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29/12/2022 | FRANCE | N°456891

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 29 décembre 2022, 456891


Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 6 janvier 2020 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande de réexamen.

Par une décision n° 20008529 du 20 juillet 2021, la cour nationale du droit d'asile a annulé la décision attaquée et reconnu la qualité de réfugié à M. A....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les

21 septembre et 20 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat

, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affai...

Vu la procédure suivante :

M. B... A... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 6 janvier 2020 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande de réexamen.

Par une décision n° 20008529 du 20 juillet 2021, la cour nationale du droit d'asile a annulé la décision attaquée et reconnu la qualité de réfugié à M. A....

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les

21 septembre et 20 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire à la cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et le protocole signé à New-York le 31 janvier 1967 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sébastien Gauthier, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public,

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et la SCP Fabiani,

Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 18 avril 2008, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté la demande d'asile présentée par M. B... A..., ressortissant russe d'origine tchétchène. La Cour nationale du droit d'asile a rejeté, le 26 juillet 2013, son recours contre cette décision. M. A... a été condamné par le tribunal correctionnel de Paris, puis par la cour d'appel de Paris, par un arrêt devenu définitif du 12 septembre 2017, à une peine de cinq ans d'emprisonnement dont un an avec sursis et une mise à l'épreuve pendant trois ans pour participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un acte de terrorisme. Par une décision du 6 janvier 2020, le directeur de l'OFPRA a rejeté sa demande de réexamen de sa demande d'asile. L'OFPRA se pourvoit en cassation contre la décision du 20 juillet 2021 par laquelle la Cour nationale du droit d'asile a annulé sa décision et a reconnu la qualité de réfugié à M. A... à raison du risque de persécution encouru dans son pays en raison des opinions politiques qui pourraient lui être prêtées, en jugeant qu'il n'entrait pas dans le champ de l'une des clauses d'exclusion prévues par la convention de Genève du 28 juillet 1951.

2. Aux termes du 2° du A de l'article 1er de la convention de Genève du

28 juillet 1951, doit être considérée comme réfugiée toute personne qui : " craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays ". Aux termes du F de ce même article : " Les dispositions de cette Convention ne seront pas applicables aux personnes dont on aura des raisons sérieuses de penser : (...) c) qu'elles se sont rendues coupables d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies ".

3. Les actes terroristes ayant une ampleur internationale en termes de gravité, d'impact international et d'implications pour la paix et la sécurité internationales peuvent être assimilés à des agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies au sens du c) du F de l'article 1er de la convention de Genève. Il en va de même des actions de soutien d'une gravité suffisante à une organisation qui commet, prépare ou incite à la commission de tels actes.

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, pour prononcer à l'encontre de M. A... la condamnation mentionnée au point 1, le juge pénal a établi que ce dernier avait participé à une association terroriste en toute connaissance de cause, après avoir relevé qu'il avait entretenu des liens avec l'organisation " Emirat du Caucase ", affiliée à l'organisation al-Qaïda, classée comme organisation terroriste par l'Organisation des Nations Unies, et apporté un soutien logistique à l'ensemble de ses membres, en créant ou en aidant à la diffusion de trois sites internet, sur l'un desquels il avait publié un appel au djihad global, et un soutien financier, en acceptant de servir d'intermédiaire pour financer un voyage d'un membre de cette organisation, qui était destiné à commettre un attentat à Moscou. Dans ces conditions, la Cour ne pouvait, sans entacher sa décision d'inexacte qualification juridique des faits, et après avoir rappelé les constatations faites par le juge pénal, se fonder sur les circonstances, à les supposer établies, que l'intéressé n'aurait pas appartenu au cercle décisionnel de cette entreprise terroriste et que l'aide logistique apportée au projet d'attentat n'aurait été ni essentielle, ni décisive, [ni sur les regrets qu'il avait exprimés à l'audience,] pour juger que les faits pour lesquels il avait été condamné ne relevaient pas de la clause d'exclusion prévue au c) du F de l'article 1er de la convention de Genève.

5. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision de la Cour nationale du droit d'asile qu'il attaque.

6. Les dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et

37 de la loi du 10 juillet 1991 font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'OFPRA, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision du 20 juillet 2021 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. B... A....


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 456891
Date de la décision : 29/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 29 déc. 2022, n° 456891
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sébastien Gauthier
Rapporteur public ?: M. Philippe Ranquet
Avocat(s) : SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 05/01/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:456891.20221229
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