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03/03/2023 | FRANCE | N°461280

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 03 mars 2023, 461280


Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 461280, par une requête enregistrée le 8 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. G... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner avant-dire droit au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de produire aux débats l'ensemble des éléments à leur disposition permettant d'établir ou de corroborer que le " passe vaccinal " et le " passe sanitaire " présentent un caractère nécessaire pour la protection de la santé publique dans l'ensemble des établissements concernés ;r>
2°) d'annuler les articles 2-1, 2-2, 2-3, 2-4, 8, 11, 15, 27 et 47-1 du décret n...

Vu les procédures suivantes :

1° Sous le n° 461280, par une requête enregistrée le 8 février 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. G... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner avant-dire droit au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de produire aux débats l'ensemble des éléments à leur disposition permettant d'établir ou de corroborer que le " passe vaccinal " et le " passe sanitaire " présentent un caractère nécessaire pour la protection de la santé publique dans l'ensemble des établissements concernés ;

2°) d'annuler les articles 2-1, 2-2, 2-3, 2-4, 8, 11, 15, 27 et 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

3°) d'annuler l'annexe 1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

4°) d'annuler l'article 1er du décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022 ;

5°) d'enjoindre dans un délai de 48 heures au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de mettre fin au " passe vaccinal " et au " passe sanitaire " dans tous les lieux, établissements, activités et transports ou celui-ci est applicable dans le cadre des dispositions attaquées, d'établir un mécanisme d'indemnisation des dommages résultant de la vaccination imposée par ces " passes " dans des conditions conformes au principe d'égalité et de non-discrimination, d'exclure les mineurs de moins de 18 ans de leur application, de ne pas subordonner exclusivement leur validité à l'injection d'un dose d'un vaccin à ARNm ou, à tout le moins, à l'injection de vaccins utilisant des technologies différentes et produits par des laboratoires différents, d'établir une exception au " passe vaccinal " dans les transports publics interrégionaux en cas de motif impérieux d'ordre professionnel et d'établir un mécanisme d'extinction du dispositif sur le modèle résultant du projet de loi issu de la 1ère lecture faite par le Sénat ou, à tout le moins, de réexaminer l'opportunité d'appliquer le dispositif sous le contrôle du Parlement avant la date du 28 février 2022 et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° Sous le n° 462042, par une requête enregistrée le 3 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme D... E... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner avant-dire droit au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de produire aux débats l'ensemble des éléments à leur disposition permettant d'établir ou de corroborer que le " passe vaccinal " et le " passe sanitaire " présentent un caractère nécessaire pour la protection de la santé publique dans l'ensemble des établissements concernés ;

2°) d'annuler les articles 2-1, 2-2, 2-3, 2-4, 8, 11, 15, 27 et 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

3°) d'annuler l'annexe 1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

4°) d'annuler l'article 1er du décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022 ;

5°) d'enjoindre dans un délai de 48 heures au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de mettre fin au " passe vaccinal " et au " passe sanitaire " dans tous les lieux, établissements, activités et transports ou celui-ci est applicable dans le cadre des dispositions attaquées, d'établir un mécanisme d'indemnisation des dommages résultant de la vaccination imposée par ces " passes " dans des conditions conformes au principe d'égalité et de non-discrimination, d'exclure les mineurs de moins de 18 ans de leur application, de ne pas subordonner exclusivement leur validité à l'injection d'un dose d'un vaccin à ARNm ou, à tout le moins, à l'injection de vaccins utilisant des technologies différentes et produits par des laboratoires différents, d'établir une exception au " passe vaccinal " dans les transports publics interrégionaux en cas de motif impérieux d'ordre professionnel et d'établir un mécanisme d'extinction du dispositif sur le modèle résultant du projet de loi issu de la 1ère lecture faite par le Sénat ou à tout le moins de réexaminer l'opportunité d'appliquer le dispositif sous le contrôle du Parlement avant la date du 28 février 2022 et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

