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25/07/2023 | FRANCE | N°462581

France | France, Conseil d'État, 3ème chambre, 25 juillet 2023, 462581


Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article L.521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 18 janvier 2022 par lequel le président du conseil d'administration du syndicat intercommunal des transports collectifs de Montereau et de ses environs (SITCOME) a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux mois et dix-huit jours à compter du 1er février 2022. Par une ordonnance n° 2201662 du 9 mars 2022, le juge des réf

érés du tribunal administratif de Melun a fait droit à sa demande.
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Vu la procédure suivante :

M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun, sur le fondement de l'article L.521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 18 janvier 2022 par lequel le président du conseil d'administration du syndicat intercommunal des transports collectifs de Montereau et de ses environs (SITCOME) a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux mois et dix-huit jours à compter du 1er février 2022. Par une ordonnance n° 2201662 du 9 mars 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 mars et 8 avril 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, le SITCOME demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de mettre à la charge de M. A... B..., la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Juliana Nahra, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Marie-Gabrielle Merloz, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat du syndicat intercommunal des transports collectifs de Montereau et ses environs et au cabinet Rousseau, Tapie, avocat de M. A... B... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Melun que M. A... B..., adjoint administratif en charge du pôle véhicule du service de transports à la demande assuré par le syndicat intercommunal des transports collectifs de Montereau et ses environs (SITCOME), s'est vu infliger, par un arrêté du 18 janvier 2022, une sanction d'exclusion temporaire d'une durée de deux mois et 18 jours pour divers manquements dans la conduite de ce service. M. B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Melun la suspension de cette sanction, requête à laquelle le juge a fait droit par une ordonnance du 9 mars 2022. Le SITCOME se pourvoit en cassation contre cette ordonnance.

2. En vertu de l'article L. 5 du code de justice administrative, l'instruction des affaires est contradictoire. Aux termes de l'article L. 522-1 du même code : " Le juge des référés statue au terme d'une procédure contradictoire écrite ou orale. /Lorsqu'il lui est demandé de prononcer les mesures visées aux articles L. 521-1 et L. 521-2, de les modifier ou d'y mettre fin, il informe sans délai les parties de la date et de l'heure de l'audience publique.(...) ". En vertu des articles R. 522-4 et R. 522-6 du même code, notification est faite de la requête au défendeur et les parties sont convoquées sans délai et par tout moyen à l'audience.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le SITCOME n'a pas reçu le courrier du 19 janvier 2022 par lequel la juridiction lui a communiqué la demande de suspension formée par M. B... et l'a convoqué à l'audience publique. Aucune autre communication de la demande en référé et de l'avis d'audience ne lui a été adressée avant la tenue de l'audience. Le SITCOME n'a ainsi été mis à même ni de présenter des observations en défense ni d'être présent ou représenté à l'audience du juge des référés. Par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, le SITCOME est fondé à soutenir que l'ordonnance est entachée d'irrégularité et qu'elle doit être annulée.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension présentée par M. B... en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".

Sur l'urgence :

6. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés, saisi de conclusions tendant à la suspension d'un acte administratif, d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

7. Pour justifier de l'urgence à suspendre la décision attaquée, M. B... fait valoir la perte intégrale de sa rémunération pendant la durée de sa suspension et ses charges financières fixes supportées par sa famille comprenant de quatre enfants. Ces circonstances ne sont pas contestées par le SITCOME. Par suite, la condition d'urgence au sens des dispositions précitées doit être regardée comme remplie.

Sur le doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée :

8. En l'état de l'instruction le moyen tiré de ce que la sanction infligée à M. B... est disproportionnée, eu égard aux fautes qui lui sont reprochées, est de nature à faire naître un doute sérieux quant à sa légalité.

9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens invoqués, qu'il y a lieu de prononcer la suspension de l'exécution de la décision par laquelle le président du conseil d'administration du SITCOME a prononcé à l'encontre de M. B... une sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux mois et dix-huit jours qui a pris effet à compter du 1er février 2022.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SITCOME la somme de 4 000 euros à verser à M. B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Melun du 9 mars 2022 est annulée.

Article 2 : L'exécution de l'arrêté du président du conseil d'administration du SITCOME prononçant à l'encontre de M. B... la sanction d'exclusion temporaire de fonctions de deux mois et dix-huit jours à compter du 1er février 2022 est suspendue jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur sa légalité.

Article 3 : Le SITCOME versera à M. B... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions du SITCOME présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée au syndicat intercommunal des transports collectifs de Montereau et ses environs et à M. A... B....

Délibéré à l'issue de la séance du 13 juillet 2023 où siégeaient : M. Stéphane Verclytte, président de chambre, présidant ; M. Christian Fournier, conseiller d'Etat et Mme Juliana Nahra, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.

Rendu le 25 juillet 2023.

Le président :

Signé : M. Stéphane Verclytte

La rapporteure :

Signé : Mme Juliana Nahra

La secrétaire :

Signé : Mme Elisabeth Ravanne


Synthèse
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 462581
Date de la décision : 25/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 25 jui. 2023, n° 462581
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Juliana Nahra
Rapporteur public ?: Mme Marie-Gabrielle Merloz
Avocat(s) : CABINET ROUSSEAU, TAPIE ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:462581.20230725
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