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07/06/2024 | FRANCE | N°468755

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 07 juin 2024, 468755


Vu la procédure suivante :



M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 29 juillet 2021 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a déclaré irrecevable la demande de réexamen de sa demande d'asile. Par une décision n° 21045194 du 5 septembre 2022, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et lui a renvoyé la demande de réexamen du requérant.



Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 nov

embre 2022 et 7 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, l'Office fran...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 29 juillet 2021 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a déclaré irrecevable la demande de réexamen de sa demande d'asile. Par une décision n° 21045194 du 5 septembre 2022, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et lui a renvoyé la demande de réexamen du requérant.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 7 novembre 2022 et 7 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile.

L'Office français de protection des réfugiés et apatrides soutient que la décision qu'il attaque est entachée :

- d'erreur de droit, en ne retenant pas que la protection subsidiaire accordée au demandeur par les autorités italiennes s'opposait à ce qu'il puisse solliciter la protection de la France ;

- d'insuffisance de motivation et de dénaturation des pièces du dossier, d'une part en ne justifiant pas pourquoi la protection dont bénéficiait le demandeur en Italie ne serait pas effective, d'autre part en ne précisant pas les éléments sur lesquels elle s'est fondée, autres que le retour des talibans au pouvoir en Afghanistan, pour considérer la demande recevable ;

- d'erreur de droit, en estimant que le retour des talibans au pouvoir en août 2021 était un élément nouveau devant être pris en compte dans l'analyse de la demande de réexamen, alors que cette circonstance était sans incidence s'agissant d'un demandeur s'étant vu octroyer le bénéfice de la protection subsidiaire par un Etat membre de l'Union européenne.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 août 2023, M. A... conclut au rejet du pourvoi et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'OFPRA, à verser à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, Goulet, son avocat, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il soutient que les moyens soulevés par l'OFPRA ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que, par une décision du 29 juillet 2021, l'OFPRA a déclaré irrecevable la demande de réexamen de sa demande d'asile présentée par M. A..., ressortissant afghan, en application des dispositions des articles L. 531-32 et L. 531-42 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. L'OFPRA se pourvoit en cassation contre la décision du 5 septembre 2022 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a annulé sa décision et lui a renvoyé la demande de réexamen de la demande d'asile de M. A....

2. Aux termes de l'article L. 531-32 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'Office français de protection des réfugiés et apatrides peut prendre une décision d'irrecevabilité écrite et motivée, sans vérifier si les conditions d'octroi de l'asile sont réunies, dans les cas suivants : / 1° Lorsque le demandeur bénéficie d'une protection effective au titre de l'asile dans un État membre de l'Union européenne ; / 2° Lorsque le demandeur bénéficie du statut de réfugié et d'une protection effective dans un État tiers et y est effectivement réadmissible ; / 3° En cas de demande de réexamen lorsque, à l'issue d'un examen préliminaire effectué selon la procédure définie à l'article L. 531-42, il apparaît que cette demande ne répond pas aux conditions prévues au même article ". L'article L. 531-42 du même code dispose : " A l'appui de sa demande de réexamen, le demandeur indique par écrit les faits et produit tout élément susceptible de justifier un nouvel examen de sa demande d'asile. / L'Office français de protection des réfugiés et apatrides procède à un examen préliminaire des faits ou des éléments nouveaux présentés par le demandeur intervenu après la décision définitive prise sur une demande antérieure ou dont il est avéré qu'il n'a pu en avoir connaissance qu'après cette décision. / Lors de l'examen préliminaire, l'office peut ne pas procéder à un entretien. / Lorsque, à la suite de cet examen préliminaire, l'office conclut que ces faits ou éléments nouveaux n'augmentent pas de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection, il peut prendre une décision d'irrecevabilité ".

3. Il ressort des pièces du dossier soumis du dossier à la Cour nationale du droit d'asile que, pour justifier sa décision d'irrecevabilité, l'OFPRA a, premièrement, relevé que les éléments présentés par M. A... sur sa situation vis-à-vis de son pays d'origine étaient les mêmes que lors de sa première demande, deuxièmement, rappelé que l'OFPRA et la CNDA n'avaient pas eu à se prononcer sur ces éléments lors de leur examen de cette première demande, compte tenu du fait qu'il bénéficiait de la protection subsidiaire accordée par l'Italie, troisièmement, estimé que rien au dossier ne permettait d'établir que cette protection ne serait pas effective.

4. En se bornant, pour annuler la décision d'irrecevabilité de l'OFPRA, à affirmer que M. A... présentait, à l'appui de sa demande de réexamen, des faits nouveaux augmentant de manière significative la probabilité qu'il justifie des conditions requises pour bénéficier d'une protection, sans avoir préalablement constaté qu'il ne bénéficiait pas d'une protection subsidiaire effective en Italie ou que celle-ci n'était plus active, la Cour a entaché sa décision d'erreur de droit et d'insuffisance de motivation.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'Office est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 5 septembre 2022 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. B... A....

Délibéré à l'issue de la séance du 25 avril 2024 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Rozen Noguellou, conseillère d'Etat et Mme Sophie Delaporte, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 7 juin 2024.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

La rapporteure :

Signé : Mme Sophie Delaporte

La secrétaire :

Signé : Mme Sylvie Leporcq


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 468755
Date de la décision : 07/06/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 jui. 2024, n° 468755
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie Delaporte
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo
Avocat(s) : SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO & GOULET ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:468755.20240607
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