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20/07/2023 | FRANCE | N°468686

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 20 juillet 2023, 468686


Vu la procédure suivante :

La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 10 juin 2022 par lequel le maire de la commune de La Garde (Var) s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur l'implantation d'une station de radiotéléphonie mobile et d'y faire droit ou de procéder à une nouvelle instruction de sa demande dans un délai d'un mois, sous astreinte de 500 euros par jour de retard. >
Par une ordonnance n° 2202701 du 19 octobre 2022, le juge des référés du ...

Vu la procédure suivante :

La société Free Mobile a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Toulon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de l'arrêté du 10 juin 2022 par lequel le maire de la commune de La Garde (Var) s'est opposé à sa déclaration préalable de travaux portant sur l'implantation d'une station de radiotéléphonie mobile et d'y faire droit ou de procéder à une nouvelle instruction de sa demande dans un délai d'un mois, sous astreinte de 500 euros par jour de retard.

Par une ordonnance n° 2202701 du 19 octobre 2022, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 3 et 17 novembre 2022 et le 19 juin 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Free Mobile demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de faire droit à ses conclusions ;

3°) de mettre à la charge de la commune de La Garde la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Julien Eche, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Spinosi, avocat de la société Free Mobile, et à la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la commune de La Garde ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision (...) ".

2. La société Free Mobile se pourvoit en cassation contre l'ordonnance du 19 octobre 2022 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Toulon, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande de suspension de la décision du 10 juin 2022 par laquelle le maire de La Garde s'est opposé à sa déclaration préalable en vue de l'édification d'une station relais de téléphonie mobile sur le territoire de cette commune.

Sur le pourvoi :

3. Aux termes de l'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme applicable : " les ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics sont autorisés dans toutes les zones, sous réserve de leur intégration correcte dans le site. / [En raison de leurs caractéristiques particulières, les ouvrages techniques d'intérêt public ou d'intérêt collectif (pylônes de lignes électriques, stations d'épuration, antennes, transformateurs électriques...) ne sont pas soumis aux règles de prospect, de hauteur et d'implantation des différentes zones, à condition de ne pas porter atteinte au caractère de la zone dans laquelle ils sont implantés et de limiter l'insécurité routière] ".

4. Pour rejeter sur le fondement des dispositions de l'article L. 522-3 du code de justice administrative la demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du maire du 10 juin 2022 s'opposant aux travaux déclarés par la société Free Mobile dès lors qu'il lui apparait manifeste qu'elle était mal fondée, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a nécessairement estimé que le moyen tiré de ce que cette décision méconnaissait l'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme n'était pas propre à créer un doute sérieux sur sa légalité. En statuant ainsi, alors qu'eu égard à leur objet, ces dispositions, reproduites au point 3, s'appliquent aux antennes et aux pylônes installés par les opérateurs dans le cadre de l'exploitation d'un réseau de télécommunications, et qu'à l'inverse ni les dispositions de l'article A1, applicables aux constructions de la sous-destination " locaux techniques et industriels des administrations publiques assimilées ", ni les règles de hauteur et d'implantation au regard des limites séparatives prescrites par les articles A5 et A7 du même règlement, qui motivent le refus litigieux, n'étaient opposables au projet, le juge des référés a commis une erreur de droit. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'ordonnance attaquée doit être annulée.

5. Il y a lieu, par application de l'article L. 821-2 du code de justice administrative, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée.

Sur la demande de suspension :

6. D'une part, eu égard à l'intérêt public qui s'attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile, aux intérêts propres de la société Free Mobile qui a pris des engagements vis-à-vis de l'Etat quant à la couverture du territoire par son réseau et à la circonstance que le territoire de la commune de La Garde n'est que partiellement couvert par le réseau de téléphonie mobile de la société requérante, la condition d'urgence exigée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie.

7. D'autre part, il résulte de ce qui a été dit au point 4 que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 7 du règlement du plan local d'urbanisme est, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

8. Pour l'application de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, en l'état du dossier soumis au Conseil d'Etat, aucun autre moyen n'est susceptible d'entraîner la suspension de la décision attaquée.

9. Il résulte de ce qui précède que la Société Free Mobile est fondée à demander la suspension de l'exécution de l'arrêté contesté du 10 juin 2022.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

10. Il y a lieu d'enjoindre au maire de La Garde de procéder à une nouvelle instruction de la déclaration préalable de travaux de la société Free Mobile dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision, sans qu'il soit besoin d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de La Garde le versement à la société Free Mobile d'une somme de 4 500 euros au titre des frais qu'elle a engagés devant le tribunal administratif et le Conseil d'Etat. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font, en revanche, obstacle à ce que soit mis à la charge de cette société, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que demande la commune de La Garde au même titre.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Toulon du 19 octobre 2022 est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 10 juin 2022 du maire de La Garde s'opposant à la déclaration préalable de travaux déposée par la société Free Mobile est suspendue.

Article 3 : Il est enjoint au maire de La Garde de procéder à un nouvel examen de la déclaration préalable déposée par la société Free Mobile dans un délai d'un mois à compter de la notification de la présente décision.

Article 4 : La commune de La Garde versera à la société Free Mobile une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Les conclusions de la commune de La Garde tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : La présente décision sera notifiée à la société Free Mobile et à la commune de La Garde.


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 468686
Date de la décision : 20/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 jui. 2023, n° 468686
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Julien Eche
Rapporteur public ?: M. Clément Malverti
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT ; SCP SPINOSI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:468686.20230720
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