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10/04/2024 | FRANCE | N°488982

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 10 avril 2024, 488982


Vu la procédure suivante :



Par une requête enregistrée le 21 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 février 2023 par laquelle le commandant de l'école des officiers de la gendarmerie nationale, lui a infligé la sanction de quinze jours d'arrêts assortis d'une dispense d'exécution.



Vu les autres pièces du dossier ;



Vu :

- le code de la défense ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- l'a...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 21 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 16 février 2023 par laquelle le commandant de l'école des officiers de la gendarmerie nationale, lui a infligé la sanction de quinze jours d'arrêts assortis d'une dispense d'exécution.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de procédure pénale ;

- le code de la sécurité intérieure ;

- l'arrêté du 16 novembre 2018 relatif à la procédure de recueil des signalements émis par les lanceurs d'alerte au sein du ministère de l'intérieur et du ministère chargé de l'outre-mer ;

- le décret n° 2022-1284 du 3 octobre 2022 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Denieul, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., capitaine de gendarmerie en poste au sein de l'école des officiers de la gendarmerie nationale, demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir la sanction de 15 jours d'arrêts avec dispense d'exécution qui lui a été infligée le 16 février 2023.

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision d'engager une procédure disciplinaire à l'encontre de Mme A..., qui a conduit au prononcé de la sanction de quinze jours d'arrêt, a été prise au vu du rapport finalisé le 21 octobre 2022 à la suite de l'enquête diligentée par le commandement de l'école des officiers de la gendarmerie nationale. Dès lors que cette enquête ne constitue pas une phase de la procédure disciplinaire, la requérante ne peut utilement soutenir que la méconnaissance, à la supposer avérée, du principe d'impartialité, des règles régissant l'organisation de l'enquête ou des exigences de formation des enquêteurs affecterait la régularité de cette procédure et entacherait d'illégalité la décision attaquée. Elle ne peut davantage utilement soutenir que toutes les personnes susceptibles de témoigner en sa faveur n'auraient pas été entendues.

3. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article 40 du code de procédure pénale : " (...) Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs ". D'autre part, l'article 4 de l'arrêté du 16 novembre 2018 relatif à la procédure de recueil des signalements émis par les lanceurs d'alerte au sein du ministère de l'intérieur et du ministère chargé de l'outre-mer dispose que : " Le signalement d'une alerte est porté à la connaissance du référent alerte compétent ou du supérieur hiérarchique, direct ou indirect, ou de l'autorité d'emploi de l'agent. ".

4. A supposer que les dispositions citées au point 3 soient applicables aux déclarations faites par Mme A... lors de son audition par les enquêteurs, le non-respect de l'obligation de transmission des déclarations de la requérante n'est pas de nature à affecter la régularité de la procédure disciplinaire elle-même, ni à entacher la décision attaquée d'illégalité.

5. Enfin, si Mme A... soutient que le procès-verbal de son audition a été modifié entre sa relecture et sa signature, elle n'apporte aucun élément de nature à l'établir.

Sur la légalité interne de la décision attaquée

6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

7. En premier lieu, aux termes de l'article R. 434-5 du code de la sécurité intérieure, " I. - Le policier ou le gendarme exécute loyalement et fidèlement les instructions et obéit de même aux ordres qu'il reçoit de l'autorité investie du pouvoir hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public. ". L'article R. 434-1 du même code dispose en son alinéa premier que : " Le militaire de la gendarmerie obéit aux règles militaires et adhère aux valeurs inhérentes à son statut. L'état militaire exige en toute circonstance esprit de sacrifice, pouvant aller jusqu'au sacrifice suprême, discipline, disponibilité, loyalisme et neutralité. ". Selon l'article L. 4137-2 du code de la défense : " Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes :/ 1° Les sanctions du premier groupe sont :/a) L'avertissement ;/b) La consigne ; /c) La réprimande ; /d) Le blâme ; /e) Les arrêts ;/f) Le blâme du ministre ; (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier que Mme A..., qui occupe des fonctions de chef de section au sein de l'école des officiers de gendarmerie, a, à plusieurs reprises contesté les modifications de méthodes mises en place par son supérieur, refusé de se rendre à certaines réunions dont elle contestait l'utilité, remis en question la répartition des tâches au sein du département, ce qui l'a conduit à rendre des travaux incomplets ou tardifs. Elle a également, dans le cadre de l'enquête de commandement, reproché à son supérieur d'avoir adopté à son encontre un comportement inadapté de harcèlement, sans que l'enquête ne permette d'établir la véracité de ces accusations. Contrairement à ce que soutient Mme A..., ces faits, dont la matérialité est établie, constituent une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.

9. En deuxième lieu, au regard du grade de Mme A..., des responsabilités qui lui incombent et de la récurrence des comportements fautifs qui lui sont reprochés, l'autorité disciplinaire n'a pas, dans les circonstances de l'espèce et au regard du pouvoir d'appréciation dont elle disposait, pris une sanction disproportionnée en lui infligeant, à raison des faits mentionnés au point précédent, la sanction du premier groupe de quinze jours d'arrêts avec dispense d'exécution.

10. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.

11. Il résulte de ce qui précède que la requête de Mme A... doit être rejetée.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre des armées.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 488982
Date de la décision : 10/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 10 avr. 2024, n° 488982
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alexandre Denieul
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:488982.20240410
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