3° Sous le n° 462046, par une requête enregistrée le 3 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. C... F... demande au Conseil d'Etat :

1°) de saisir la Cour européenne des droits de l'homme sur le fondement de l'article 1er du protocole n°16 à la convention de sauvegarde de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales d'une demande d'avis de la conformité des actes attaqués aux articles 1er du premier protocole additionnel, à l'article 1er du protocole n°12 et aux articles 2, 5, 8 et 14 de la Convention ;

2°) d'annuler les articles 2-1, 2-2, 2-3, 2-4, 8, 11, 15, 27 et 47-1 du décret n°2021-699 du 1er juin 2021 ;

3°) d'annuler l'annexe 1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

4°) d'annuler l'article 1er du décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022 ;

5°) d'enjoindre dans un délai de 48 heures au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de mettre fin au " passe vaccinal " et au " passe sanitaire " dans tous les lieux, établissements, activités et transports ou celui-ci est applicable dans le cadre des dispositions attaquées, d'établir un mécanisme d'indemnisation des dommages résultant de la vaccination imposée par ces " passes " dans des conditions conformes au principe d'égalité et de non-discrimination, d'exclure les mineurs de moins de 18 ans de leur application, de ne pas subordonner exclusivement leur validité à l'injection d'un dose d'un vaccin à ARNm ou, à tout le moins, à l'injection de vaccins utilisant des technologies différentes et produits par des laboratoires différents, d'établir une exception au " passe vaccinal " dans les transports publics interrégionaux en cas de motif impérieux d'ordre professionnel et d'établir un mécanisme d'extinction du dispositif sur le modèle résultant du projet de loi issu de la 1ère lecture faite par le Sénat ou à tout le moins de réexaminer l'opportunité d'appliquer le dispositif sous le contrôle du Parlement avant la date du 28 février 2022 et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

....................................................................................

4° Sous le n° 462070, par une requête enregistrée le 3 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... H... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'ordonner avant-dire droit au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de produire aux débats l'ensemble des éléments à leur disposition permettant d'établir ou de corroborer que le " passe vaccinal " et le " passe sanitaire " présentent un caractère nécessaire pour la protection de la santé publique dans l'ensemble des établissements concernés ;

2°) d'annuler les articles 2-1, 2-2, 2-3, 2-4, 8, 11, 15, 27 et 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

3°) d'annuler l'annexe 1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 ;

4°) d'annuler l'article 1er du décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022 ;

5°) d'enjoindre dans un délai de 48 heures au Premier ministre et au ministre des solidarités et de la santé de mettre fin au " passe vaccinal " et au " passe sanitaire " dans tous les lieux, établissements, activités et transports ou celui-ci est applicable dans le cadre des dispositions attaquées, d'établir un mécanisme d'indemnisation des dommages résultant de la vaccination imposée par ces " passes " dans des conditions conformes au principe d'égalité et de non-discrimination, d'exclure les mineurs de moins de 18 ans de leur application, de ne pas subordonner exclusivement leur validité à l'injection d'un dose d'un vaccin à ARNm ou, à tout le moins, à l'injection de vaccins utilisant des technologies différentes et produits par des laboratoires différents, d'établir une exception au " passe vaccinal " dans les transports publics interrégionaux en cas de motif impérieux d'ordre professionnel et d'établir un mécanisme d'extinction du dispositif sur le modèle résultant du projet de loi issu de la 1ère lecture faite par le Sénat ou à tout le moins de réexaminer l'opportunité d'appliquer le dispositif sous le contrôle du Parlement avant la date du 28 février 2022 et d'assortir cette injonction d'une astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la notification de la décision à intervenir ;

....................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la Constitution, et notamment son Préambule ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 ;

- la loi n° 2022-46 du 22 janvier 2022 ;

