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18/10/2023 | FRANCE | N°472088

France | France, Conseil d'État, 8ème chambre, 18 octobre 2023, 472088


La Fédération départementale de la libre pensée de la Charente-Maritime a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision implicite du 29 mars 2021 par laquelle le maire de La Flotte (Charente-Maritime) a refusé de déplacer une statue de la Vierge Marie située avenue du 8 mai 1945. Par un jugement n° 2100952 du 3 mars 2022, ce tribunal a annulé cette décision et enjoint au maire de procéder à l'enlèvement de la statue dans un délai de six mois.

Par un arrêt n° 22BX01113 du 12 janvier 2023, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel

formé par la commune de La Flotte contre ce jugement.

I. Sous le n° 47...

La Fédération départementale de la libre pensée de la Charente-Maritime a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler la décision implicite du 29 mars 2021 par laquelle le maire de La Flotte (Charente-Maritime) a refusé de déplacer une statue de la Vierge Marie située avenue du 8 mai 1945. Par un jugement n° 2100952 du 3 mars 2022, ce tribunal a annulé cette décision et enjoint au maire de procéder à l'enlèvement de la statue dans un délai de six mois.

Par un arrêt n° 22BX01113 du 12 janvier 2023, la cour administrative d'appel de Bordeaux a rejeté l'appel formé par la commune de La Flotte contre ce jugement.

I. Sous le n° 472088, par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 13 mars et 13 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de La Flotte demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la Fédération départementale de la libre pensée de Charente-Maritime la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

II. Sous le n° 475503, par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 juin et 4 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de La Flotte demande au Conseil d'Etat d'ordonner, sur le fondement de l'article R. 821-5 du code de justice administrative, le sursis à exécution du même arrêt du 12 janvier 2023.

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi du 9 décembre 1905 concernant la séparation des Eglises et de l'Etat ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, Mégret, avocat de la commune de La Flotte ;

Considérant ce qui suit :

1. Le pourvoi et la requête présentés par la commune de La Flotte tendent respectivement à l'annulation et au sursis à exécution du même arrêt. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

Sur le pourvoi dirigé contre l'arrêt attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".

3. Pour demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, la commune de La Flotte soutient que la cour administrative d'appel de Bordeaux :

- l'a insuffisamment motivé en ne visant pas la Constitution, le code général des collectivités territoriales, le code des relations entre le public et l'administration et le code général de la propriété des personnes publiques dont elle a nécessairement fait application pour rejeter sa requête ;

- a statué ultra petita en jugeant, après avoir jugé que la commune ne détenait le terrain sur lequel est érigée la statue que de façon indivise avec une personne privée, ce dont il se déduisait nécessairement que cette parcelle n'appartenait pas à son domaine public, qu'elle n'était pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif avait fait droit aux conclusions de la Fédération départementale de la libre pensée tendant à ce qu'il lui soit enjoint de déplacer cette statue hors du domaine public communal ;

- a commis une erreur de droit en jugeant que le terrain, en indivision entre une personne publique et une personne privée, sur lequel est érigée la statue en litige constituait un emplacement public au sens et pour l'application de l'article 28 de la loi du 9 décembre 1905 ;

- a commis une erreur de droit et l'a insuffisamment motivé en se fondant, pour juger que la statue en litige constituait, au sens et pour l'application de la loi du 9 décembre 1905, un signe ou emblème religieux, sur ses seules caractéristiques, sans rechercher si elle revêtait une pluralité de significations et présentait un caractère culturel et sans tenir compte de l'absence de tout élément de prosélytisme, des conditions particulières de l'installation de cette statue, de l'existence d'usages locaux ni du lieu de cette installation.

4. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.

Sur la requête à fin de sursis à exécution :

5. Aux termes du premier alinéa de l'article R. 821-5 du code de justice administrative : " La formation de jugement peut, à la demande de l'auteur du pourvoi, ordonner qu'il soit sursis à l'exécution d'une décision juridictionnelle rendue en dernier ressort si cette décision risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables et si les moyens invoqués paraissent, en l'état de l'instruction, sérieux et de nature à justifier, outre l'annulation de la décision juridictionnelle rendue en dernier ressort, l'infirmation de la solution retenue par les juges du fond ".

6. Il résulte de ce qui précède que le pourvoi formé contre l'arrêt attaqué n'est pas admis. Par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à l'exécution de cet arrêt sont devenues sans objet. Il n'y a dès lors plus lieu d'y statuer.

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de La Flotte une somme de 1 000 euros à verser à la Fédération départementale de la libre pensée de la Charente-Maritime au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de la commune de La Flotte n'est pas admis.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la commune de La Flotte tendant à ce que soit prononcé le sursis à exécution de l'arrêt du 12 janvier 2023 de la cour administrative d'appel de Bordeaux.

Article 3 : La commune de La Flotte versera une somme de 1 000 euros à la Fédération départementale de la libre pensée de la Charente-Maritime au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la commune de La Flotte et à la Fédération départementale de la libre pensée de la Charente-Maritime.

Délibéré à l'issue de la séance du 5 octobre 2023 où siégeaient : M. Jonathan Bosredon, conseiller d'Etat, présidant ; M. Hervé Cassagnabère, conseiller d'Etat et Mme Ophélie Champeaux, maître des requêtes-rapporteure.

Rendu le 18 octobre 2023.

Le président :

Signé : M. Jonathan Bosredon

La rapporteure :

Signé : Mme Ophélie Champeaux

La secrétaire :

Signé : Mme Michelle Bailleul


Synthèse
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 472088
Date de la décision : 18/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 18 oct. 2023, n° 472088
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Ophélie Champeaux
Rapporteur public ?: Mme Karin Ciavaldini
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP BORE, SALVE DE BRUNETON, MEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:472088.20231018
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