Vu la procédure suivante :
La société CM-CIC Leasing Solutions a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de la Remaudière à lui verser la somme de 29 328, 66 euros en règlement des loyers du contrat de location financière d'un photocopieur conclu le 1er avril 2012.
La société CM-CIC Leasing Solutions a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de la Remaudière à lui verser la somme de 79 217,96 euros au titre de sa responsabilité contractuelle sans faute en raison de la résiliation pour motif d'intérêt général du contrat de location financière d'un photocopieur conclu le 1er avril 2012, et à titre subsidiaire, de condamner la commune de la Remaudière à lui verser la somme de 26 662,50 euros au titre de l'enrichissement sans cause dont elle a bénéficié et d'enjoindre à la commune de lui restituer le matériel objet de la convention. Par un jugement n°s 1806047, 1903833 du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de la Remaudière à verser à la société CM-CIC Leasing Solutions la somme de 17 994 euros et rejeté le surplus des conclusions de cette société.
Par un arrêt n° 20NT02614 du 3 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la commune de la Remaudière et sur appel incident de la société CM-CIC Leasing Solutions, annulé ce jugement et rejeté la demande de la société CM -CIC Leasing Solutions ainsi que ses conclusions d'appel.
Par une décision du 17 janvier 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société CM-CIC Leasing Solutions dirigées contre l'arrêt n° 20NT02614 du 3 décembre 2021 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant seulement que cet arrêt statue sur les conclusions de la société CM-CIC Leasing Solutions tendant au versement d'une somme au titre des frais d'acquisition du photocopieur.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- - le code des marchés publics ;
- - le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Elise Adevah-Poeuf, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Marc Pichon de Vendeuil, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de la société CM-CIC Leasing Solutions et au cabinet François Pinet, avocat de la commune de la Remaudière ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la commune de la Remaudière (Loire-Atlantique) a conclu, le 1er avril 2012, avec la société GE Capital Equipement Finance, un contrat ayant pour l'objet la location d'un photocopieur, pour une durée de soixante-douze mois et pour un loyer toutes taxes comprises de 3 576, 01 euros par trimestre. Par un arrêté du 21 avril 2016, la maire de la Remaudière, estimant que la durée du marché était excessive, en a prononcé la résiliation à compter du 23 février 2016. En juillet 2018, la société CM-CIC Leasing Solutions, venant aux droits de la société GE Capital Equipement, a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la condamnation de la commune de la Remaudière à lui verser la somme de 29 328, 66 euros correspondant aux loyers non versés et à ce qu'il soit enjoint à cette collectivité de lui restituer le photocopieur objet de la convention. Elle a ensuite saisi, en avril 2019, ce même tribunal d'une seconde demande tendant à la condamnation de la commune à lui verser, à titre principal, la somme de 79 217, 96 euros au titre de sa responsabilité contractuelle sans faute du fait de la résiliation pour motif d'intérêt général du contrat, ou à titre subsidiaire, la somme de 26 662, 50 euros au titre de l'enrichissement sans cause dont aurait bénéficié la commune. Par un jugement du 11 mars 2020, le tribunal administratif de Nantes a condamné la commune de la Remaudière à verser à la société CM-CIC Leasing Solutions la somme de 17 994 euros en réparation des préjudices nés de la résiliation du contrat du 1er avril 2012. Par un arrêt du 3 décembre 2021, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de la commune de la Remaudière et sur appel incident de la société CM-CIC Leasing Solutions, annulé ce jugement et rejeté la demande de la société CM-CIC Leasing Solutions ainsi que ses conclusions d'appel. Par une décision du 17 janvier 2023, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de la société CM-CIC Leasing Solutions dirigées contre l'arrêt du 3 décembre 2021 de la cour administrative d'appel de Nantes en tant seulement que cet arrêt statue sur les conclusions de la société CM-CIC Leasing Solutions tendant au versement d'une somme au titre des frais d'acquisition du photocopieur.
2. En vertu des règles générales applicables aux contrats administratifs, la personne publique cocontractante peut toujours, pour un motif d'intérêt général, résilier unilatéralement un tel contrat, sous réserve des droits à indemnité de son cocontractant. Dans le cas particulier d'un contrat entaché d'une irrégularité d'une gravité telle que, s'il était saisi, le juge du contrat pourrait en prononcer l'annulation ou la résiliation, la personne publique peut, sous réserve de l'exigence de loyauté des relations contractuelles, résilier unilatéralement le contrat sans qu'il soit besoin qu'elle saisisse au préalable le juge. Après une telle résiliation unilatéralement décidée pour ce motif par la personne publique, le cocontractant peut prétendre, sur un terrain quasi-contractuel, pour la période postérieure à la date d'effet de la résiliation, au remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à la collectivité envers laquelle il s'était engagé. Si l'irrégularité du contrat résulte d'une faute de l'administration, le cocontractant peut, en outre, sous réserve du partage de responsabilités découlant le cas échéant de ses propres fautes, prétendre à la réparation du dommage imputable à la faute de l'administration. Saisi d'une demande d'indemnité sur ce second fondement, il appartient au juge d'apprécier si le préjudice allégué présente un caractère certain et s'il existe un lien de causalité direct entre la faute de l'administration et le préjudice.
3. Les dépenses utiles comprennent, à l'exclusion de toute marge bénéficiaire, les dépenses qui ont été directement engagées par le cocontractant pour la réalisation des fournitures, travaux ou prestations destinés à l'administration. Ne peut être prise en compte que la quote-part des frais généraux directement liée à l'exécution du marché et à ce titre utile à la personne publique. Ne peuvent pas être regardés comme utilement exposés pour l'exécution du marché les frais de communication ainsi que, dans le cas où le contrat en cause est un marché public, sauf s'il s'agit d'un marché de partenariat, les frais financiers engagés par le cocontractant. Le cocontractant ne peut davantage demander au titre des dépenses utiles à être indemnisé de la valeur non amortie, à la date de la résiliation du contrat, des dépenses d'investissement qu'il a consenties pour l'acquisition d'un bien dont il demeure propriétaire.
4. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le photocopieur est demeuré la propriété de la société CM-CIC Leasing Solutions durant toute la durée du contrat et à son expiration. Par suite, il résulte de ce qui a été dit au point précédent qu'en jugeant que la part non amortie de ce bien ne constituait pas une dépense utile à la collectivité, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ni dénaturé les faits qui lui étaient soumis.
5. En second lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'objet du marché litigieux était la location à la commune d'un photocopieur. Par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir qu'en jugeant que " les frais financiers engagés par le cocontractant de l'administration pour assurer l'exécution de ce contrat résilié (...) ne peuvent être regardés comme des dépenses utiles à la collectivité ", la cour administrative d'appel aurait commis une erreur de droit. La circonstance qu'elle ait, par un motif surabondant, qualifié de frais financiers " le coût d'achat du matériel ", alors qu'il n'était pas contesté devant elle que la société CM-CIC Leasing Solutions n'avait pas eu recours à l'emprunt pour l'acquisition du matériel, est sans incidence sur le bien-fondé des motifs de l'arrêt attaqué.
6. Il résulte de ce qui précède que la société CM-CIC Leasing Solutions n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société CM-CIC Leasing Solutions la somme de 3 000 euros à verser à la commune de la Remaudière au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font en revanche obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de la Remaudière qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de la société CM-CIC Leasing Solutions est rejeté.
Article 2 : La société CM-CIC Leasing Solutions versera à la commune de la Remaudière une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société CM-CIC Leasing Solutions et à la commune de la Remaudière.