Vu la procédure suivante :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 10 mai 2021 par laquelle la directrice de la caisse d'allocations familiales de la Gironde a refusé de lui accorder l'allocation de logement sociale à compter du 1er janvier 2021. Par un jugement n° 2103691 du 16 mai 2022, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 novembre 2022 et 2 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Sevaux, Mathonnet, son avocat, au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la construction et de l'habitation ;
- le code général des impôts ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat,
- les conclusions de M. Maxime Boutron, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Sevaux, Mathonnet, avocat de Mme A... et à la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de la caisse d'allocations familiales de la Gironde.
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que par une décision du 22 février 2021, la directrice de la caisse d'allocations familiales de la Gironde a mis fin, à compter du 1er janvier 2021, au versement de l'allocation de logement sociale dont bénéficiait antérieurement Mme A... au motif que les ressources perçues par l'intéressée pendant la période de référence dépassaient le plafond prévu pour l'octroi de cette allocation. Mme A... se pourvoit en cassation contre le jugement du 16 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 10 mai 2021 par laquelle la directrice de la caisse d'allocations familiales a rejeté son recours administratif.
2. D'une part, aux termes de l'article L. 823-1 du code de la construction et de l'habitation : " Le montant des aides personnelles au logement est calculé en fonction d'un barème défini par voie réglementaire. Ce barème est établi en prenant en considération : 1° La situation de famille du demandeur (...) ; 2° Ses ressources et la valeur en capital de son patrimoine (...) ; 3° Le montant du loyer payé (...) ". Selon l'article R. 822-3 du même code : " Les ressources et les charges prises en compte pour le calcul de l'aide personnelle au logement sont appréciées, tous les trois mois, (...), selon les périodes de référence suivantes : 1° Pour les ressources mentionnées à l'article R. 822-4 (...), sur une période de référence courant du treizième au deuxième mois précédant la date d'ouverture ou de réexamen du droit à l'aide personnelle au logement (...) ". Et selon le I de l'article R. 822-4 : " Les ressources prises en compte s'entendent du total des revenus nets catégoriels retenus pour l'établissement de l'impôt sur le revenu (...) ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 163-0 A du code général des impôts : " (...) II. - Lorsqu'au cours d'une année un contribuable a eu, par suite de circonstances indépendantes de sa volonté, la disposition d'un revenu correspondant, par la date normale de son échéance, à une ou plusieurs années antérieures, l'intéressé peut demander que l'impôt correspondant à ce revenu différé net soit calculé en divisant son montant par un coefficient égal au nombre d'années civiles correspondant aux échéances normales de versement augmenté de un, en ajoutant à son revenu net global imposable le quotient ainsi déterminé, puis en multipliant par ce même coefficient la cotisation supplémentaire ainsi obtenue ".
4. Ni les dispositions du I de l'article R. 822-4 du code de la construction et de l'habitation citées au point 2, ni aucune autre disposition de ce code ne prévoient que, pour l'appréciation de la condition de ressources à laquelle les dispositions de l'article R. 822-3 subordonnent le bénéfice des aides personnalisées au logement, les éventuels revenus différés perçus pendant la période de référence ne devraient être pris en compte que pour partie. Si les dispositions du II de l'article 163-0 A du code général des impôts citées au point 3 prévoient, aux fins d'atténuer les effets de la progressivité de l'impôt sur le revenu en cas de perception par un contribuable d'un revenu différé, que l'impôt dû au titre de l'année où ce revenu a été perçu est déterminé selon la méthode de calcul dite du " quotient " qu'elles instituent, il n'en résulte pas que tout ou partie de ce revenu différé soit déduit de la base taxable à l'impôt sur le revenu établi au titre de l'année de sa perception. Les revenus différés restent donc des revenus nets catégoriels retenus en totalité pour l'établissement de l'impôt sur le revenu au titre de la période de référence et sont ainsi, comme il a été dit, pris en compte sur la période de référence pour le calcul des aides personnelles au logement.
5. Il ressort des énonciations du jugement attaqué que le montant total des revenus nets catégoriels perçus par Mme A... au cours de la période de référence courant du mois de décembre 2019 au mois de novembre 2020 excédait le plafond de ressources au-delà duquel aucune aide n'est due, du fait que cette somme incluait plusieurs rappels de pension de retraite dus au titre des mois de février 2018 à novembre 2019. Il résulte de ce qui est dit au point 4 que ces revenus différés devaient être pris en compte en totalité dans les ressources retenues pour déterminer les droits de Mme A..., ainsi que l'a jugé, sans commettre d'erreur de droit, le tribunal administratif de Bordeaux.
6. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi de Mme A... doit être rejeté, y compris ses conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la directrice de la caisse d'allocations familiales de la Gironde au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme A... est rejeté.
Article 2 : Les conclusions de la directrice de la caisse d'allocations familiales de la Gironde présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et à la directrice de la caisse d'allocations familiales de la Gironde.
Copie en sera adressée au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
Délibéré à l'issue de la séance du 25 mars 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; Mme Isabelle de Silva, présidente de chambre ; M. Jean-Philippe Mochon, président de chambre ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat ; M. Alain Seban, M. Cyril Roger-Lacan, M. Laurent Cabrera, M. Stéphane Hoynck, conseillers d'Etat et Mme Sylvie Pellissier, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 30 avril 2024.
Le président :
Signé : M. Rémy Schwartz
La rapporteure :
Signé : Mme Sylvie Pellissier
Le secrétaire :
Signé : M. Bernard Longieras