Vu la procédure suivante :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de la Réunion d'annuler la décision du 4 juillet 2019 par laquelle la ministre du travail a autorisé la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux à la licencier. Par un jugement n° 1901228 du 10 mai 2021, le tribunal administratif de la Réunion a fait droit à cette demande.
Par un arrêt nos 21BX02986, 21BX03023 du 25 avril 2023, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté les appels formés par la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion et société Centre d'hémodialyse - MG Durieux contre ce jugement.
Par un pourvoi, un mémoire complémentaire et un autre mémoire, enregistrés les 26 juin et 18 et 20 septembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat de la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux et à la SCP Ohl, Vexliard, avocat de Mme B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux a sollicité auprès de l'inspection du travail l'autorisation de licencier Mme A... B..., salariée protégée, pour inaptitude. Par une décision du 15 février 2016, l'inspectrice du travail a accordé cette autorisation. La ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, saisie par un recours hiérarchique formé par Mme B..., a, par une décision du 23 août 2016, annulé la décision de l'inspectrice du travail et considéré, dans l'article 3 de sa décision, qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande d'autorisation de licenciement. A la suite de l'annulation de l'article 3 de la décision de la ministre du travail par un jugement du 17 décembre 2018 du tribunal administratif de la Réunion, devenu définitif, la ministre du travail a, par une décision du 4 juillet 2019, autorisé le licenciement de Mme B.... Par un nouveau jugement du 10 mai 2021, le tribunal administratif de la Réunion a, sur demande de Mme B..., annulé cette décision. La société Centre d'hémodialyse - MG Durieux se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 25 avril 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté son appel, ainsi que celui de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, contre ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 1232-2 du code du travail : " L'employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. / La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. (...) / L'entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la lettre recommandée convoquant Mme B... à un entretien préalable, fixé le 7 octobre 2015, a été présentée à son domicile le mercredi 30 septembre 2015 puis a été retirée par l'intéressée le vendredi 2 octobre 2015. Pour juger que le délai de cinq jours ouvrables prévu par le troisième alinéa de l'article L. 1232-2 du code du travail a été méconnu, la cour a retenu que ce délai avait commencé à courir à la date à laquelle la salariée a retiré le pli, soit en l'espèce le 2 octobre 2015. En statuant ainsi, alors que le délai avait commencé à courir le jeudi 1er octobre 2015, soit le jour ouvrable suivant la présentation de la lettre recommandée ainsi qu'il résulte des termes mêmes de l'article L. 1232-2 du code du travail, la cour a commis une erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède que la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux est fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Les dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de société Centre d'hémodialyse - MG Durieux qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... une somme à verser à la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Bordeaux du 25 avril 2023 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée devant la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : Le surplus des conclusions du pourvoi est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par Mme B... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société Centre d'hémodialyse - MG Durieux et à Mme A... B....
Copie en sera adressée à la ministre du travail, de la santé et des solidarités.
Délibéré à l'issue de la séance du 13 mars 2024 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; M. Alban de Nervaux, conseiller d'Etat et M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes-rapporteur.
Rendu le 4 avril 2024.
La présidente :
Signé : Mme Maud Vialettes
Le rapporteur :
Signé : M. Sylvain Monteillet
Le secrétaire :
Signé : M. Jean-Marie Baune