- la décision n° 2021-819 DC du Conseil constitutionnel du 31 mai 2021 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat,

- les conclusions de M. Laurent Domingo, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. Les requêtes présentant à juger les mêmes questions, il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. M. G... A..., Mme D... E..., M. C... F... et M. B... H... demandent l'annulation des dispositions des articles 2-1, 2-2, 2-3, 2-4, 8, 11, 15, 27 et 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 dans leur version résultant notamment du décret n° 2022-51 du 22 janvier 2022 et du décret n° 2022-176 du 14 février 2022 et de l'annexe 1 du décret n°2021-699 du 1er juin 2021 en tant, d'une part, qu'elles subordonnent, pour les personnes ne pouvant justifier ni d'un schéma vaccinal complet ni d'un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19, l'accès à certains établissements, lieux, services et événements à la présentation du résultat négatif d'un test ou d'un examen de dépistage et, d'autre part, qu'elles réduisent la durée du certificat de rétablissement de six à quatre mois.

3. La loi du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, dans sa version applicable aux litige, prévoit au 2° du A du II de son article 1er que le Premier ministre peut, par décret, subordonner à la présentation d'un " passe sanitaire " ou d'un " passe vaccinal " l'accès à certains lieux, établissements et services où sont exercées certaines activités limitativement énumérées. Le B du II du même article prévoit que la présentation de ce " passe " est réalisée sous une forme permettant aux personnes et aux services autorisés à en assurer le contrôle de connaître les données strictement nécessaires à l'exercice de leur contrôle et ne permettant pas aux personnes ou aux services autorisés à en assurer le contrôle d'en connaître la nature. Elle ne s'accompagne d'une présentation de documents officiels d'identité que lorsque ceux-ci sont exigés par les forces de l'ordre. Toutefois, lorsqu'il existe des raisons sérieuses de penser que le document présenté ne se rattache pas à la personne qui le présente, les personnes et services autorisés à assurer le contrôle du " passe vaccinal " et du " passe sanitaire " peuvent demander à la personne concernée de produire un document officiel comprenant sa photographie afin de vérifier la concordance entre les éléments d'identité mentionnés sur ces documents. Ils ne sont pas autorisés à conserver ou à réutiliser ce document ou les informations qu'il contient, sous peine de sanctions.

4. D'une part, l'article 2-1 du décret attaqué précise que les règles relatives à l'établissement et au contrôle du résultat d'un examen de dépistage, au justificatif de statut vaccinal et du certificat de rétablissement sont définies aux articles 2-2 et 2-3. Il ajoute à son deuxième alinéa que ces règles sont applicables aux déplacements et à l'accès aux établissements, lieux et événements mentionnés par le décret. L'article 2-2 du décret attaqué précise les modes de preuve de l'absence de contamination à la covid-19, qui peuvent s'effectuer par le résultat d'un examen de dépistage virologique RT-PCR ou antigénique ne concluant pas à une contamination par la covid-19 de moins de 24 heures, par un justificatif de statut vaccinal concernant la covid-19 ou par un certificat de rétablissement à la suite d'une contamination par la covid-19. L'article 2-3 du décret attaqué autorise certaines personnes et certains services limitativement énumérés à habiliter nommément des personnes et des services à contrôler les justificatifs du " passe vaccinal " et du " passe sanitaire ", précise les informations pouvant être portées à la connaissance des personnes en charge de ces contrôles et prévoit des modalités d'information relatives à ces contrôles. L'article 2-4 du décret attaqué prévoit une exemption à la vaccination contre la covid-19 en cas de contre-indication médicale et précise les modalités d'élaboration du certificat médical de contre-indication. Les articles 8, 11 et 15 du décret attaqué concernent l'obligation de port du masque de protection dans certains lieux affectés aux transports. L'article 27 du décret attaqué concerne l'obligation de port du masque et de respect des gestes barrières dans certaines catégories d'établissements recevant du public où l'accueil du public n'est pas interdit. L'article 47-1 du décret attaqué établit la liste des établissements, lieux, services et événements dont l'accès est subordonné à la présentation d'un " passe sanitaire " ou d'un " passe vaccinal ". D'autre part, l'annexe 1 du décret du 1er juin 2021 apporte des précisions sur les gestes barrières et sur l'obligation de port du masque de protection.

