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02/01/2024 | FRANCE | N°473822

France | France, Conseil d'État, 5ème chambre, 02 janvier 2024, 473822


Vu la procédure suivante :



M. E... B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision 48 SI par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nuls, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'annuler les décisions de retrait de points consécutives à plusieurs infractions et d'enjoindre au ministre de lui restituer son permis de conduire. Par un jugement n° 2201028 du 2 mars 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal adm

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Vu la procédure suivante :

M. E... B... C... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision 48 SI par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté la perte de validité de son permis de conduire pour solde de points nuls, ainsi que la décision implicite de rejet de son recours gracieux, d'annuler les décisions de retrait de points consécutives à plusieurs infractions et d'enjoindre au ministre de lui restituer son permis de conduire. Par un jugement n° 2201028 du 2 mars 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif a annulé ces décisions, enjoint au ministre de procéder à la reconstitution de douze points sur le permis de conduire de M. B... C... et d'en tirer les conséquences sur le droit à conduire de l'intéressé dans un délai d'un mois.

Par un pourvoi enregistré le 4 mai 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le ministre de l'intérieur et des outre-mer demande au Conseil d'Etat d'annuler ce jugement.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la route ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Amel Hafid, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que M. B... C..., par une requête enregistrée le 1er avril 2022, a demandé au tribunal administratif de Nancy d'annuler la décision 48 SI par laquelle le ministre de l'intérieur a constaté l'invalidité de son permis de conduire pour solde de points nuls, la décision de rejet de son recours gracieux et les décisions de retrait de points de son permis de conduire consécutives aux infractions constatées les 11 août 2019, 1er février 2020, 11 février 2020, 20 avril 2020, 23 avril 2020 et 10 septembre 2020, et d'enjoindre au ministre de lui restituer son permis. Par un jugement du 2 mars 2023, la magistrate désignée par le président du tribunal administratif de Nancy a annulé ces décisions, enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à la reconstitution de douze points sur le permis de conduire de M. B... C... et d'en tirer les conséquences sur le droit à conduire de l'intéressé dans un délai d'un mois. Le ministre de l'intérieur et des outre-mer se pourvoit en cassation contre ce jugement.

2. Il incombe à l'administration, lorsqu'elle oppose une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté d'une action introduite devant une juridiction administrative, d'établir la date à laquelle la décision attaquée a été régulièrement notifiée à l'intéressé. Lorsque le destinataire d'une décision administrative soutient que l'avis de réception d'un pli recommandé portant notification de cette décision à l'adresse qu'il avait lui-même indiqué à l'administration n'a pas été signé par lui, il lui appartient d'établir que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli en cause.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que le ministre de l'intérieur avait opposé à la demande d'annulation de la décision 48 SI une fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de ces conclusions, en produisant l'avis de réception d'un pli recommandé, daté du 20 mai 2021, distribué à la dernière adresse connue de M. B... C... et revêtu d'une signature. En écartant cette fin de non-recevoir, le tribunal administratif a implicitement mais nécessairement estimé que M. B... C... établissait la preuve que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli en cause. En statuant ainsi, alors que M. B... C... se bornait à produire une signature qui ne correspondait pas à celle, illisible, apposée sur l'avis de réception, et à alléguer, en produisant un dépôt de plainte, avoir été victime de dégradations de sa boîte aux lettres et de vols de courrier, le tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, le ministre de l'intérieur et des outre-mer est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au fond en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ". Il ressort des pièces du dossier que la décision 48 SI litigieuse, qui retraçait les différents retraits de points, a été distribuée le 20 mai 2021, contre avis de réception, à la dernière adresse connue de M. B... C.... Celui-ci, qui conteste être l'auteur de la signature portée sur l'avis de réception, n'établit pas que le pli aurait été reçu par une tierce personne qui n'avait pas qualité pour recevoir les courriers recommandés qui lui étaient destinés. Par suite, la décision 48 SI doit être considérée comme ayant été régulièrement notifiée à M. B... C... le 20 mai 2021, et les conclusions tendant à son annulation, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Nancy le 1er avril 2022, sont tardives. Il en est de même de ses conclusions tendant à l'annulation des retraits de points consécutifs aux infractions mentionnées au point 1 qui, étant retracés dans cette décision 48 SI, ont nécessairement été portés à sa connaissance au plus tard le 20 mai 2021.

6. Il résulte de ce qui précède que la demande de M. B... C... ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du 2 mars 2023 du tribunal administratif de Nancy est annulé.

Article 2 : La demande de M. B... C... devant le tribunal administratif de Nancy est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à M. E... B... C....

Délibéré à l'issue de la séance du 7 décembre 2023 où siégeaient : Mme Fabienne Lambolez, assesseure, présidant ; M. Alain Seban, conseiller d'Etat et Mme Amel Hafid, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 2 janvier 2024.

La présidente :

Signé : Mme Fabienne Lambolez

La rapporteure :

Signé : Mme Amel Hafid

La secrétaire :

Signé : Mme D... A...


Synthèse
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 473822
Date de la décision : 02/01/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 02 jan. 2024, n° 473822
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Amel Hafid
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:473822.20240102
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