La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/12/2023 | FRANCE | N°474146

France | France, Conseil d'État, 4ème - 1ère chambres réunies, 08 décembre 2023, 474146


Vu les procédures suivantes :



1° Sous le numéro 474146, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 mai et 31 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat Action et Démocratie et l'association Pagestec demandent au Conseil d'Etat :



1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 avril 2023 modifiant l'arrêté du 19 mai 2015 relatif à l'organisation des enseignements dans les classes de collège ;



2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5

000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.







2° So...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le numéro 474146, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 15 mai et 31 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat Action et Démocratie et l'association Pagestec demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 avril 2023 modifiant l'arrêté du 19 mai 2015 relatif à l'organisation des enseignements dans les classes de collège ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le numéro 474148, par une requête et deux nouveaux mémoires, enregistrés les 15 mai et 30 et 31 août 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le Syndicat Action et Démocratie et l'association Pagestec demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 7 avril 2023 modifiant l'arrêté du 21 octobre 2015 relatif aux classes des sections d'enseignement général et professionnel adapté ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

....................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

- le code de l'éducation ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Thalia Breton, maîtresse des requêtes,

- les conclusions de M. Raphaël Chambon, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 7 avril 2023, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a modifié l'annexe 1 de l'arrêté du 19 mai 2015 relatif à l'organisation des enseignements dans les classes de collège, qui fixe les volumes horaires des enseignements obligatoires applicables aux élèves du niveau sixième de collège, en remplaçant, à compter de la rentrée scolaire 2023, l'heure d'enseignement commun de technologie par une heure d'enseignement complémentaire de " soutien ou approfondissement ". Par un autre arrêté du même jour, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse a modifié l'annexe unique de l'arrêté du 21 octobre 2015 relatif aux classes des sections d'enseignement général et professionnel adapté, qui fixe les volumes horaires des enseignements applicables aux élèves de ces sections, en remplaçant, à compter de la rentrée scolaire 2023, pour les élèves du niveau sixième, une heure de l'enseignement commun de " sciences et technologie " par une heure d'enseignement complémentaire de " soutien ou approfondissement ". Par deux requêtes qu'il y a lieu de joindre, le Syndicat Action et Démocratie et l'association Pagestec demandent l'annulation de ces deux arrêtés en tant qu'ils suppriment l'enseignement de la technologie aux élèves du niveau sixième de collège et le remplacent par un enseignement complémentaire.

Sur la légalité externe des arrêtés attaqués :

2. En premier lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 231-1 du code de l'éducation : " Le Conseil supérieur de l'éducation est obligatoirement consulté et peut donner son avis sur toutes les questions d'intérêt national concernant l'enseignement ou l'éducation quel que soit le département ministériel intéressé ".

3. D'une part, il ressort des pièces des dossiers que le Conseil supérieur de l'éducation a été consulté, le 24 mars 2023, sur les projets d'arrêtés contestés, soit préalablement à leur publication. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés qu'ils attaquent ont été adoptés en méconnaissance des dispositions de l'article L. 231-1 du code de l'éducation citées au point 2.

4. D'autre part, les mesures contestées par les requérants n'ayant reçu effet qu'à compter de la rentrée scolaire 2023, les requérants ne peuvent, en tout état de cause, soutenir que la suppression de l'enseignement de la technologie aux élèves du niveau sixième de collège a été, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 231-1 du code de l'éducation citées au point 2, mise en œuvre préalablement à la consultation du Conseil supérieur de l'éducation, par une note de service du 21 janvier 2023 du ministre chargé de l'éducation nationale.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 311-3 du code de l'éducation : " Les programmes définissent, pour chaque cycle, les connaissances et les compétences qui doivent être acquises au cours du cycle et les méthodes qui doivent être assimilées. (...) ". Aux termes l'article D. 311-5 du même code : " Les programmes ne peuvent entrer en vigueur que douze mois au moins après leur publication, sauf décision expresse du ministre chargé de l'éducation ou du ministre chargé de l'enseignement supérieur, prise après avis du Conseil supérieur de l'éducation ".

6. Dès lors que les arrêtés contestés ne modifient pas les programmes au sens des dispositions de l'article L. 311-3 du code de l'éducation citées au point 5, les requérants ne peuvent utilement soutenir que ces arrêtés ont été adoptés en méconnaissance des dispositions de l'article D. 311-5 du même code citées au point 5.

