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02/01/2024 | FRANCE | N°474550

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 02 janvier 2024, 474550


Vu la procédure suivante :



M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 14 juin 2022 du ministre de l'intérieur portant retrait de trois points sur son permis de conduire et obligation de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans un délai de quatre mois. Par un jugement n° 2204508 du 29 mars 2023, le magistrat désigné par le tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de lui restituer trois points sur son permis de conduire.



Par un pourvoi enregistré le 29 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil ...

Vu la procédure suivante :

M. B... D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 14 juin 2022 du ministre de l'intérieur portant retrait de trois points sur son permis de conduire et obligation de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière dans un délai de quatre mois. Par un jugement n° 2204508 du 29 mars 2023, le magistrat désigné par le tribunal administratif a annulé cette décision et enjoint au ministre de l'intérieur de lui restituer trois points sur son permis de conduire.

Par un pourvoi enregistré le 29 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de procédure pénale ;

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Amel Hafid, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. D... a demandé au tribunal administratif de Rennes l'annulation d'un retrait de trois points sur son permis de conduire à la suite d'une infraction commise le 26 novembre 2021 constatée par procès-verbal électronique et ayant donné lieu à une amende forfaitaire majorée. Par un jugement du 29 mars 2023, le tribunal administratif a annulé ce retrait et enjoint au ministre de restituer ces points dans un délai de deux mois. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation contre ce jugement.

2. D'une part, la délivrance au titulaire du permis de conduire à l'encontre duquel est relevée une infraction donnant lieu à retrait de points de l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route constitue une garantie essentielle donnée à l'auteur de l'infraction pour lui permettre, avant d'en reconnaître la réalité par le paiement d'une amende forfaitaire ou l'exécution d'une composition pénale, d'en mesurer les conséquences sur la validité de son permis et éventuellement d'en contester la réalité devant le juge pénal. Son accomplissement conditionne dès lors la régularité de la procédure au terme de laquelle le retrait de points est décidé.

3. D'autre part, l'information prévue aux articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route doit porter d'une part sur l'existence d'un traitement automatisé des points et la possibilité d'exercer le droit d'accès et, d'autre part, sur le fait que le paiement de l'amende établit la réalité de l'infraction dont la qualification est précisée et entraîne un retrait de points correspondant à cette infraction. Ni l'article L. 223-3, ni l'article R. 223-3 du code de la route n'exigent que le conducteur soit informé du nombre exact de points susceptibles de lui être retirés, dès lors que la qualification de l'infraction qui lui est reprochée est dûment portée à sa connaissance.

4. Il ressort des termes du jugement attaqué que le tribunal administratif de Rennes a retenu que le ministre n'était pas en mesure d'établir la preuve de la délivrance de l'information préalable prescrite par la loi au motif que l'indication du nombre de points dont le retrait était encouru ne figurait pas sur le procès-verbal électronique sur lequel le contrevenant avait apposé sa signature mais sur un document distinct de celui-ci. Toutefois, ainsi qu'il est dit aux points 2 et 3, si l'information sur la qualification de l'infraction et de ce qu'un retrait de points correspondant à cette infraction était légalement exigée sous peine d'irrégularité de la décision, tel n'était pas le cas de la mention du nombre de points susceptibles d'être retirés. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer est, par suite, fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'erreur de droit et à en demander, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de son pourvoi, l'annulation.

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

6. En premier lieu, il résulte de la décision du 28 janvier 2020 modifiant la décision du 3 mai 2017 modifiée portant délégation de signature à la délégation de la sécurité routière que Mme C... A..., cheffe du bureau national des droits à conduire, avait, à la date de la décision attaquée, délégation pour signer les décisions prises au nom du ministre.

7. En second lieu, depuis une mise à jour logicielle effectuée le 15 avril 2015, tous les appareils électroniques utilisés par les agents verbalisateurs font apparaître sur la page présentée au contrevenant, en cas d'infraction au code de la route entraînant retrait de points, l'ensemble des informations exigées par la loi. Dès lors, pour les infractions constatées à compter de cette date, la signature apposée par l'intéressé et conservée par voie électronique établit que ces informations lui ont été délivrées.

8. Si M. D... soutient ne pas avoir bénéficié de l'information prescrite par les articles L. 223-3 et R. 223-3 du code de la route, il résulte de l'instruction que l'infraction constatée le 26 novembre 2021 a été constatée par un procès-verbal électronique qui comporte un facsimilé de sa signature. Ainsi qu'il est dit au point précédent, il en résulte nécessairement qu'il a eu connaissance des informations prescrites par la loi. En outre, il résulte de ce qui est dit au point 4 qu'il ne peut utilement soutenir ne pas avoir été destinataire de l'information sur le nombre de points dont le retrait était encouru.

9. Il résulte de ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation présentées par M. D... doivent être rejetées. Il en va de même de ses conclusions à fin d'injonction.

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée par M. D... soit mise à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 29 mars 2023 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3: La présente décision sera notifiée à M. B... D... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2023 où siégeaient : Mme Fabienne Lambolez, assesseure, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Amel Hafid, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 2 janvier 2024.

La présidente :

Signé : Mme Fabienne Lambolez

La rapporteure :

Signé : Mme Amel Hafid

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Pilet


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 474550
Date de la décision : 02/01/2024
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 02 jan. 2024, n° 474550
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Amel Hafid
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:474550.20240102
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