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30/11/2023 | FRANCE | N°470172

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 30 novembre 2023, 470172


Vu la procédure suivante :



La société TDF a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, de suspendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 25 mai 2022 par lequel le maire de Belmont-Bretenoux (Lot) s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 29 avril 2022, ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.



Par une ordonnance n° 2206443 du 19 décembre 2022, le juge des référ

s du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.



Par un pourvo...

Vu la procédure suivante :

La société TDF a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse, de suspendre, sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, l'exécution de l'arrêté du 25 mai 2022 par lequel le maire de Belmont-Bretenoux (Lot) s'est opposé à la déclaration préalable qu'elle avait déposée le 29 avril 2022, ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

Par une ordonnance n° 2206443 du 19 décembre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 3 et 16 janvier et 12 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société TDF demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Belmont-Bretenoux la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Alexandre Trémolière, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société TDF, et à la SCP Marlange, de La Burgade, avocat de la commune de Belmont-Bretenoux ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 17 novembre 2023, présentée par la commune de Belmont-Bretenoux ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Toulouse que, par un arrêté du 25 mai 2022, le maire de Belmont-Bretenoux (Lot) s'est opposé à la déclaration préalable déposée le 29 avril 2022 par la société TDF, opérateur d'infrastructures de télécommunications, en vue de la construction d'un pylône d'antenne-relais de téléphonie mobile. Par une ordonnance du 19 décembre 2022, contre laquelle la société TDF se pourvoit en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la suspension de cet arrêté sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.

Sur le pourvoi :

3. Pour estimer que la condition d'urgence requise par les dispositions citées ci-dessus de l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'était pas remplie et rejeter en conséquence la demande de suspension dont il était saisi, le juge des référés du tribunal administratif de Toulouse a relevé que si l'opérateur de téléphonie mobile SFR est soumis à des obligations de couverture du territoire national et avait demandé à son prestataire, la société TDF, d'implanter une station radioélectrique nécessaire à la couverture par son réseau d'une partie de la population de la commune de Belmont-Bretenoux, les arguments avancés par la société TDF n'apparaissaient pas suffisants pour caractériser une atteinte suffisamment grave et immédiate à ses intérêts dès lors que la société SFR ne s'était pas elle-même associée à sa requête. En se fondant sur une telle circonstance, le juge des référés a commis une erreur de droit. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen du pourvoi, la société TDF est fondée à demander l'annulation de l'ordonnance qu'elle attaque.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée en application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

Sur la demande de suspension :

5. D'une part, si la commune de Belmont-Bretenoux demande que soit substitué, aux motifs initiaux de la décision contestée, celui tiré de la méconnaissance des règles d'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives énoncées à l'article A7 du règlement du plan local d'urbanisme, il ne ressort pas à l'évidence des données de l'affaire, en l'état de l'instruction, que ce motif est susceptible de fonder légalement la décision. Il ne peut, dès lors, être procédé à la substitution demandée pour apprécier s'il y a lieu d'ordonner la suspension de la décision litigieuse.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que le maire de Belmont- Bretenoux a fondé son opposition à la déclaration préalable déposée par la société TDF sur les dispositions, d'une part, de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme faute d'être en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public les travaux sur les réseaux pour assurer la desserte en électricité du terrain d'assiette du projet peuvent être exécutés, d'autre part, de l'article R. 111-2 du même code à raison de l'atteinte à la salubrité du fait de la présence d'une canalisation d'eau potable à moins de trois mètres du projet et, enfin, de l'article L. 113-2 de ce code compte tenu de l'atteinte à la conservation et la préservation d'un espace boisé classé. Les moyens tirés des erreurs de droit et d'appréciation entachant ces différents motifs sont de nature à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux sur la légalité de cette décision. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, il n'en va pas de même des moyens tirés de ce que, l'arrêté litigieux notifié après le terme du délai d'instruction du dossier devant être regardé comme une décision de retrait d'une décision implicite de non-opposition, il a été pris en méconnaissance de l'obligation d'une procédure contradictoire préalable et est entaché d'une erreur de droit au regard de l'article 222 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique.

7. Enfin, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par le réseau de téléphonie mobile tant 3G que 4G et à la finalité de l'infrastructure projetée, la condition d'urgence doit être regardée comme remplie.

8. Il résulte de ce qui précède que la société TDF est fondée à demander la suspension de l'exécution de la décision qu'elle attaque.

9. Il y a lieu d'enjoindre au maire de Belmont-Bretenoux de procéder au réexamen de la déclaration préalable déposée par la société TDF dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Belmont-Bretenoux le versement à la société TDF France de la somme de 4 500 euros au titre des frais exposés devant le Conseil d'Etat et devant le tribunal administratif de Toulouse et non compris dans les dépens. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la société TDF qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du 19 décembre 2022 juge des référés du tribunal administratif de Toulouse est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 29 mai 2022 par laquelle le maire de Belmont-Bretenoux s'est opposé à la déclaration préalable de la société TDF est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au maire de Belmont-Bretenoux de procéder au réexamen de la déclaration préalable déposée par la société TDF dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la société TDF est rejeté.

Article 5 : Les conclusions présentées par la commune de Belmont-Bretenoux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la société TDF et à la commune de Belmont-Bretenoux.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 470172
Date de la décision : 30/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 30 nov. 2023, n° 470172
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Alexandre Trémolière
Rapporteur public ?: M. Clément Malverti
Avocat(s) : SCP MARLANGE, DE LA BURGADE ; SCP PIWNICA & MOLINIE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:470172.20231130
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