Sur la légalité interne des arrêtés attaqués :

7. Aux termes de l'article L. 121-7 du code de l'éducation, relatif aux objectifs et missions du service public de l'enseignement : " La technologie est une des composantes fondamentales de la culture. Les écoles, les collèges, les lycées et les établissements d'enseignement supérieur relevant des ministères de l'éducation nationale et de l'agriculture assurent un enseignement de technologie ".

8. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 122-1-1 du même code, relatif aux objectifs et missions de l'enseignement scolaire : " La scolarité obligatoire doit garantir à chaque élève les moyens nécessaires à l'acquisition d'un socle commun de connaissances, de compétences et de culture, auquel contribue l'ensemble des enseignements dispensés au cours de la scolarité. Le socle doit permettre la poursuite d'études, la construction d'un avenir personnel et professionnel et préparer à l'exercice de la citoyenneté. Les éléments de ce socle commun et les modalités de son acquisition progressive sont fixés par décret, après avis du Conseil supérieur des programmes ".

9. Aux termes de l'article L. 332-3 du même code, relatif aux enseignements dispensés dans les collèges : " Les collèges dispensent un enseignement commun, réparti sur quatre niveaux successifs. A chacun d'entre eux, des enseignements complémentaires peuvent être proposés afin de favoriser l'acquisition du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et de faciliter l'élaboration du projet d'orientation mentionné à l'article L. 331-7. (...) ". Aux termes de l'article D. 122-1 du même code : " Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture prévu à l'article L. 122-1-1 est composé de cinq domaines de formation qui définissent les grands enjeux de formation durant la scolarité obligatoire : (...) / 4° Les systèmes naturels et les systèmes techniques : ce domaine est centré sur l'approche scientifique et technique de la Terre et de l'Univers ; il vise à développer la curiosité, le sens de l'observation, la capacité à résoudre des problèmes ; (...) ". Aux termes de l'article D. 122-2 du même code, les domaines de formation mentionnés à l'article D. 122-1 comprennent des objectifs de connaissances et de compétences qui sont déclinés dans les programmes d'enseignement. Aux termes de l'article L. 332-5 de ce code : " La formation dispensée à tous les élèves des collèges comprend obligatoirement une initiation économique et sociale et une initiation technologique ainsi qu'une éducation aux médias et à l'information qui comprend une formation à l'analyse critique de l'information disponible ".

10. Ces dispositions, qui se bornent à prévoir, en premier lieu, que la durée de la scolarité au collège se déroule sur quatre niveaux successifs, en second lieu, que les éléments du socle commun de connaissances, de compétences et de culture mentionné à l'article L. 332-3 du code de l'éducation, qui, ainsi qu'il ressort de l'annexe de la section 1 du chapitre II du titre II du livre Ier du même code, ne porte pas sur les disciplines qui doivent être enseignées mais identifie les connaissances et compétences qui doivent être acquises à l'issue de la scolarité obligatoire, doivent faire l'objet d'une acquisition progressive, en troisième lieu, que tous les élèves de collège doivent bénéficier d'un enseignement de technologie, d'une part, n'imposent pas que cet enseignement soit dispensé à chacun des quatre niveaux du collège, d'autre part, ne s'opposent pas non plus à ce que le pouvoir réglementaire supprime une heure d'enseignement relevant de l'enseignement commun pour la remplacer par une heure d'enseignement relevant des enseignements complémentaires. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les arrêtés qu'ils attaquent, en tant qu'ils suppriment l'enseignement commun de la technologie aux élèves du niveau sixième de collège et qu'ils le remplacent par une heure d'enseignement complémentaire de " soutien ou approfondissement ", méconnaissent les dispositions citées aux points 7 à 9.

11. Il résulte de tout ce qui précède que les requêtes du Syndicat Action et Démocratie et de l'association Pagestec doivent être rejetées. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Les requêtes du Syndicat Action et Démocratie et de l'association Pagestec sont rejetées.

Article 2 : La présente décision sera notifiée au Syndicat Action et Démocratie, à l'association Pagestec et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.


Synthèse
Formation : 4ème - 1ère chambres réunies
Numéro d'arrêt : 474146
Date de la décision : 08/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 08 déc. 2023, n° 474146
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Thalia Breton
Rapporteur public ?: M. Raphaël Chambon

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:474146.20231208
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award