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03/04/2024 | FRANCE | N°472137

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 03 avril 2024, 472137


Vu la procédure suivante :



Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 26 septembre 2022 du directeur général de l'école Excelia refusant la validation de sa troisième année de " Bachelor en management du tourisme et de l'hôtellerie " et de la décision du 7 octobre 2022 par laquelle la directrice du Bachelor a rejeté son recours gracieux contre cette décision, et d

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Vu la procédure suivante :

Mme A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension de l'exécution de la décision du 26 septembre 2022 du directeur général de l'école Excelia refusant la validation de sa troisième année de " Bachelor en management du tourisme et de l'hôtellerie " et de la décision du 7 octobre 2022 par laquelle la directrice du Bachelor a rejeté son recours gracieux contre cette décision, et d'enjoindre à l'école Excelia de procéder au réexamen de sa situation. Par une ordonnance n° 2202973 du 19 décembre 2022, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 14 et 29 mars 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de l'association Excelia la somme de 3 500 euros à verser au Cabinet François Pinet, son avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'arrêté du 8 mars 2001 relatif aux diplômes délivrés par les établissements d'enseignement supérieur technique privés et consulaires reconnus par l'Etat ;

- l'arrêté du 25 juin 2021 établissant la liste des établissements d'enseignement supérieur technique privés et consulaires autorisés à délivrer un diplôme visé par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et pouvant conférer le grade de licence ou de master à leurs titulaires ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, au cabinet François Pinet, avocat de Mme B... et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de l'association Excelia ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que Mme B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Poitiers la suspension de l'exécution de la décision du 26 septembre 2022 par laquelle le directeur général de l'école Excelia a refusé de valider sa troisième année du cursus de " Bachelor en management du tourisme et de l'hôtellerie ", et de la décision du 7 octobre 2022 par laquelle la directrice de ce programme a rejeté son recours gracieux contre cette décision. Par une ordonnance du 19 décembre 2022, contre laquelle Mme B... se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif a rejeté sa demande.

2. D'une part, aux termes de l'article L. 443-1 du code de l'éducation : " Les écoles, ainsi que les filiales de ces écoles qui exercent des activités d'enseignement en vue de la délivrance de diplômes reconnus par l'Etat, créées et administrées par les chambres de commerce et d'industrie territoriales en vertu de l'article L. 711-4 du code de commerce ou par les chambres de commerce et d'industrie de région en vertu de l'article L. 711-9 du même code, sont soumises au régime des établissements mentionnés à l'article L. 443-2 du présent code [les établissements d'enseignement technique privés] ". Aux termes de l'article L. 641-5 du code de l'éducation : " Des certificats d'études et des diplômes peuvent être délivrés, dans les conditions déterminées par arrêté ministériel après avis du Conseil supérieur de l'éducation, par les écoles techniques privées reconnues par l'Etat. " A ce titre, l'arrêté du 8 mars 2001 relatif aux diplômes délivrés par les établissements d'enseignement supérieur technique privés et consulaires reconnus par l'Etat prévoit à son article 1er que ces établissements peuvent être autorisés à délivrer à leurs étudiants des diplômes revêtus du visa de l'Etat, que cette autorisation est accordée, après évaluation des formations, par arrêté du ministre chargé de l'enseignement supérieur pour une durée maximale de six ans, renouvelable, après avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, que le ministre chargé de l'enseignement supérieur arrête les conditions d'admission dans ces établissements et publie annuellement le nombre de places mises aux concours. Son article 5 prévoit en outre que " Le recteur de région académique, chancelier des universités, nomme les jurys d'admission et de fin d'études, après consultation des établissements intéressés. / Il désigne le président du jury, appartenant à un corps d'enseignants-chercheurs, ainsi que le vice-président, qui le supplée en cas d'empêchement. Nul ne peut exercer la fonction de président du jury plus de cinq années consécutives au sein d'un même jury. / Le recteur de région académique ou son représentant participe au jury lors des délibérations avec voix consultative. " Les articles 6 et 7 du même arrêté disposent respectivement qu'" à la clôture des opérations, le président du jury adresse au recteur de région académique, chancelier des universités, le procès verbal signé par les membres du jury et la liste des étudiants proposés à l'admission et à l'obtention du diplôme " et que " Les diplômes sont signés par le président du jury et le directeur de l'école ainsi que par le recteur de région académique qui y appose le visa de l'Etat. "

3. D'autre part, aux termes de l'article L. 613-1 du code de l'éducation : " L'Etat a le monopole de la collation des grades et des titres universitaires. / Les diplômes nationaux délivrés par les établissements sont ceux qui confèrent l'un des grades ou titres universitaires dont la liste est établie par décret. (...) ". Aux termes de l'article D. 612-32-2 du code de l'éducation : " Le grade de licence est conféré de plein droit aux titulaires : / (...) 21° Des diplômes de premier cycle délivrés par les établissements d'enseignement supérieur privés mentionnés à l'article L. 641-3 et les écoles supérieures de commerce relevant de l'article L. 753-1 et figurant sur une liste arrêtée par le ministre chargé de l'enseignement supérieur pris après avis du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (...) ".