5. Les requérants ne formulent aucun moyen dirigé contre les articles 8, 11, 15 et 27 des décrets attaqués. Par suite, leurs conclusions dirigées contre ces dispositions ne peuvent qu'être rejetées.

6. Les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions attaquées seraient entachées d'" incompétence négative " au motif qu'elles ne préciseraient pas les modalités de réalisation des contrôles du " passe vaccinal " et du " passe sanitaire ".

Sur le " passe sanitaire " et le " passe vaccinal " :

7. En premier lieu, il ressort des pièces des dossiers que les dispositions attaquées sont intervenues dans un contexte de forte reprise épidémique qui s'est maintenue durant plusieurs semaines, avec des augmentations significatives du taux d'incidence, du nombre des hospitalisations, des admissions en services de soins intensifs et des décès, alors que la couverture vaccinale, en augmentation, restait encore insuffisante. Un renforcement des mesures visant à lutter contre l'épidémie de covid-19 était ainsi nécessaire pour maîtriser cette nouvelle vague épidémique. L'instauration d'un " passe sanitaire ", puis d'un " passe vaccinal ", selon les modalités fixées par les textes successifs qui en ont défini les conditions d'obtention et la durée de validité, a permis de maintenir l'accès à certains lieux, établissements ou événements présentant, par leur nature et leurs caractéristiques, un risque de contamination accru à raison de la densité de personnes présentes et de la plus grande difficulté à y faire respecter les règles de distanciation sociale. Le moyen tiré de ce que les mesures ainsi prises n'auraient pas été nécessaires, proportionnées et adaptées au regard de la situation sanitaire existant sur le territoire national à la date des décrets attaqués, qui ne repose que sur des considérations de portée générale ou des éléments inopérants, ne peut qu'être écarté, de même que ceux tirés de ce qu'elles méconnaîtraient le principe d'égalité.

8. En deuxième lieu, il ne saurait être sérieusement soutenu qu'en subordonnant la validité du " passe sanitaire " et du " passe vaccinal " à l'injection d'une dose supplémentaire d'un vaccin à acide ribonucléique (ARN) messager, le pouvoir réglementaire aurait méconnu les objectifs à valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d'infraction, de sauvegarde de l'ordre public et de protection de la santé publique au motif que l'inoculation des vaccins anéantirait toute possibilité d'engager effectivement des poursuites pénales et civiles en cas d'effets indésirables graves.

9. En troisième lieu, les dispositions attaquées énumèrent limitativement les personnes et services autorisés à habiliter des personnes pour procéder au contrôle du " passe vaccinal " et du " passe sanitaire " et les informations auxquelles ils ont accès. Elles mettent en place un registre précisant les modalités de mise en œuvre de ces contrôles. Si elles permettent à certaines personnes privées exploitant des lieux, activités ou services dont l'accès est subordonné à la présentation d'un " passe vaccinal " ou d'un " passe sanitaire " de demander aux intéressés de produire un document officiel d'identité avec photographie, une telle demande a pour seul objet de vérifier la concordance entre les éléments d'identité du " passe " et le document d'identité, les documents d'identité ne pouvant être conservés ou réutilisés par eux, sous peine de sanctions. En outre, le refus de la personne intéressée de produire un tel document a pour seule conséquence l'impossibilité pour la personne d'accéder au lieu. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du principe de non délégation des missions de police à des personnes privées, ainsi que de la violation du droit au respect de la vie privée et du secret médical, ne peuvent qu'être écartés.

