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13/10/2023 | FRANCE | N°467863

France | France, Conseil d'État, 1ère - 4ème chambres réunies, 13 octobre 2023, 467863


Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 28 septembre 2022 et le 28 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 mars 2022 fixant pour l'année 2022 les éléments tarifaires mentionnés aux I et IV de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale, ainsi que les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux ;


2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'annexe XIV de l'arrêté du 28 mars 2022 en tant...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés le 28 septembre 2022 et le 28 avril 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 28 mars 2022 fixant pour l'année 2022 les éléments tarifaires mentionnés aux I et IV de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale, ainsi que les décisions implicites de rejet de ses recours gracieux ;

2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'annexe XIV de l'arrêté du 28 mars 2022 en tant qu'elle fixe à 1,59 % le coefficient de minoration tarifaire applicable aux établissements mentionnés aux b et c de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et aux établissements privés à but non lucratif mentionnés au d du même article ;

3°) d'enjoindre au ministre de la santé et de la prévention et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique de prendre un nouvel arrêté tenant compte du montant réel de l'inflation et de fixer à 0 % le coefficient de minoration tarifaire pour les établissements mentionnés aux b et c de l'article L. 162-22-6 du code de la sécurité sociale et pour les établissements privés à but non lucratif mentionnés au d du même article ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2021-1754 du 23 décembre 2021 ;

- le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. En vertu des dispositions des articles L. 162-22-9, L. 162-22-9-1, L. 162-22-10 et R. 162-33-5 du code de la sécurité sociale, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent chaque année, dans le respect du montant de l'objectif des dépenses d'assurance maladie commun aux activités de médecine, chirurgie, gynécologie-obstétrique et odontologie exercées par les établissements de santé fixé en fonction de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie, certains éléments tarifaires, dont les tarifs nationaux des prestations d'hospitalisation mentionnées au 1° de l'article L. 162-22-6 du même code donnant lieu à une prise en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, qui prennent effet le 1er mars de l'année en cours. Ces tarifs sont minorés, notamment, par un coefficient prévu au cinquième alinéa de l'article R. 162-33-5 de ce code qui tient compte, pour les différentes catégories d'établissements de santé bénéficiaires, des effets générés par les dispositifs d'allégements fiscaux et sociaux ayant pour objet de réduire le coût du travail, dont la liste est fixée par arrêté des mêmes ministres. La Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) demande l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 28 mars 2022 fixant pour l'année 2022 les éléments tarifaires mentionnés aux I et IV de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale.

2. En premier lieu, aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : (...) / 2° les chefs de service (...)". Contrairement à ce que soutient la fédération requérante, Mme A... B..., nommée cheffe de service, adjointe à la directrice générale de l'offre de soins, à l'administration centrale du ministère des solidarités et de la santé, à compter du 15 janvier 2021, pour une durée de trois ans, par arrêté du Premier ministre et du ministre des solidarités et de la santé en date du 22 décembre 2020 publié au Journal officiel de la République française du 24 décembre 2020, avait compétence à compter du jour de prise d'effet de sa nomination, en application des dispositions précitées, pour signer, au nom du ministre chargé de la santé, l'arrêté attaqué.

3. En deuxième lieu, aux termes du I de l'article R. 162-33-4 du code de la sécurité sociale : " Chaque année, dans un délai de quinze jours suivant la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale, les ministres chargés de la santé, de la sécurité sociale et du budget arrêtent le montant de l'objectif de dépenses mentionné à l'article L. 162-22-9 " et le premier alinéa de l'article R. 162-33-5 du même code prévoit que : " Dans un délai de quinze jours suivant la publication de l'arrêté mentionné au I de l'article R. 162-33-4, les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent les éléments tarifaires mentionnés aux 1° à 3° du I de l'article L. 162-22-10 dans le respect de l'objectif de dépenses mentionné à l'article L. 162-22-9 ".

4. La circonstance que l'arrêté fixant pour 2022 l'objectif des dépenses d'assurance maladie commun aux activités de médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie ait été pris au-delà du délai de quinze jours imparti par l'article R. 162-33-4 du code de la sécurité sociale à compter de la promulgation de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 et que l'arrêté attaqué, fixant les tarifs de ces spécialités, n'ait, lui-même, pas été pris dans le délai prévu à l'article R. 162-33-5 du code de la sécurité sociale est sans incidence sur la légalité de cet arrêté.

5. En troisième lieu, la fédération requérante ne peut utilement soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché de rétroactivité illégale dès lors que la date d'entrée en vigueur des tarifs nationaux des prestations mentionnées au 1° de l'article L. 162-22-6 qu'il fixe est déterminée par le cinquième alinéa du I de l'article L. 162-22-10 du code de la sécurité sociale.

6. En quatrième et dernier lieu, d'une part, la fédération requérante ne peut non plus utilement soutenir qu'en tenant compte, pour arrêter les tarifs litigieux, d'une prévision d'inflation pour l'année 2022 qui s'est révélée trop faible et aurait conduit la loi de financement de la sécurité sociale pour 2022 à fixer un objectif national des dépenses d'assurance maladie sous-dimensionné, le ministre aurait commis une erreur manifeste d'appréciation, aboutissant à ce que les tarifs arrêtés pour 2022 ne soient pas représentatifs du coût des prestations d'hospitalisation comme le prévoit l'article R. 162-33-5 du code de la sécurité sociale.

7. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier, contrairement à ce que soutient la fédération requérante, que le coefficient de minoration de -1,59 % des tarifs applicables aux établissements privés à but non lucratif, pris en application du cinquième alinéa de l'article R. 162-33-5 du code de la sécurité sociale pour tenir compte des allègements de charges fiscales et sociales désignés à l'article 8 de l'arrêté attaqué et figurant à son annexe XIV, dont bénéficient ces établissements, serait entaché, eu égard à la baisse des tarifs qu'il entraîne comparée au bénéfice retiré de ces dispositifs, d'une erreur manifeste d'appréciation.

8. Il résulte de tout ce qui précède que la fédération requérante n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté qu'elle attaque. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par suite, qu'être également rejetées.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à la Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) et au ministre de la santé et de la prévention.

Copie en sera adressée au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 2 octobre 2023 où siégeaient : Mme Christine Maugüé, présidente adjointe de la section du contentieux, présidant ; Mme Maud Vialettes, Mme Gaëlle Dumortier, présidentes de chambre ; M. Jean-Luc Nevache, M. Jean-Dominique Langlais, M. Alban de Nervaux, conseillers d'Etat et Mme Agnès Pic, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 13 octobre 2023.

La présidente :

Signé : Mme Christine Maugüé

La rapporteure :

Signé : Mme Agnès Pic

Le secrétaire :

Signé : M. Hervé Herber


Synthèse
Formation : 1ère - 4ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 467863
Date de la décision : 13/10/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 oct. 2023, n° 467863
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Agnès Pic
Rapporteur public ?: M. Mathieu Le Coq

Origine de la décision
Date de l'import : 22/10/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:467863.20231013
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