Vu la procédure suivante :
Par une décision n° 463548 du 17 mars 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a prononcé une astreinte de 500 euros par jour de retard à l'encontre de l'Etat, s'il ne justifiait pas, dans les trois mois suivant la notification de cette décision, avoir exécuté sa décision n° 416546 du 13 novembre 2019 par laquelle il a, d'une part, annulé la décision du haut-commissaire de la République en Polynésie française du 2 novembre 2016, en tant qu'elle traduit le refus du pouvoir réglementaire d'édicter les mesures qu'implique nécessairement l'application des articles L. 471-5 et L. 564-3 du code de l'action sociale et des familles en Polynésie française et, enjoint au Premier ministre de prendre les mesures réglementaires qu'implique nécessairement l'application de ces dispositions, et d'autre part, renvoyer M. B... devant les services de l'Etat compétents en Polynésie française pour qu'il soit procédé à la liquidation de la somme qui lui était due.
La section du rapport et des études du Conseil d'Etat a exécuté les diligences qui lui incombent en vertu de l'article R. 931-7 du code de justice administrative.
Par une lettre en date du 16 juin 2023, la présidente de la section du rapport et des études a demandé à la Première ministre et au ministre de la santé et de la prévention de lui faire connaître, sous un mois, les mesures qui ont été prises pour assurer l'exécution de la décision du 17 mars 2023.
Par un courrier du 26 juin 2023, le ministre de la santé et de la prévention, d'une part, a informé la présidente de la section du rapport et des études de la publication, au Journal officiel de la République française du 28 mai 2023, des décrets n° 2023-411 et n° 2023-412 du 26 mai 2023 portant adaptation à Wallis-et-Futuna et en Polynésie française des dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à la protection juridique des majeurs et, d'autre part, a demandé que l'astreinte ne soit pas liquidée.
Le courrier du 26 juin 2023 a été communiqué à M. A... B... qui n'a pas produit d'observations.
Par un mémoire, enregistré au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 21 décembre 2023, le ministre de la santé et de la prévention conclut à ce que l'astreinte ne soit pas liquidée. Il soutient que, compte tenu de la publication des deux décrets du 26 mai 2023 et du paiement des sommes dues à M. B..., la décision n° 416546 du 13 novembre 2019 doit être regardée comme ayant été entièrement exécutée.
La note du 24 août 2023 que la présidente de la section du rapport et des études a adressée à la présidente de la 6ème chambre de la section du contentieux a été communiquée à la Première ministre, au garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre de l'intérieur et des outre-mer, au haut-commissaire de la République en Polynésie française et à M. A... B... qui n'ont pas produit d'observations.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le décret n° 2023-411 du 26 mai 2023 ;
- le décret n° 2023-412 du 26 mai 2023 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes,
- les conclusions de M. Frédéric Puigserver, rapporteur public ;
Considérant ce qui suit :
1. Par une décision du 13 novembre 2019, rendue sur la requête de M. B..., le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, d'une part, annulé la décision du haut-commissaire de la République en Polynésie française du 2 novembre 2016, en tant qu'elle traduit le refus du pouvoir réglementaire d'édicter les mesures qu'implique nécessairement l'application des articles L. 471-5 et L. 564-3 du code de l'action sociale et des familles en Polynésie française et enjoint au Premier ministre de prendre les mesures réglementaires correspondantes, dans un délai de six mois à compter de la notification de cette décision et, d'autre part, renvoyer M. B..., devant les services de l'Etat, compétents en Polynésie française pour qu'il soit procédé à la liquidation de la somme qui lui était due.
2. Par une décision du 17 mars 2023, le Conseil d'Etat statuant au contentieux, constatant que l'Etat n'avait pas pris les mesures propres à assurer l'exécution de la décision du 13 novembre 2019, d'une part, a prononcé une astreinte à l'encontre de l'Etat, s'il ne justifiait pas, dans les trois mois suivant la notification de cette décision, avoir exécuté la décision du 13 novembre 2019 et, d'autre part, a fixé le taux de cette astreinte à 500 euros par jour à compter de l'expiration du délai de trois mois suivant la notification de sa décision.
3. Aux termes de l'article L. 911-7 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée ". En vertu de l'article R. 931-7 du même code : " Lorsque le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé une astreinte, (...) la chambre compétente transmet le dossier à la section du rapport et des études. / A compter de la date d'effet de l'astreinte, la section du rapport et des études, après avoir accompli le cas échéant de nouvelles diligences et après saisine éventuelle du comité restreint mentionné au troisième alinéa de l'article R. 931-3, fait part à la section du contentieux de l'état d'avancement de l'exécution de la décision. La section du contentieux statue sur la liquidation de l'astreinte ".
4. Il ressort des pièces du dossier que la décision du 17 mars 2023 a été notifiée le même jour à M. B..., ainsi qu'à la Première ministre, au ministre de la santé et de la prévention, au garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au haut-commissaire de la République en Polynésie française.
5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le ministre de la santé et de la prévention a informé la section du rapport et des études, dans le cadre de ses diligences, de la publication de deux décrets du 26 mai 2023 portant adaptation à Wallis-et-Futuna et en Polynésie française des dispositions du code de l'action sociale et des familles relatives à la protection juridique des majeurs. Ces deux décrets, publiés au Journal officiel de la République française du 28 mai 2023, soit dans le délai de trois mois à compter de la notification de la décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux du 17 mars 2023 précitée, ont pour objet d'étendre et d'adapter en Polynésie française les dispositions applicables en métropole à la protection juridique des majeurs, notamment celles permettant de déterminer la rémunération du mandataire judiciaire à la protection des majeurs exerçant son activité à titre individuel et les conditions dans lesquelles il est susceptible de percevoir une rémunération complémentaire versée par l'Etat.
6. En deuxième lieu, il ressort des pièces transmises par le ministre de la santé et de la prévention, notamment des états liquidatifs produits, que M. B... a, pour l'exécution de la décision du 13 novembre 2019, perçu, d'une part, des sommes respectives de 357 857,40 euros au titre des années 2016 à 2019, 106 607 euros au titre de l'année 2020, 102 980,45 euros au titre de l'année 2021 et 103 783 euros au titre de l'année 2022 de la part du haut-commissariat de la République en Polynésie française et, d'autre part, la somme de 3 023,84 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de la part de l'Etat.
7. Il résulte de tout ce qui précède que les décisions du Conseil d'Etat statuant au contentieux des 13 novembre 2019 et 17 mars 2023 doivent être regardées comme ayant été exécutées. Il n'y a, dès lors, pas lieu de procéder à la liquidation de l'astreinte.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre de l'Etat.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A... B..., au Premier ministre, à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, au garde des sceaux, ministre de la justice, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au haut-commissaire de la République en Polynésie française.
Copie en sera adressée à la section des études, de la prospective et de la coopération.
Délibéré à l'issue de la séance du 4 avril 2024 où siégeaient : M. Stéphane Hoynck, assesseur, présidant ; M. Cyril Roger-Lacan, conseiller d'Etat et Mme Stéphanie Vera, maîtresse des requêtes-rapporteure.
Rendu le 6 mai 2024.
Le président :
Signé : M. Stéphane Hoynck
La rapporteure :
Signé : Mme Stéphanie Vera
La secrétaire :
Signé : Mme Laïla Kouas