Sur le pourvoi principal de Mme B... :

4. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que l'école Excelia est un établissement d'enseignement supérieur privé, géré par une association de la loi du 1er juillet 1901, et relevant du statut des écoles techniques privées visées à l'article L. 443-2 du code de l'éducation. Si le diplôme de " Bachelor en management du tourisme et de l'hôtellerie " délivré par l'école Excelia sur la période du 1er septembre 2021 au 31 août 2025 peut, en application de l'arrêté du 25 juin 2021 établissant la liste des établissements d'enseignement supérieur technique privés et consulaires autorisés à délivrer un diplôme visé par le ministre chargé de l'enseignement supérieur et pouvant conférer le grade de licence ou de master à leurs titulaires, être revêtu du visa de l'Etat dans les conditions définies par l'arrêté du 8 mars 2001 relatif aux diplômes délivrés par les établissements d'enseignement supérieur technique privés et consulaires reconnus par l'Etat, l'arrêté du 25 juin 2021 ne prévoit pas qu'il confère de grade universitaire, de sorte qu'il n'est ainsi pas délivré au nom de l'Etat. Un tel diplôme n'étant, dès lors, délivré qu'au nom de l'établissement d'enseignement supérieur privé, les litiges relatifs à sa délivrance ne ressortissent pas à la compétence du juge administratif.

5. Il résulte de ce qui précède que les contestations de Mme B... dirigées contre la décision du directeur général de l'école Excelia refusant de valider sa troisième et dernière année du cursus de " Bachelor en management du tourisme et de l'hôtellerie " et la décision de la directrice de ce programme rejetant son recours gracieux ne ressortissent pas à la compétence de la juridiction administrative. Ainsi, les conclusions tendant à la suspension de l'exécution de ces décisions, dès lors qu'elles étaient portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître, ne pouvaient qu'être rejetées. Ce motif, d'ordre public et dont l'examen n'implique l'appréciation d'aucune circonstance de fait, doit être substitué au motif retenu par l'ordonnance attaquée, dont il justifie, sur ce point, le dispositif. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Poitiers qu'elle attaque.

Sur le pourvoi incident de l'école Excelia :

6. Le pourvoi incident présenté par l'école Excelia étant dirigé contre les seuls motifs de l'ordonnance attaquée et non contre son dispositif, qui ne lui fait pas grief, dès lors qu'il rejette la demande de Mme B..., ne peut qu'être rejeté comme irrecevable.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'école Excelia, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par l'école Excelia au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de Mme B... et le pourvoi incident de l'école Excelia sont rejetés.

Article 2 : Les conclusions présentées par l'école Excelia au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à Mme A... B... et à l'école Excelia.

Copie en sera adressée à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Délibéré à l'issue de la séance du 28 février 2024 où siégeaient : M. Christophe Chantepy, président de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Alban de Nervaux, Mme Célia Verot, M. Jean-Dominique Langlais, conseillers d'Etat , Mme Catherine Brouard-Gallet, conseillère d'Etat en service extraordinaire et M. Julien Fradel, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 3 avril 2024.

Le président :

Signé : M. Christophe Chantepy

Le rapporteur :

Signé : M. Julien Fradel

Le secrétaire :

Signé : M. Christophe Bouba


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 472137
Date de la décision : 03/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - ECOLES TECHNIQUES PRIVÉES (ART - L - 443-2 DU CODE DE L’ÉDUCATION) – LITIGE RELATIF À LA DÉLIVRANCE D’UN DIPLÔMÉ VISÉ PAR L’ETAT MAIS NE CONFÉRANT PAS DE GRADE UNIVERSITAIRE – COMPÉTENCE DU JUGE JUDICIAIRE [RJ1].

17-03-02 Un diplôme délivré par un établissement d’enseignement supérieur privé relevant du statut des écoles techniques privées mentionnées à l’article L. 443-2 du code de l’éducation et pouvant être revêtu du visa de l’Etat, mais sans conférer de grade universitaire, n’est pas conféré au nom de l’Etat. Un tel diplôme n’étant, dès lors, délivré qu’au nom de l’établissement d’enseignement supérieur privé, les litiges relatifs à sa délivrance ne ressortissent pas à la compétence du juge administratif.

ENSEIGNEMENT ET RECHERCHE - QUESTIONS PROPRES AUX DIFFÉRENTES CATÉGORIES D'ENSEIGNEMENT - ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET GRANDES ÉCOLES - ECOLES TECHNIQUES PRIVÉES (ART - L - 443-2 DU CODE DE L’ÉDUCATION) – COMPÉTENCE JURIDICTIONNELLE – LITIGE RELATIF À LA DÉLIVRANCE D’UN DIPLÔMÉ VISÉ PAR L’ETAT MAIS NE CONFÉRANT PAS DE GRADE UNIVERSITAIRE – COMPÉTENCE DU JUGE JUDICIAIRE [RJ1].

30-02-05 Un diplôme délivré par un établissement d’enseignement supérieur privé relevant du statut des écoles techniques privées mentionnées à l’article L. 443-2 du code de l’éducation et pouvant être revêtu du visa de l’Etat, mais sans conférer de grade universitaire, n’est pas conféré au nom de l’Etat. Un tel diplôme n’étant, dès lors, délivré qu’au nom de l’établissement d’enseignement supérieur privé, les litiges relatifs à sa délivrance ne ressortissent pas à la compétence du juge administratif.


Publications
Proposition de citation : CE, 03 avr. 2024, n° 472137
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Julien Fradel
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : CABINET FRANÇOIS PINET ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:472137.20240403
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