10. En quatrième lieu, les dispositions attaquées ne sauraient être regardées, eu égard à la nature du dispositif du " passe vaccinal " et du " passe sanitaire " et aux lieux, événements, services et activités dont l'accès est subordonné à la présentation d'un tel document, comme instaurant une obligation vaccinale déguisée.

11. En cinquième lieu, les personnes non vaccinées sont, au regard du risque de contamination à la covid-19 et du risque de contracter une forme grave de la maladie, dans une situation différente des personnes justifiant d'un schéma vaccinal complet. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe de non-discrimination ne peut qu'être écarté.

12. En sixième lieu, la mise sur le marché d'un vaccin au bénéfice d'une autorisation de mise sur le marché délivrée par une autorité compétente en vue de son administration à la population ne constitue, eu égard à sa nature et à ses finalités, ni une étude clinique, ni un essai clinique. Un tel vaccin ne peut, en conséquence, être qualifié de médicament expérimental au sens du règlement n° 536/2014 du Parlement européen et du Conseil du 16 avril 2014. Par suite, le moyen tiré de ce que l'inoculation de vaccins ayant reçu une autorisation de mise sur le marché conditionnelle par l'Agence européenne des médicaments porterait atteinte au principe de l'intégrité physique du corps humain doit être écarté.

Sur le certificat de rétablissement :

13. D'une part, le principe de non-rétroactivité des actes administratifs ne fait pas obstacle à l'application immédiate des dispositions réglementaires modifiant la durée de validité du certificat de rétablissement, laquelle ne constitue pas un droit acquis pour les personnes possédant un tel document. Au surplus, il ressort des pièces des dossiers que le décret attaqué du 14 février 2022 est intervenu dans un contexte sanitaire marqué par une forte dynamique épidémique, avec la présence d'un variant " omicron " dont la contagiosité était plus forte que la souche originelle et pour lequel le vaccin offrait une protection immunitaire moins élevée dans la durée. Il était, par suite, nécessaire pour garantir l'efficacité de la mesure et la protection de la population, que la diminution de la durée du certificat de rétablissement soit effective le plus rapidement possible. D'autre part, le certificat de rétablissement ne constitue pas une décision individuelle créatrice de droits dont le retrait serait illégal. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du principe de non-rétroactivité des actes administratifs, de l'illégalité de retrait d'une décision individuelle créatrice de droits et d'erreur manifeste d'appréciation tirée du passage de six à quatre mois du délai de validité du certificat de rétablissement ne peuvent qu'être écartés.

14. Les autres moyens des requêtes ne sont pas assortis des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé et ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être écartés.

15. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non-recevoir opposées en défense et sans qu'il y ait lieu d'adresser une demande d'avis consultatif à la Cour européenne des droits de l'homme, que M. A... et autres ne sont pas fondés à demander l'annulation des dispositions qu'ils contestent. Les conclusions de leurs requêtes doivent être rejetées. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans les présentes instances, la partie perdante.

D E C I D E :

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Article 1er : Les requêtes de M. A..., Mme E..., M. F... et M. H... sont rejetées.

Article : La présente décision sera notifiée à M. G... A..., Mme D... E..., M. C... F..., M. B... H... et au ministre de la santé et de la prévention.

Copie en sera adressée à la Première ministre et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Délibéré à l'issue de la séance du 25 janvier 2023 où siégeaient : M. Bertrand Dacosta, président de chambre, présidant ; Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat et Mme Isabelle Lemesle, conseillère d'Etat-rapporteure.

Rendu le 3 mars 2023.

Le président :

Signé : M. Bertrand Dacosta

La rapporteure :

Signé : Mme Isabelle Lemesle

La secrétaire :

Signé : Mme Naouel Adouane


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 461280
Date de la décision : 03/03/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 03 mar. 2023, n° 461280
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle Lemesle
Rapporteur public ?: M. Laurent Domingo

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2023:461280.20230303
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