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23/12/2022 | FRANCE | N°452791

France | France, Conseil d'État, 4ème chambre, 23 décembre 2022, 452791


Vu la procédure suivante :

Les sociétés Le Polygone et le Polygone II ont demandé à la cour administrative d'appel de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 avril 2019 par lequel le maire de Montpellier a délivré un permis de construire à la société Odysseum Place de France en tant que ce permis vaut autorisation d'exploitation commerciale, ainsi que la décision du 1er août 2019 rejetant leur recours gracieux. Par un arrêt n° 19MA04432 du 22 mars 2021, la cour administrative d'appel a rejeté leur demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire co

mplémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 mai, 15 juillet et ...

Vu la procédure suivante :

Les sociétés Le Polygone et le Polygone II ont demandé à la cour administrative d'appel de Marseille d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 29 avril 2019 par lequel le maire de Montpellier a délivré un permis de construire à la société Odysseum Place de France en tant que ce permis vaut autorisation d'exploitation commerciale, ainsi que la décision du 1er août 2019 rejetant leur recours gracieux. Par un arrêt n° 19MA04432 du 22 mars 2021, la cour administrative d'appel a rejeté leur demande.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 20 mai, 15 juillet et 13 décembre 2021 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, les sociétés Le Polygone et Le Polygone II demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à leur requête ;

3°) de mettre à la charge solidaire des défendeurs la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de commerce ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes,

- les conclusions de M. Jean-François de Montgolfier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat des sociétés Le Polygone et Polygone II, à la SCP Buk Lament - Robillot, avocat de la société Odysseum Place de France et à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de la commune de Montpellier ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Odysseum Place de France a déposé, le 8 août 2018, une demande de permis de construire pour la réhabilitation et l'extension d'un centre commercial. Le projet a reçu un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial de l'Hérault le 18 octobre 2018. Saisie de recours formés notamment par les sociétés Le Polygone et Polygone II, la Commission nationale d'aménagement commercial a émis un avis favorable au projet le 7 mars 2019. Par un arrêté du 29 avril 2019, le maire de Montpellier a délivré le permis de construire à la société Odysseum Place de France pour la réalisation de ce projet. Les sociétés Le Polygone et Polygone II ont formé le 28 juin 2019 un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté que le maire de Montpellier a rejeté par une décision du 1er août 2019. Par un arrêt du 22 mars 2021 contre lequel ces deux sociétés se pourvoient en cassation, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2019 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale et de la décision du 1er août 2019.

2. Aux termes du I de l'article L. 752-17 du code de commerce : " I. - Conformément à l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme, le demandeur, le représentant de l'État dans le département, tout membre de la commission départementale d'aménagement commercial, tout professionnel dont l'activité, exercée dans les limites de la zone de chalandise définie pour chaque projet, est susceptible d'être affectée par le projet ou toute association les représentant peuvent, dans le délai d'un mois, introduire un recours devant la Commission nationale d'aménagement commercial contre l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial. / (...) / À peine d'irrecevabilité, la saisine de la Commission nationale par les personnes mentionnées au premier alinéa du présent I est un préalable obligatoire au recours contentieux dirigé contre la décision de l'autorité administrative compétente pour délivrer le permis de construire. Le maire de la commune d'implantation du projet et le représentant de l'État dans le département ne sont pas tenus d'exercer ce recours préalable. ". Aux termes du premier alinéa de l'article L. 425-4 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet est soumis à autorisation d'exploitation commerciale au sens de l'article L. 752-1 du code de commerce, le permis de construire tient lieu d'autorisation dès lors que la demande de permis a fait l'objet d'un avis favorable de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial. (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions que l'avis de la commission départementale d'aménagement commercial ou, le cas échéant, de la Commission nationale d'aménagement commercial, a le caractère d'un acte préparatoire à la décision prise par l'autorité administrative sur la demande de permis de construire valant autorisation d'exploitation commerciale. Si le recours formé auprès de la Commission nationale d'aménagement commercial à l'encontre de l'avis émis par la commission départementale constitue, en vertu de ces mêmes dispositions, un préalable obligatoire à l'introduction d'un recours pour excès de pouvoir contre la décision de l'autorité administrative sur la demande de permis de construire valant autorisation commerciale, un tel recours préalable obligatoire ne peut être regardé, dès lors qu'il est dirigé contre l'avis préalable de la commission départementale de l'aménagement commercial, et non contre la décision de l'autorité administrative, seule décision susceptible de recours contentieux, comme ayant pour objet ou pour effet de faire obstacle à ce qu'un recours gracieux formé contre cette décision devant l'autorité administrative qui l'a prise, pour autant qu'il est formé dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, interrompe le cours de ce délai.

4. Par suite, en jugeant que les conclusions de la requête des sociétés requérantes tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 avril 2019 en tant qu'il vaut autorisation d'exploitation commerciale étaient tardives, au motif que le recours gracieux qu'elles avaient formé le 28 juin 2019 devant le maire de Montpellier n'avait pas eu pour effet, en application de l'article L. 412-4 du code des relations entre le public et l'administration, de préserver le délai de recours contentieux, la cour a entaché son arrêt d'erreur de droit.

5. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de leur pourvoi, que les sociétés Le Polygone et Polygone II sont fondées à demander l'annulation de l'arrêt qu'elles attaquent.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge des sociétés Le Polygone et Polygone II qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Montpellier et de la société Odysseum Place de France la somme de 750 euros chacune à verser d'une part à la société Le Polygone, d'autre part à la société Polygone II au titre des mêmes dispositions.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 22 mars 2021 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la cour administrative d'appel de Marseille.

Article 3 : La société Odysseum Place de France et la commune de Montpellier verseront, chacune, la somme de 750 euros d'une part à la société Le Polygone, d'autre part à la société Polygone II, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la société Odysseum Place de France et par la commune de Montpellier, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : La présente décision sera notifiée aux sociétés Le Polygone et Polygone II, à la commune de Montpellier et à la société Odysseum Place de France.

Copie pour information sera transmise au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Délibéré à l'issue de la séance du 1er décembre 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; M. Jérôme Marchand-Arvier, conseiller d'Etat et M. Sylvain Monteillet, maître des requêtes-rapporteur.

Rendu le 23 décembre 2022.

La présidente :

Signé : Mme Maud Vialettes

Le rapporteur :

Signé : M. Sylvain Monteillet

Le secrétaire :

Signé : M. Jean-Marie Baune


Synthèse
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 452791
Date de la décision : 23/12/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 23 déc. 2022, n° 452791
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Sylvain Monteillet
Rapporteur public ?: M. Jean-François de Montgolfier
Avocat(s) : SCP L. POULET-ODENT ; SCP BUK LAMENT - ROBILLOT ; SCP LYON-CAEN, THIRIEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:452791.20221223
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