Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler pour excès de pouvoir, d'une part, la décision rejetant comme irrecevable sa candidature au poste de professeur des universités ouvert sous le numéro 4355 par l'université de Reims Champagne-Ardenne, révélée par un courriel d'information du 17 juillet 2019 et, d'autre part, par voie de conséquence, la décision par laquelle le comité de sélection ne l'a pas classé sur la liste des candidats à auditionner. Par une ordonnance n° 1901963 du 19 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 20NC02435 du 14 novembre 2023, la cour administrative d'appel de Nancy a, d'une part, annulé le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne et, d'autre part, transmis la requête au Conseil d'Etat, en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative.
Par une demande et un mémoire complémentaire, enregistrés au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne les 2 août et 6 novembre 2019, et une requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 20 août 2020, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision rejetant comme irrecevable sa candidature au poste de professeur des universités ouvert sous le numéro 4355 par l'université de Reims Champagne-Ardenne et, par voie de conséquence, la décision par laquelle le comité de sélection ne l'a pas classé sur la liste des candidats à auditionner ;
2°) d'enjoindre à l'université de Reims Champagne-Ardenne de réexaminer sa candidature et de reprendre la procédure de recrutement ;
3°) d'enjoindre à l'université de Reims Champagne-Ardenne de lui communiquer la décision rejetant sa candidature comme irrecevable, la décision de non-classement sur la liste des candidats ainsi que la décision de non-audition par le comité de sélection ;
4°) de préserver à titre conservatoire ses droits dans l'hypothèse où le Conseil d'Etat annulerait la décision de refus d'inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités établie par le Conseil national des universités ;
5°) de mettre à la charge de l'université de Reims Champagne-Ardenne la somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
M. B... soutient que la décision attaquée est entachée :
- d'insuffisance de motivation ;
- de méconnaissance des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration en ce qu'elle ne comporte ni la signature, ni le nom de son auteur ;
-d'erreur de droit en ce qu'elle apprécie la condition d'inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités à la date de clôture des inscriptions au concours et, ce faisant, méconnait les dispositions du décret n° 84-431 du 6 juin 1984.
Il soutient également, par la voie de l'exception d'illégalité, que l'article 9 de de l'arrêté du 13 février 2015 relatif aux modalités générales des opérations de mutation, de détachement et de recrutement par concours des professeurs des universités méconnaît le principe constitutionnel d'égalité.
Il soutient enfin que la décision par laquelle le comité de sélection ne l'a pas classé sur la liste des candidats à auditionner est entachée d'irrégularité dès lors qu'il n'a pas été informé de la date d'audition ou du refus de son audition.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2019 devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, et un nouveau mémoire, enregistré le 17 septembre 2020 devant la cour administrative d'appel de Nancy, l'université de Reims Champagne-Ardenne conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient, à titre principal, que la requête n'est pas recevable dès lors que le courriel d'information du 17 juillet 2019 n'a pas le caractère d'une décision susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir et, à titre subsidiaire, que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Cécile Fraval, maîtresse des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier que M. B..., maître de conférences à l'université Jean Moulin Lyon III, s'est porté candidat au poste de professeur des universités ouvert au sein de l'université de Reims Champagne-Ardenne, en droit public sous le numéro 4355, en application des dispositions du 1° de l'article 46 du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences. Par un courriel du 17 juillet 2019 de la direction des ressources humaines de cette université, M. B... a été informé de ce que sa candidature a été considérée comme irrecevable dès lors qu'il n'était pas inscrit sur une liste de qualification aux fonctions de professeur des universités établie par le Conseil national des universités et que, en conséquence, son dossier de candidature n'a pas été transmis au comité de sélection. M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler pour excès de pouvoir la décision rejetant sa candidature comme irrecevable, révélée par le courriel d'information du 17 juillet 2019 ainsi que, par voie de conséquence, la décision par laquelle le comité de sélection ne l'a pas classé sur la liste des candidats à auditionner. Par une ordonnance du 19 juin 2020, le tribunal administratif a rejeté sa demande. Sur appel de M. B..., la cour administrative d'appel de Nancy a, par un arrêt en date du 14 novembre 2023, annulé le jugement du tribunal administratif au motif qu'il n'était pas compétent pour connaître de ce litige et a transmis la requête au Conseil d'Etat en application de l'article R. 351-2 du code de justice administrative.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 (...) ".
3. La décision par laquelle une université qui organise un concours pour le recrutement sur un poste de professeur des universités déclare une candidature irrecevable n'est pas au nombre des décisions visées au 7° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration qui doivent en application de ces mêmes dispositions être motivées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ne peut qu'être écarté comme inopérant.
4. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci (...) ". La seule circonstance que le courriel d'information en date du 17 juillet 2019 adressé à M. B... par les services de la direction des ressources humaines de l'université de Reims Champagne-Ardenne ne comportait pas les mentions prévues par l'article L. 212-1 du code précité pour les décisions prises par l'administration n'est pas de nature à entacher d'illégalité la décision attaquée.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 20 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, dans sa version applicable au litige : " (...) Les candidats aux concours doivent remplir les conditions générales prévues aux articles 5 et 5 bis du titre Ier du statut général et par le statut particulier du corps auxquels ils postulent au plus tard à la date de la première épreuve du concours ou, s'il s'agit d'un concours comprenant un examen des titres des candidats, à la date de la première réunion du jury chargé de la sélection des dossiers, sauf indications contraires dans le statut particulier du corps concerné (....) ". Aux termes de l'article 43 du décret du 6 juin 1984 fixant les dispositions statutaires communes applicables aux enseignants-chercheurs et portant statut particulier du corps des professeurs des universités et du corps des maîtres de conférences, dans sa version applicable au litige : " Pour pouvoir se présenter aux concours prévus aux 1°, 2° et 4° de l'article 46 du présent décret, les candidats doivent être inscrits sur une liste de qualification aux fonctions de professeur des universités établie par le Conseil national des universités (...) / Toutefois, les candidats exerçant ou ayant cessé d'exercer depuis moins de dix-huit mois une fonction d'enseignant-chercheur, d'un niveau équivalent à celui de l'emploi à pourvoir, dans un établissement d'enseignement supérieur d'un Etat autre que la France sont dispensés de l'inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeurs. Le conseil académique ou, dans les établissements non dotés d'un conseil académique, le conseil scientifique ou l'organe en tenant lieu de l'établissement se prononce sur le rapport de deux spécialistes de la discipline concernée de niveau au moins équivalent à celui de l'emploi à pourvoir, dont un extérieur à l'établissement, sur les titres et travaux des intéressés, ainsi que sur le niveau des fonctions sur la base de la grille d'équivalence établie par le ministre chargé de l'enseignement supérieur, et transmet les dossiers de candidatures recevables au comité de sélection (...) ". Aux termes des dispositions de l'article 9 de l'arrêté du 13 février 2015 relatif aux modalités générales des opérations de mutation, de détachement et de recrutement par concours des professeurs des universités, dans sa version applicable au litige : " La validité de la qualification aux fonctions de professeur des universités établie par le Conseil national des universités (...) est appréciée à la date de clôture des inscriptions au concours ouvert pour chaque emploi ".
6. Il résulte des dispositions citées au point précédent, qui, contrairement à ce que soutient le requérant, ne sont pas contraires au principe d'égalité, que le statut particulier du corps des professeurs des universités, dans sa version applicable au litige, prévoit que l'inscription sur la liste de qualification aux fonctions de professeur des universités doit être effective avant la transmission du dossier de candidature au comité de sélection. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le respect de cette condition devait être apprécié à la date de la première réunion du comité de sélection constitué pour pourvoir l'emploi ouvert au concours. Il s'ensuit que le moyen tiré de ce que la décision rejetant sa candidature comme irrecevable sur le poste ouvert au concours serait entachée d'erreur de droit pour ce motif doit être écarté.
7. En quatrième lieu, il résulte de ce qui précède que M. B... ne peut utilement soutenir, par la voie de l'exception, que l'article 9 de de l'arrêté du 13 février 2015 relatif aux modalités générales des opérations de mutation, de détachement et de recrutement par concours des professeurs des universités méconnaît le principe constitutionnel d'égalité.
8. En cinquième et dernier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision du comité de sélection n'ayant pas informé M. B... de la date d'audition ou du refus d'audition est entachée d'irrégularité ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.
9. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la fin de non-recevoir opposée par l'université de Reims Champagne-Ardenne, que M. B... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision rejetant sa candidature comme irrecevable, révélée par le courriel d'information du 17 juillet 2019, ni, par voie de conséquence, de la décision ne le classant pas sur la liste des candidats à auditionner. Par suite et en tout état de cause, ses conclusions aux fins d'injonction sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. B... la somme de 3 000 euros à verser à l'université de Reims Champagne-Ardenne au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera la somme de 3 000 euros à l'université de Reims Champagne-Ardenne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à l'université de Reims Champagne-Ardenne.
Copie en sera adressée à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.