La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/06/2023 | FRANCE | N°459184

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 12 juin 2023, 459184


Vu la procédure suivante :

La société Distribution Casino France a demandé à la cour administrative d'appel de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 août 2020 par lequel le maire de Roquefort-les-Pins a délivré à la société Roquefort-les-Pins Centre village un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 916 m² d'un ensemble commercial de 2 194 m², portant sa surface totale de vente à 3 110 m², sur le territoire de la commune. Par un arrêt n° 20MA03887 du 4 octobre 2021, la cour administrative d'appel

a rejeté sa requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire...

Vu la procédure suivante :

La société Distribution Casino France a demandé à la cour administrative d'appel de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 21 août 2020 par lequel le maire de Roquefort-les-Pins a délivré à la société Roquefort-les-Pins Centre village un permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 916 m² d'un ensemble commercial de 2 194 m², portant sa surface totale de vente à 3 110 m², sur le territoire de la commune. Par un arrêt n° 20MA03887 du 4 octobre 2021, la cour administrative d'appel a rejeté sa requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 6 décembre 2021, 7 mars 2022 et 20 février 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Distribution Casino France demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa requête ;

3°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Roquefort-les-Pins et de la société Roquefort-les-Pins Centre village la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Edouard Solier, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la société Distribution Casino France, à la SARL Matuchansky, Poupot, Valdelièvre, avocat de la commune de Roquefort-les-Pins et à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de la société Roquefort les Pins Centre village et de la société Les Nouveaux Constructeurs ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Roquefort-les-Pins Centre village a déposé le 31 octobre 2019 une demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale en vue de l'extension de 916 m² d'un ensemble commercial de 2 194 m², et prévoyant la création de 11 magasins, sur le territoire de la commune de Roquefort-les-Pins. Le 15 janvier 2020, la commission départementale d'aménagement commercial des Alpes-Maritimes a émis un avis favorable au projet. Saisie d'un recours formé par la société Distribution Casino France, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet le 25 juin 2020. Par un arrêté du 21 août 2020, le maire de Roquefort-les-Pins a délivré le permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. La société Distribution Casino France se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 4 octobre 2021 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2020 en tant qu'il tient lieu d'autorisation d'exploitation commerciale.

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que les aménagements nécessaires à la desserte du projet sont prévus par un contrat de concession d'aménagement et que ceux-ci sont financés par le porteur du projet dans le cadre d'une convention de projet urbain partenarial. En estimant, dès lors, que la réalisation de ces aménagements à l'ouverture du projet litigieux était suffisamment certaine, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit, ni entaché son arrêt de dénaturation des pièces du dossier.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 752-1 du code de commerce : " Sont soumis à une autorisation d'exploitation commerciale les projets ayant pour objet : (...) / 5° L'extension de la surface de vente d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil des 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet ; (...) ". Aux termes de l'article L. 752-6 du même code, dans sa version applicable au litige : " I. L'autorisation d'exploitation commerciale mentionnée à l'article L. 752-1 est compatible avec le document d'orientation et d'objectifs des schémas de cohérence territoriale ou, le cas échéant, avec les orientations d'aménagement et de programmation des plans locaux d'urbanisme intercommunaux comportant les dispositions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 151-6 du code de l'urbanisme. / La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : (...) / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales (...) ; ". Aux termes de l'article R. 752-6 du même code, dans sa version applicable au litige : " I - La demande est accompagnée d'un dossier comportant les éléments mentionnés ci-après ainsi que, en annexe, l'analyse d'impact définie au III de l'article L. 752-6. / 1° Informations relatives au projet : (...) / b) Pour les projets de création d'un ensemble commercial : (...) / - la surface de vente et le secteur d'activité de chacun des magasins de plus de 300 mètres carrés de surface de vente ; (...) / g) Autres renseignements : - si le projet s'intègre dans un ensemble commercial existant : une liste des magasins de cet ensemble commercial exploités sur plus de 300 mètres carrés de surface de vente, ainsi qu'à titre facultatif, la mention des enseignes de ces magasins ; (...) ". Il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commission d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce. Il ne résulte pas de ces dispositions que pour apprécier le respect de l'objectif fixé par le législateur en matière de protection des consommateurs, le dossier accompagnant une demande d'autorisation d'exploitation commerciale ayant pour objet l'extension d'un ensemble commercial ayant déjà atteint le seuil de 1 000 mètres carrés ou devant le dépasser par la réalisation du projet doive comporter la surface de vente et le secteur d'activité des magasins dont la surface de vente est inférieure à 300 mètres carrés.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le projet litigieux, qui porte sur l'extension de 916 m² d'un ensemble commercial d'une surface de vente de 2 194 m², prévoit la création de onze magasins ayant chacun une surface de vente inférieure à 300 m². Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en jugeant, d'une part, que le dossier accompagnant la demande d'autorisation d'exploitation commerciale du projet litigieux n'était pas tenu de comporter la surface de vente et le secteur d'activité des onze magasins le composant et, d'autre part, que la circonstance que le projet litigieux ne permettait pas de s'assurer de la variété de l'offre proposée faute pour le dossier accompagnant la demande de comporter la surface de vente et le secteur d'activité de chacun de ces magasins ne suffisait pas à elle-seule à regarder ce projet comme méconnaissant l'objectif de protection des consommateurs, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit et a porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation.

5. En troisième et dernier lieu, aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : 1° En matière d'aménagement du territoire : (...) / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; (...) ". Il ressort des pièces du dossier, ainsi que l'a relevé la cour administrative d'appel de Marseille, que la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas limité son examen à l'extension qui lui était soumise, mais a examiné le projet dans sa globalité. Il ne ressort pas non plus des termes de son arrêt que la cour n'aurait pas elle-même pris en compte le projet dans sa globalité pour apprécier ses effets au regard du critère de la consommation économe de l'espace. Par suite, c'est en tout état de cause sans commettre d'erreur de droit et par une appréciation souveraine exempte de dénaturation que la cour administrative d'appel de Marseille a jugé que le projet litigieux ne méconnait pas le critère de la consommation économe de l'espace prévu au b) du 1° de l'article L. 752-6 du code de commerce.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Distribution Casino France n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille qu'elle attaque.

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Roquefort-les-Pins et de la société Roquefort-les-Pins Centre village, qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société Distribution Casino France une somme de 3 000 euros à verser, d'une part à la commune de Roquefort-les-Pins, d'autre part à la société Roquefort-les-Pins- Centre village et à la société Les Nouveaux Constructeurs, au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le pourvoi de société Distribution Casino France est rejeté.

Article 2 : La société Distribution Casino France versera une somme de 3 000 euros, d'une part à la commune de Roquefort-les-Pins, d'autre part à la société Roquefort-les-Pins Centre village et à la société Les Nouveaux Constructeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la société Distribution Casino France, à la commune de Roquefort-les-Pins, à la société Roquefort-les-Pins Centre village, à la société Les Nouveaux Constructeurs, à la société Bérénice pour la ville et le commerce, et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 459184
Date de la décision : 12/06/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 jui. 2023, n° 459184
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Edouard Solier
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT ; SCP FOUSSARD, FROGER ; SARL MATUCHANSKY, POUPOT, VALDELIEVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:459184.20230612
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award