Vu la procédure suivante :
M. D... C... et Mme B... A..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Versailles d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 16 avril 2021 par lequel le maire de Maisons-Laffitte a délivré à la société civile de construction vente 37, avenue du Général de Gaulle un permis de construire en vue de la démolition de cinq bâtiments et de la construction de trente-quatre logements, dont douze logements sociaux, d'un sous-sol sur deux niveaux comprenant quarante-sept places de stationnement et d'un local commercial, ainsi que la décision du 8 juillet 2021 rejetant leur recours gracieux. Par un jugement n° 2107624 du 22 avril 2022, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 24 juin et 23 septembre 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme C... demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande ;
3°) de mettre solidairement à la charge de la commune de Maisons-Laffitte et de la société 37, avenue du Général de Gaulle la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Sébastien Jeannard, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Mathieu Le Coq, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de M. et Mme C... et à Me Balat, avocat de la Commune de Maisons-Laffitte et à la SCP Marlange, de la Burgade, avocat de la société 37, avenue du Général de Gaulle ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par un arrêté du 16 avril 2021, le maire de Maisons-Laffitte a délivré à la société civile de construction vente 37, avenue du Général de Gaulle un permis de construire en vue de la démolition de cinq bâtiments et de la construction de trente-quatre logements, dont douze logements sociaux, d'un sous-sol sur deux niveaux comprenant quarante-sept places de stationnement et d'un local commercial. M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Versailles l'annulation pour excès de pouvoir de cet arrêté, ainsi que de la décision du 8 juillet 2021 par laquelle le maire de Maisons-Laffitte a rejeté leur recours gracieux. Par un jugement du 22 avril 2022, contre lequel M. et Mme C... se pourvoient en cassation, le tribunal administratif de Versailles a rejeté cette demande.
2. Aux termes de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'affaire est en état d'être jugée, les parties peuvent être informées de la date ou de la période à laquelle il est envisagé de l'appeler à l'audience. Cette information précise alors la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2. (...) ". Il résulte des derniers alinéas, respectivement, des articles R. 613-1 et R. 613-2 que lorsque la date prévue par l'article R. 611-11-1 est échue, l'instruction peut être close à la date d'émission de l'ordonnance qui prononce cette clôture ou à la date d'émission de l'avis d'audience.
3. En vertu de l'article R. 611-11-1, lorsque l'affaire est en état d'être jugée, le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel peut mettre en œuvre la procédure d'information des parties définie par les dispositions de cet article en leur indiquant la date ou la période à laquelle il est envisagé de l'appeler à l'audience, ainsi que la date à partir de laquelle l'instruction pourra être close par une clôture à effet immédiat. L'absence de production de mémoire par la partie en défense, que celle-ci ait été ou non mise en demeure de produire, ne fait pas obstacle à ce que le juge, s'il l'estime utile, mette en œuvre cette procédure. Cependant, la faculté de prendre une ordonnance de clôture d'instruction à effet immédiat n'est ouverte qu'à compter de la date fixée dans la lettre d'information et une fois expiré chacun des délais laissés aux parties pour produire un mémoire ou répliquer aux mémoires communiqués.
4. Il ressort des pièces de la procédure devant le tribunal administratif que celui-ci a informé, le 17 février 2022, les parties de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience, à savoir au deuxième trimestre 2022, et leur a précisé que l'instruction était susceptible d'être close par l'émission d'une ordonnance prise en application de l'article R. 611-11-1, qui pourrait intervenir à compter du 8 mars 2022, puis a communiqué, le 18 février 2022, à la commune ainsi qu'à M. et Mme C... un mémoire en défense produit par la société 37 avenue du Général de Gaulle, en leur impartissant un délai d'un mois pour y répondre.
5. Il résulte de ce qui a été dit au point 3 que, dès lors qu'il avait indiqué à M. et Mme C..., le 18 février 2022, qu'ils disposaient d'un délai de trente jours pour répliquer au mémoire en défense de la société 37, avenue du général de Gaulle qui leur avait été communiqué, il appartenait au tribunal d'attendre l'expiration du délai ainsi imparti pour clore l'instruction, alors même qu'il avait préalablement informé les parties qu'une telle clôture pouvait intervenir à tout moment à partir du 8 mars 2022. M. et Mme C... sont dès lors fondés à soutenir qu'en prononçant une telle clôture dès le 8 mars 2022, alors que le délai imparti aux requérants pour réplique au mémoire en défense qui leur avait été communiqué n'était pas encore expiré, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité.
6. Par suite, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, M. et Mme C... sont fondés à demander pour ce motif l'annulation du jugement qu'ils attaquent.
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société 37, avenue du Général de Gaulle et de la commune de Maisons-Laffite une somme de 1 000 euros chacune à verser à M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de M. et Mme C..., qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le jugement du 22 avril 2022 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Versailles.
Article 3 : La société 37, avenue Général de Gaulle et la commune de Maisons-Laffite verseront chacune une somme de 1 000 euros à M. et Mme C... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la société 37, avenue Général de Gaulle et par la commune de Maisons-Laffite au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. D... C... et Mme B... A..., épouse C..., à la commune de Maisons-Laffitte et à la société civile de construction vente 37, avenue Général de Gaulle.
Délibéré à l'issue de la séance du 11 mai 2023 où siégeaient : M. Damien Botteghi, conseiller d'Etat, présidant ; M. Jean-Luc Nevache, conseiller d'Etat et M. Sébastien Jeannard, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.
Rendu le 2 juin 2023.
Le président :
Signé : M. Damien Botteghi
Le rapporteur :
Signé : M. Sébastien Jeannard
Le secrétaire :
Signé : M. Mickaël Lemasson