correspondant à ces retraits sur le capital de points du permis de conduire.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 19 octobre 2023 de la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé en tant que, par son article 1er, il annule les retraits de points consécutifs aux infractions du 2 août 2017 et du 20 avril 2018 et que, par son article 2, il enjoint au ministre de l'intérieur et des outre-mer de rétablir sur le permis de conduire de M. B... les points correspondant à ces retraits.

Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Montreuil dans la mesure de la cassation prononcée à l'article 1er.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 16 mai 2024 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et Mme Amel Hafid, maîtresse des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 7 juin 2024.

Le président :

Signé : M. Alain Seban

La rapporteure :

Signé : Mme Amel Hafid

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 490302
Date de la décision : 07/06/2024

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2024, n° 490302
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Amel Hafid
Rapporteur public ?: M. Maxime Boutron

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:490302.20240607
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award