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24/04/2024 | FRANCE | N°474878

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 24 avril 2024, 474878


Vu la procédure suivante :



Mme B... A... a demandé à la cour administrative d'appel de Lyon d'assurer l'exécution, d'une part, de l'arrêt n° 20LY00445, 20LY00455 du 30 septembre 2021 par lequel cette cour, réformant le jugement n° 1606905 du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble, a porté à la somme de 164 646,49 euros assortie d'une rente trimestrielle de 5 828,40 euros le montant que le centre hospitalier universitaire de Grenoble a été condamné à lui verser en réparation de sa prise en charge fautive par cet établissement hospital

ier et, d'autre part, du jugement du 3 décembre 2019 du tribunal administrat...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé à la cour administrative d'appel de Lyon d'assurer l'exécution, d'une part, de l'arrêt n° 20LY00445, 20LY00455 du 30 septembre 2021 par lequel cette cour, réformant le jugement n° 1606905 du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble, a porté à la somme de 164 646,49 euros assortie d'une rente trimestrielle de 5 828,40 euros le montant que le centre hospitalier universitaire de Grenoble a été condamné à lui verser en réparation de sa prise en charge fautive par cet établissement hospitalier et, d'autre part, du jugement du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble dans la mesure où il n'avait pas été réformé par cet arrêt. Par un arrêt n° 22LY02038 du 7 avril 2023, la cour administrative d'appel a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 7 juin et 7 septembre 2023 et le 15 mars 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande d'exécution et de condamner le centre hospitalier universitaire de Grenoble à lui verser la somme de 6 473,95 euros, correspondant à sa créance au 31 mars 2024, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et associés, avocat de Mme A... et à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat du centre hospitalier universitaire de Grenoble.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt du 30 septembre 2021 la cour administrative d'appel de Lyon, réformant le jugement du 3 décembre 2019 du tribunal administratif de Grenoble, a condamné le centre hospitalier universitaire de Grenoble à verser à Mme A..., en réparation de préjudices subis du fait de sa prise en charge dans cet établissement, la somme de 164 646,49 euros ainsi qu'une rente trimestrielle d'un montant de 5 828,40 euros. Cet arrêt précisait, s'agissant de cette rente, que son montant serait revalorisé en fonction des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et que les sommes perçues par Mme A... au titre de la prestation de compensation du handicap ainsi que les sommes correspondant aux périodes au cours desquelles elle serait hébergée dans un établissement lui fournissant l'assistance qui lui est nécessaire en seraient, le cas échéant, déduites. Mme A... a saisi le président de la cour administrative d'appel de Lyon d'une demande d'exécution de cet arrêt, en faisant valoir que le centre hospitalier et son assureur ne lui avaient pas versé l'intégralité des sommes qui lui revenaient. Elle demande l'annulation de l'arrêt du 7 avril 2023 par lequel la cour administrative d'appel a rejeté sa requête.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'au soutien de sa demande d'exécution de l'arrêt du 30 septembre 2021, Mme A... faisait notamment valoir que, pour calculer les montants qui lui étaient dus au titre de ses rentes trimestrielles, le centre hospitalier avait déduit du montant de la rente allouée par la cour une somme de 467,39 euros par mois, correspondant au plan d'aide théorique de 21,8 heures d'intervention par mois approuvé par le département de l'Isère, alors qu'il aurait dû prendre en compte les sommes réellement exposées au profit du prestataire d'aide à domicile, qui n'assurait en fait qu'un nombre d'heures moins important. Elle produisait à cet effet, outre la décision du président du conseil départemental de l'Isère du 14 février 2020 relative au montant théorique de sa prestation de compensation du handicap, les factures mensuelles émanant de son prestataire d'aide à domicile, faisant état du nombre d'heures effectuées à son profit. En rejetant la demande d'exécution de Mme A... au motif que celle-ci ne justifiait pas du montant qu'elle avait perçu au titre de la prestation de compensation du handicap, alors qu'il ressortait de ses écritures qu'elle avait opté pour un versement de cette prestation directement au prestataire d'aide à domicile et qu'elle ne disposait d'aucun autre document que les factures de ce prestataire, qu'elle produisait, pour attester du montant dont elle bénéficiait à ce titre, la cour administrative d'appel, à laquelle il appartenait de faire usage, le cas échéant, de ses pouvoirs d'instruction si elle souhaitait s'assurer qu'aucune autre somme n'était versée par le département de l'Isère au profit de l'intéressée, a méconnu son office et commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé en tant qu'il statue sur la rente trimestrielle allouée à la requérante.

3. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

4. Il résulte de l'instruction que 9 476,06 euros ont été effectivement versés à Mme A... par le département de l'Isère au titre de la prestation de compensation du handicap pour la période courant du 1er octobre 2021 au 31 mars 2024, sous la forme, jusqu'au 30 septembre 2023, du remboursement à son prestataire d'aide à domicile des heures d'assistance effectuées à son profit et, depuis le 1er octobre 2023, d'une somme forfaitaire de 306,02 euros mensuels. Il résulte également de l'instruction qu'elle n'a pas, au cours de cette période, été hébergée en établissement. Par suite, compte tenu du montant trimestriel de la rente fixé par l'arrêt du 30 septembre 2021 de la cour administrative d'appel de Lyon, et des revalorisations du taux horaire d'assistance à tierce personne intervenues à hauteur de 1,8% au 1er avril 2022 et de 5,6% au 1er avril 2023, le centre hospitalier universitaire Grenoble, aurait dû verser à Mme A..., pour les trimestres échus au 31 décembre 2023, la somme totale de 46 429,16 euros, après déduction des montants perçus au titre de la prestation de compensation du handicap. Il résulte également de l'instruction que le centre hospitalier lui a versé la somme de 45 823,72 euros au titre de cette rente trimestrielle pour la période considérée. Par suite, il y a lieu de condamner le centre hospitalier universitaire de Grenoble à verser à Mme A... la différence entre ces deux sommes, qui se monte à 605,44 euros, afin d'assurer, au 31 décembre 2023, l'exécution de l'arrêt du 30 septembre 2021. En revanche, il n'y a pas lieu, eu égard à la date de clôture de l'instruction dans la présente instance, d'enjoindre au centre hospitalier de verser une somme à Mme A... au titre de la période postérieure au 31 décembre 2023, la rente devant être versée à terme échu.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Grenoble la somme de 4000 euros à verser à Mme A... au titre des frais exposés par elle tant devant la cour administrative d'appel que devant le Conseil d'Etat et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

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Article 1er : L'arrêt du 7 avril 2023 de la cour administrative d'appel de Lyon est annulé en tant qu'il statue sur la rente trimestrielle allouée à la requérante

Article 2 : Le centre hospitalier universitaire de Grenoble versera à Mme A... la somme de 605,44 euros avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts.

Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme A... est rejeté.

Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Grenoble versera à Mme A... une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au centre hospitalier universitaire de Grenoble.

Délibéré à l'issue de la séance du 28 mars 2024 où siégeaient : M. Alain Seban, assesseur, présidant ; Mme Fabienne Lambolez, conseillère d'Etat et Mme Sara-Lou Gerber, maîtresse des requêtes-rapporteure.

Rendu le 24 avril 2024.

Le président :

Signé : M. Alain Seban

La rapporteure :

Signé : Mme Sara-Lou Gerber

Le secrétaire :

Signé : M. Bernard Longieras


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 474878
Date de la décision : 24/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 24 avr. 2024, n° 474878
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sara-Lou Gerber
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SAS BOULLOCHE, COLIN, STOCLET ET ASSOCIÉS ; SARL LE PRADO – GILBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474878.20240424
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