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19/01/2024 | FRANCE | N°474405

France | France, Conseil d'État, 7ème chambre, 19 janvier 2024, 474405


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 mai et 22 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 mars 2023 par laquelle l'autorité militaire de deuxième niveau lui a infligé la sanction de vingt jours d'arrêts, avec dispense d'exécution ;



2°) d'enjoindre à l'administration de retirer la décision litigieuse et toute pièce y afférent

e de son dossier administratif ;



3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 50...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 mai et 22 novembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 22 mars 2023 par laquelle l'autorité militaire de deuxième niveau lui a infligé la sanction de vingt jours d'arrêts, avec dispense d'exécution ;

2°) d'enjoindre à l'administration de retirer la décision litigieuse et toute pièce y afférente de son dossier administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la défense ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Denieul, auditeur,

- les conclusions de M. Nicolas Labrune, rapporteur public ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 27 décembre 2023, présentée par M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., lieutenant de gendarmerie exerçant les fonctions de commandant d'une communauté de brigades, demande l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 22 mars 2023 de l'autorité militaire de deuxième niveau lui infligeant la sanction de vingt jours d'arrêts, avec dispense d'exécution, en raison de méthodes de commandement inadaptées et de propos déplacés tenus à l'égard de ses subordonnés.

Sur la légalité externe de la décision attaquée :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 4137-1 du code de la défense : " (...) Le militaire à l'encontre duquel une procédure de sanction est engagée a droit à la communication de son dossier individuel, à l'information par son administration de ce droit, à la préparation et à la présentation de sa défense. (...) ". Aux termes de l'article R. 4137-15 du même code : " Avant qu'une sanction ne lui soit infligée, le militaire a le droit de s'expliquer oralement ou par écrit, seul ou accompagné d'un militaire en activité de son choix sur les faits qui lui sont reprochés devant l'autorité militaire de premier niveau dont il relève. Au préalable, un délai de réflexion, qui ne peut être inférieur à un jour franc, lui est laissé pour organiser sa défense. (...) Avant d'être reçu par l'autorité militaire de premier niveau dont il relève, le militaire a connaissance de l'ensemble des pièces et documents au vu desquels il est envisagé de le sanctionner ".

3. D'une part, si M. A... fait valoir que deux des trois courriels, émanant de militaires de la communauté de brigades qu'il commandait, mentionnés par le courrier du 19 septembre 2022 par lequel le commandant du groupement de gendarmerie départementale du Cher a chargé le capitaine C... de procéder à une enquête administrative sur les méthodes de commandement du lieutenant A... ne figurent pas à son dossier disciplinaire, il ressort des pièces du dossier et en particulier des motifs de la décision contestée que l'autorité militaire s'est fondée exclusivement sur le rapport remis le 31 octobre 2022 par le capitaine C... et sur les comptes-rendus établis par M. A... et l'ensemble des militaires servant au sein de la communauté de brigades qu'il commandait. D'autre part, M. A... ne peut utilement se prévaloir de l'absence de communication des comptes-rendus d'entretiens téléphoniques réalisés par le rédacteur du rapport d'enquête avec les membres du groupe de commandement, dans la mesure où il n'est pas établi que ces derniers auraient fait l'objet d'un compte-rendu individuel, ni davantage de l'absence de communication de procès-verbaux d'auditions dont la tenue n'est étayée par aucun élément. Enfin, M. A... a été entendu par l'autorité de premier niveau le 25 janvier 2023, soit quinze jours après la date à laquelle il a pu prendre connaissance de son dossier disciplinaire. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles L. 4137-1 et R. 4137-15 du code de la défense ne peut qu'être écarté.

4. En second lieu, il ne ressort, en tout état de cause, ni des termes ni des conditions d'élaboration du rapport d'enquête, qui synthétise le contenu des différents comptes-rendus d'audition du requérant et des militaires servant ou ayant récemment servi dans sa communauté de brigades, que son auteur aurait manqué à ses devoirs d'impartialité et de neutralité. Contrairement à ce qui est allégué, l'administration n'a commis aucune faute en confiant cette enquête à un membre de la même région de gendarmerie et il ne résulte d'aucun texte que la décision attaquée aurait dû être précédée d'une enquête administrative conduite par l'inspection générale de la gendarmerie nationale.

Sur la légalité interne de la décision attaquée :

5. En premier lieu, pour prononcer la sanction litigieuse, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire s'est fondée sur ce que M. A... avait usé de méthodes de commandement inadaptées et tenu des propos déplacés à l'égard de certains de ses subordonnés. Il ne ressort pas des pièces du dossier que de telles constatations reposeraient sur des faits matériellement inexacts.

6. En second lieu, aux termes de l'article L. 4137-2 du code de la défense : " Les sanctions disciplinaires applicables aux militaires sont réparties en trois groupes : / 1° Les sanctions du premier groupe sont : / (...) e) Les arrêts (...) ". Eu égard aux responsabilités de M. A..., l'autorité militaire de deuxième niveau n'a pas, compte tenu de la nature des faits qui lui ont été reprochés et au regard du pouvoir d'appréciation dont elle disposait, pris une sanction disproportionnée en lui infligeant une sanction du premier groupe de vingt jours d'arrêts.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. B... A... et au ministre des armées.


Synthèse
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 474405
Date de la décision : 19/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jan. 2024, n° 474405
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alexandre Denieul
Rapporteur public ?: M. Nicolas Labrune

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474405.20240119
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