La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/04/2023 | FRANCE | N°463009

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 14 avril 2023, 463009


Vu la procédure suivante :

M. B... D... et Mme A... D..., agissant tant en leur nom personnel qu'au nom de leurs enfants mineurs, ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a refusé de leur communiquer le dossier médical et administratif de M. D... et ceux de ses enfants mineurs établis à l'occasion de leur demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 1900198 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif a annulé cette décision en tant qu'elle porte sur

la communication des documents médicaux personnels de M. D... recueilli...

Vu la procédure suivante :

M. B... D... et Mme A... D..., agissant tant en leur nom personnel qu'au nom de leurs enfants mineurs, ont demandé au tribunal administratif de Limoges d'annuler la décision implicite par laquelle l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a refusé de leur communiquer le dossier médical et administratif de M. D... et ceux de ses enfants mineurs établis à l'occasion de leur demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 1900198 du 14 octobre 2021, le tribunal administratif a annulé cette décision en tant qu'elle porte sur la communication des documents médicaux personnels de M. D... recueillis par le collège de médecins, a enjoint à l'OFII de procéder à la communication de ces documents et a rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 7 avril et 7 juillet 2022 et le 27 janvier 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme D... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette leurs conclusions tendant à l'annulation de la décision implicite par laquelle l'OFII a refusé de faire droit à leur demande de communication du dossier administratif de M. D... et de ceux de ses enfants et les conclusions à fin d'injonction tendant à la communication de ces documents ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur demande ;

3°) de mettre à la charge de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) la somme de 5 000 euros à verser à la SCP Thouin-Palat, Boucard, leur avocat, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Esther de Moustier, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Thouin-Palat, Boucard, avocat de M. et Mme D..., avocat de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D... ont demandé au directeur de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) la communication du dossier médical et administratif élaboré dans le cadre de leur procédure de demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade et de parent d'enfant malade. Ils ont saisi la Commission d'accès aux documents administratifs (CADA), qui a rendu un avis favorable concernant la demande de communication du dossier médical de M. D... et un avis favorable sous réserve concernant le dossier médical de ses deux enfants. M. et Mme D... se pourvoient en cassation contre le jugement du 14 octobre 2021 en tant que le tribunal administratif de Limoges a rejeté comme irrecevables leurs conclusions tendant à la communication du dossier administratif de M. D... et de ceux de ses enfants et à ce qu'il soit enjoint à l'OFII de leur communiquer ces documents.

2. Il résulte des articles R. 311-12 et R. 311-13 du code des relations entre le public et l'administration que le silence gardé par l'administration pendant un délai d'un mois à compter de la réception d'une demande de communication d'un document administratif vaut décision de rejet. Aux termes de l'article R. 343-1 de ce code : " L'intéressé dispose d'un délai de deux mois à compter de la notification du refus (...) pour saisir la Commission d'accès aux documents administratifs / La commission est saisie par lettre, télécopie ou voie électronique. La saisine précise son objet et, le cas échéant, les dispositions sur lesquelles elle se fonde. Elle indique, lorsque le demandeur est une personne physique, ses nom, prénoms et domicile et, lorsqu'il s'agit d'une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et les nom et prénoms de la personne ayant qualité pour la représenter. Elle est accompagnée d'une copie, selon le cas, de la décision de refus ou de la demande restée sans réponse. La commission enregistre la demande lorsque celle-ci comporte l'ensemble de ces éléments après avoir, le cas échéant, invité le demandeur à la compléter (...) ". Selon l'article R. 343-5 du même code, une décision implicite de refus de communication de l'administration naît à l'expiration du délai de deux mois à compter de l'enregistrement de la demande de l'intéressé par la commission.

3. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. et Mme D... ont adressé à l'OFII la demande de communication du dossier administratif du premier et ceux de ses enfants le 31 octobre 2018 puis ont saisi la CADA dès le 12 novembre suivant, date à laquelle le délai d'un mois mentionné à l'article R. 311-13 du code des relations entre le public et l'administration n'était pas expiré, de sorte qu'aucun refus de communication n'était encore né. Toutefois, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure administrative et la recevabilité du recours contentieux qu'ils ont introduit contre le refus de communication de l'administration né à l'expiration du délai de deux mois à compter de l'enregistrement de la saisine par la CADA, dès lors qu'il est constant que cette dernière, à qui il était loisible de refuser l'enregistrement d'une telle saisine prématurée, y a procédé et a d'ailleurs rendu un avis postérieurement à la naissance de la décision de refus. Il s'ensuit qu'en jugeant que la demande de M. et Mme D... n'avait pas été précédée d'un recours administratif préalable obligatoire exercé de manière régulière au motif que la saisine de la CADA était intervenue avant que l'administration se soit prononcée, le tribunal administratif a commis une erreur de droit. Les requérants sont, par suite, fondés, par un pourvoi sur lequel il y a lieu de statuer contrairement à ce que soutient l'OFII, à demander l'annulation du jugement qu'ils attaquent en tant qu'il statue sur leurs conclusions relatives à la communication de leur dossier administratif, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens qu'ils soulèvent.

4. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de régler l'affaire au fond, dans cette mesure, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative.

5. Si la demande de communication des requérants portait non seulement sur leur dossier médical détenu par l'OFII dans le cadre de leur demande de titre de séjour mais aussi sur le dossier administratif de M. D... et ceux de ses enfants, il ressort des pièces du dossier que l'office ne dispose d'aucun autre dossier que celui constitué par les différents éléments médicaux relatifs aux requérants et qui leur ont été communiqués. L'inexistence du dossier demandé fait ainsi obstacle à ce qu'il soit fait droit à la demande de communication.

6. Il résulte de tout ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à demander l'annulation de la décision de l'OFII qu'ils attaquent en tant qu'elle rejette leur demande de communication du dossier administratif de M. D... et de ceux de ses enfants. Leurs conclusions à fin d'injonction et les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent par suite qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par l'OFII.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 14 octobre 2021 est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la requête de M. et Mme D... relatives à la communication du dossier administratif de M. D... et de ceux de ses enfants détenu par l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Article 2 : Le surplus des conclusions présentées par M. et Mme D... est rejeté.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. B... D..., premier dénommé pour l'ensemble des requérants, et à l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

Délibéré à l'issue de la séance du 23 mars 2023 où siégeaient : M. Alexandre Lallet, conseiller d'Etat, présidant ; Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat et M. Philippe Bachschmidt, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 14 avril 2023.

Le président :

Signé : M. Alexandre Lallet

Le rapporteur :

Signé : M. Philippe Bachschmidt

La secrétaire :

Signé : Mme Naouel Adouane


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 463009
Date de la décision : 14/04/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 14 avr. 2023, n° 463009
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe Bachschmidt
Rapporteur public ?: Mme Esther de Moustier
Avocat(s) : SCP THOUIN-PALAT, BOUCARD ; SCP POUPET et KACENELENBOGEN

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:463009.20230414
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award